EPO
~oit
leur apprendre
a
refpeacr , Or ces iotérets ne font
pas ceux de tel ou de tel homme, mais ceu x de I'hu–
,nanité en général, le plus grand
&
le plus digne ohjet
du plus noble de tous les pocmes ,
Nous u'svoos confidéré jufqu'ici le fuj et de
l'/popé,
glt'en lu i-méme; mais queHe qu'en foit la bcauté
nat~relle ,
ce
n'e!! encore qu'un marbre informe que le el–
feau doit animer,
De la COi/lpojition ,
La compofi tioo de
l'lpopfe
em–
braffe trois points prioeipaux, le plao, les caraaeres,
&
le llyle ,
00
dillingue daos le plan l'expofition, le nreud,
&
le déoouemeru : dans les caraaeres , les pallioDS
&
I~
moral; daos le Ilf le, la force, la précifion,
&
I'é–
légaoce , I'harmoni.
&
le coloris,
D u pl"n,
L'ex~ofition
a trois parties, le début, i'in–
vocation,
&
I'avant-fcene ,
Le début n'ell que le titre du pocme plus dévelop–
pé , il doit etre noble
&
fimple , '
L'invocation n'ell une partie efIentielle
de
l'ipopée ,
qu'en fuppofant que le pocte ait :\ révéler des fecrets
il)c¡¡nnus aux hommes , Lueain qui ne devoit etre que
IrOp inll ruit des malheurs de fa patrie, au !ieu d'invo–
,quer un dieu p(lu r I'iofpirer , fe tranfpon e tout-a-coup
¡lu, tems ou s'alluma
I~
guerre civile ,
P
frérpit, il s'é–
c
rle
¡
" Citoyens, arretez ; quelle efl votre foreur!
" L 'habitant fo1i taire el! erraot daos vos villes;
'1
L a ¡pain du 13boureur manque
a
vos ehamps
O'éril~s,
D efrmtque mama p0fcemibl/J
flrviJ ,
Ce mouvemcnt ell plein de chaleur ; une invocation
cut été froide
a
fa place ,
V avant-Cceoe ell le dévelopement de
la
fitua tion des
perfoonages au moment
0 11
commence le pocme,
&
le
,ableau des iotéréts oppoCés, dont la eomplication va
former le nreua de I'intrigue ,
D aos I'avant-(cene, ou le pocre fuit I'ordre des éve–
nemens,
&
la ' fable fe nomme
jimple;
ou
iI
laiffe
~r
riere lui une parHe ' de ,I.'aaion pour fe replier Cur le
paffé,
&
la fable fe nomme
implexe:
celle-ci a un
graod avantage, noo-feulemeot elle anime la narration,
en introduifaot un perfonnage plus intérefIé
&
plus in–
téreffant que le pacte, comme Heori
IV,
Ul yffe, E–
lJée ,
&c,
mais encore en preoant le fujet par le ceo–
Ire, elle fai t reri uer fur I'avant,fceoe I'illtéret de la li–
t,u~tion
préfeme des aaeurs , par I'impatience Otl I'on eft
d'apprendre ce qui les y a cooduits,
Touterois de grands évenemens , des tableaux variés ,
des fitu ations pathétiq ues, ne laiflent pas de former le
tiflp d' u,n beau pocme, quoique préfen rés daos leur or–
<lre oaturel , Boilenu traire
de maigres hifloriem ,
les
poeres qui
!lúvent /'qrdre des tems ;
mais o'en déplaiCe
a
Boileau , I'exaaitude ou les licences chronologiques
f.ont tres-indifférelltes
a
la beaulé de la Poéfie; c'ell la
c)Jaleur de la narra tian , la force des peintures, I'inré–
ret de l'iotrigue , le contralle des caraaeres , le com–
bat des paffioos,
la
vérité
&
la noblc!re des mreurs,
qui font rame de
l'épQple,
&.
qui feroot du morceau
d'hilloire le plus exaélerpenr fu ivi , un pocme épique
admirable ,
L'inrrigue
~
été jurqu'ici la partic la plus néglig¿e du
pocme épique, tan dis que dans la tragédie elle s'el!
perfeaionnée de plus en pl us, On a ofé fe detach. r de,
Sophocle
&
d'Euripide, mais on a craint d'abandonner
les traces d'Homere: Virgile I'a imité ,
&
I'on a imité
Virgile,
Arillote
3
touché au principe le plus lumineux de
I'¡popie ,
lorfq u'il a dit que ce poeme devoit etre
ftne
~ragédi,
01
r/ú t ,
Suivoos ce priocipe dans fes conCé –
queoces ,
D an¡ la tragédie lOu t concourt
3U
nceud ou an dé–
nouemem : tout devroit donc · y concourir daos
l'ipo–
pie,
Daos la tragédie, un incident nait d'un incident,
uoe fituatioo en produit une autre : dans le poeme épique
les incidens
&
les li tuations devroil!llt donc s'eochalner
de
m~me,
p aos 'a tragédie l'iotén:1crojt d'aéle en aae,
&
le péril devieot plus preffant : le péril
&
I'imeret ¡levroi–
eOI
donc avoir les memes progres daos
I',popée,
Enfin le
palhétique en I'ame de la tragédie : il devroit done elre
rame de
l" popée ,
&
preodre fa fource dans les
~ivers
caraaeres
&
les inlé r¿ts oppofés , Qu'on examine apres
cela quel ell le plan des poemes
ancien~,
L'l liade a
deu x efpeces de nreuds; la divifi on des dieux, qui eft
fr
oide
&
~hoquanre
;
&
celle des chefs, qui ne fait qu'
p'n~
f¡tpauqn .
Ll
colere q'Achillc prolonge
~e
!ilfL!
d~
EPO
~erils
&
de eombats qui for ment l'aaion de I'lIiade;
mais cette eolere, t(lute farale qu'elle efl , ne Ce mani–
fell e que par I'abrooce d' Achille,
&
les paffi ons (I'a–
gifIeot fu r nous que par leurs dével(lppemens, V amour
&
la
douleur d' Andromaque ne produifeot qu'un inté–
ret momemaoé, prefque lout le relle du poeme fe palre
en affaots
&
eo batailles; tableaux qui ne frappent guere
que I'imagination,
&
dOllt I'intén:t ne va jamais ju(qu' a
I'ame,
Le pl&n de I'Odyffée
&
eelui de l'Enéide font plus
variés; mais comment les fi tuations y foot-elles ame–
nées? un coup de vent fui t un épifode;
&
les avantu–
res d'U Iyffe
&
d'Eoée refremblent auffi pen
a
I'intri–
gue d'uoe tragédie , que le voyage d' Anfon ,
S'il relloit enCOre des D aciers, ils ne manqueroient
pas de dire qu'oo rifque lOur
it
s'écarter de la route qu'
H omere a tracée,
&
que Virgile a fuivie; qu'il en efl
de
l:!
Poé fie comme de la Medecine,
&
ils nous
ci–
teroient Hippocrate pou r prouver qu'il ell dangereux
d'innover dans
I'épople ,
Mais pourquoi ne feroit-on
pas
a
I'égard d'Homere
&
de Virgile , ce qu'oll a fait
a
I'''ga rd de Sophocle
&
d' Euripide? on a dilliogué
leurs beautés de leurs défau ts; on a pris I'art ou i1s
I'om laiffé; on a effayé de faire touJours comme ils
avoient fait quelquefois,
&
c'eft fur'tout daos la par–
tie , de l' Lottigue que Corneille
&
Racine fe font é–
le vés au-deffus d' ellx, Suppofons que tout le poeme
de I'E né't'de ffit tilfu comme le quatrieme livre; que
les iocidens naifIan t les un s des autres, pulfent produire
&
emretenir jufqu'a la fi n celte variété de fentimeos
&
d'images, ce melange d'épique
&
de dramatique, cette
alternative prefIaote d'inquiéLUde
&
de furprife, de ter–
reur
&
de pitié ; l'Entide De feroit-elle pas fupérieure
a
ce qu'elle efl?
L'ipopé.,
pour remplir I'idée d'Arillote, devroit done
etre uoe tragédie compofée d'ull nombre de fcenes in–
déterminé , doot les imervalles feroiem occupés par le
pacte : tel ell ce priocipe dans la fpéculation , e'cll au
génie (eul
ii
juger s'il efl pratiquable,
L a tragédie des (on origine a eu trois patties, la fce–
ne, le récit,
&
le chreur;
&
de-la trois (ortes de r6-
les , les aaeu!s, les confidens ,
&
les témoins, D aos
I'épople,
le prem ier de ces r6les ell celui des héros, le
pocte ell chargé des deu x autres,
Plettrez,
dit Hora–
ce,
ji VOtlS voftl,z qlle je pleure
,
Qu'uo poete racome
fans s'émouvoir des choCes terribles ou touchantes, on
I'écoute fans erre ému, on voit qu'il récite des fables ;
mais qu'il tremble, qu'i1 gémilfe, qu'i1 verfe des lar mes,
ce o'eU plus uo pacte , e'ell un fpeaateur attendri, dont
la fituat ion nous péoetre , Le chreur fait partie des mreurs
de la tragédie aocienne; les r¿ftexions
&
les femimens du
POete fón t pan ie des mreurs de
I'épopée :
JI/e bonis faveatru e ,
&
conjiliettlr amicis,
El regat iratos,
&
amet peceare timentes,
Hor.
Te! ell I'emploi qu'Horace attribue au ehreur ,
&
tel
ell le r61e que fa it Lucain daos tout le cours de fon
pocme, Qu'on oe dédaigne pas I'exemple de ce poete ,
Ceux qui n'ont 10 que Boileau méprifent Lucain; mais
eeUK qui lifem Lucaio, fon!" bien peu de cas du juge–
meol que Boileau eo a porté,
00
reproche avec rai–
fon a Lucaio d'avoir donné dans la déclamatioo; mais
cambien il ell éloquent lorfqu'¡¡ n'ell pas déclantateur !
combien les mouvemeos qu'excite eo
lui,m~me
ce qu'
iI
racome , communiquent a fes récits de chaleur
&
de
1(éhémeoce! ,
Céfar , apres s'etre emparé de Rome faos aueuo ob–
Ilacle, veut piller les thréCors du lemple de Saturne ,
&
un citoyen s'y oppofe,
L
'ovari"
,
dit le poete,
eJ!
donc le fel/ I !mtiment qtÚ bra'l'e le l,r
&
la mort?
L es
lois n'om plus d'app1li c.ntre I",r oppreffe1lr ,
Et le plfts vil deJ biem, /'or trol/ve 1In difenfeur!
Les deux armées font en préfence, les folaats de Cé–
fa r
&
de Pompée fe recoonoifIent : ils fraochilfem le
fofIé qui les fépare; ils (e molent, i1s s'attendrilfeo t,
ils s'embralfent , Le pacte faifil ce mOmelll pour re–
procher
a
ceux de Céfar leur coupable obéilTance:
" ácho , pourq1l0i gémir ? pourqtlo; v erfer des lar-
mes ?
•
fl!,i vous force
a
porter ces parricida armes?
I/oru cra;gnet. tln t)/ran
dont
7)014J
he!
J
1
aPP1fi!
§oyc;;, fourds a:¡
¡¡glJal
'lui
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Tappelfe
a
lui ,
,
Seul