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ENe

Il

importe quelquefois de faire mention des chafes

::bfurdes; mais il faut que ce foit légerement

&

en paf–

lant, Ceulemem pour I'hilloire de l'eCprit humain, qui

le

dévoile mieux dans certains travers finguliers, que

dans I'aétion la plus raifonnable, Ces travtrs Cont pour

le moraliCle, ce qu'eCl la dilleétion d'un monClre pour

l'hi!torien de la Nature: elle lui fert plus que I'''tode de

cent individus qui Ce rellemblent.

JI

y a des mots qui

peignent plus fortement

&

plus eompletement que tout

un diCeours , Un homme

a

qui on ne pouvoit reprocher

aueune mauvaife aétion, diCoit un mal infini de la na–

ture humaine , Quelqu'ull lui demanda; mais ou avez–

vous vu I'homme ¡¡ hideux?

en mo;,

repondit-il, Voi–

IJ

un méehant qui n'avoit jamais fait de mal; puiITe'

t-il mourir bien-ten! Un autre diCoit d'un ancien ami:

un tel e!t un trcs-honnéte-homme; il e!t pauvre, mais

cela ne m'empéehe pas d'cn (aire un eas flngulier,

11

Y

a quarante ans que je Cuis

Con

ami,

&

il ne m'a ja–

m ais demandé un fou , Ah, Moliere, ou étiez-vous? ce

uait ne vous eut pas éehappé,

&

votre Avare n'en of–

friroil aueun ni plus vrai ni plus énergique,

Comme il eCl au moins auffi important de rendre

les hommes meilleurs, que de les rcodre moins igno–

rans, je ne fecois pas faché qu'on recueillit tous les

traits frappans des vertus morales,

11

faudroil qu' ils

fullent bien conClatés: on les diClribueroit chaeun

a

leurs

:lrticles qu'ils vivitieroient. Pourquoi CerOit-OD fi ntten–

tif

a

eonCerver I'hinoire des penCées des hommes,

&

né–

gligeroit-oD I'hiCloire de leurs aétions? eelle-ei n'e!t-el–

le pas la plus utile? o'e!t-ee pas celle qui fait le plus

d'honneur au genre humain ? Je ne veux pas qu'on rappel–

le

les mauvaiCes aétions;

iI

Ceroit

a

louh.iter qu '

d –

les n'euflent jamais été , L'hommc n'a pas befoin de

mauvais exemples, ni la nature

humain~

d'etre plus dé–

eriée ,

JI

ne faudroit faire mention des aétions del–

honnetes, que quand elles auroient été Cuivies, non de

la perte de la vie

&

des biens, qui ne

Cont

que trop

fou vent les fuites funeCles de la pratique de la ver–

tu, mais que quand elles auroient rendu le méchant

malheureux

&

méprifé au milieu des réeompenCes les

plus éc1atantes de Ces forfaits, Les traits qu'il faudrai!

for-tout recueillir, ce feroit ceux ou le earaétere de

¡'honneteté en joint

a

celui d'une grande pénétration,

ou d'une fermeté héroique" Le trait de M, Pe,lilfon

ne feroit Cilrement pas oubhé,

11

fe porte aceulateur

de fon mattre

&

de fon bienfaiteur : on le eonduit

a

la ba!tille: on le confronte avee fon aeeuCé, qu'il eh3rge

de quelque malverfation

ehimériqu~,

L'aceufé

I~i

en

' demande la preuve, La preuve,'

1m

répoDd Peilf('oD?

hé Monlieur, elle ne fe peut tlrer que de vos

pa~lers,

&

vous favez ,bien qu'i1s fOIll tous bdllés: en eflet lis

I'étoient, PelilTon les avoit br61és lui' meme, mais

il

falloit eD inflruire le priConoier ;

&

iI

ne

balan~a

pas

de recoorir

a

un expédieD!, sur

a

la vérité, puiCque

[Out le mDnde

y

fut trompé; mais qui expofoit fa

li–

berté, peut-etre fa vie,

&

qui" s:il eUI été

ignor~,

comme il pouvoit Petre, aUaehol! a

Con

Dom une

10-

famie éternelle dOD! la honte pouvoit réjaillir fur la

république des 'Ieures, on Peliffon oeeupoit un rang di–

flingu é. M , Gobinot de Reims fupporte pen,dant qua–

ranre ans l'indignatioD publique qu'il eneOUCOII par uoe

exeeffi ve parGmonie dont

il

tiroit les fommes Immen–

fes qu'il deClinoit

a

,des monumens de la plus grande

milité, Aífocions-IUI UD prélat reCpeétable par Ces qua–

lités apo!toliques, fes dignités, fa

,n~jfIanee

, la noble

fimplicité de fes meeurs,'

&

la foildlté de , fes

v~rtus

,

Dans ulle grande ealamlté, ce prélat, apres avOlr fou–

lagé par d' aboDdames di!tributions

gratui~es ~n ,arge~t

&

en grains la partie de COD

troupe~u

qUI

lal~olt vo~r

tonte fon indigenee, fonge

¡¡

feeou~lr

eeile , qUI

eaehol~

fa miCere en qui la honre étouffolt la plalOte,

&

'l,m

l1'en étoi; que plus malheureufe, eontre

I'opprcffi~n

de

ces hommes de Cang, dODl Pame

~age

,dans la )01e au

milieu du gémiITement général ..

& ti

falt

p~n~r

fur la

plaee des grains qu' on y di!tClbUll

a

un

prl~

fort

au~

delfous de celui qu'i1s avoient eouté, L'efpnt de pam

qui abhorre tout aéte vertueuX qui n'e!t pas de quel–

qu'un des fiens, traite fa eharité de monopole ,

~

un

feélérat obCeur inferit eeue atroce ealomllle

p~rml

eel–

les dont il remplit

depu~

fi long-tems Ces feutlles heb–

domadaires. CepeDdant

iI

furv iem de nouvelles

~ala­

rnités; le zele inaltérable de ce rare pa!tcur eontlnue

de s'exereer

&

il fe trouve enfin un honnéte homme

qui éleve la' voix, qui dit I,a vérité, qui

r~nd

homma:

ge

11

la vertu,

&

qui s' éeCle tran[poné , d

~~mlra110n

:

quel eourage! quelle patienee hérolque, qu 1I en

e~n,

folaD! pour le genre humain que la méehanceté ne Olt

ENe

551

pas

~:l~able

de

~es

elfortS!

.v

oil3 les traits qu'

il

faut

reeuelll,,;

&

qUl ell- ce qUI les Iiroit fans remir fon

eeeur s'échaul'fer? Si I'on publioit un rceueil qui eon–

tint

b~aueoup

de

e~s

grandes,

&

belles aaions '_ qui ell–

ce qUl Ce refoudron

a

moum fans y avoir touroi la

matiere d'une Iigne? Croit-on qu'il y ent ql1eJque ou–

vrage d'un plus grand pathétique?

II

me [emble , quant

a

moi, qu'il y auroit peu de pages dans celui-ci, qu'un

homme Ilé avec uoe ame honnete

&

feofible n'arrofa t

de fes larmes ,

11

faudroit fingulierement fe garantir de I'adulation ,

Quam aux éloges mérités,

il

Y

auroi! bien de I'inju–

!tiee

a

ne les aceorder qu" la cendre iofenfible

&

froi–

de de eeux qui ne peuvent plus les entendre : I'équité

qui doit les difpenCer, le cedera - t - elle

a

la modeflie

qui les refufe? L'éloge e!t un encouragement

a

la ver–

IU ;

c'eCl un paéte public que vous faites conrraéter

a

l'homme vertueux, Si fes belles aélions étoiem gravées

fur une colonne, perdroit· il un moment de vne ce

monument impoCant? ne Ceroit-i1 pas un des appuis les

plus fom qu' on put preter

a

la fniblelfe humaille;

il

faudroit que I'homme Ce détertninh

a

brirer lui 'meme

fa Clatue, ,L'éloge d'un honnete homme eflla plus di–

gne

&

la plus douee récompenfe d' un aUlre honn eee

homme: apri:s I'éloge de Ca eonfcience, le plus Aateur

en celui d'un homme de bien,

O

RoulTeau, mon cher

&

digne ami, je n'ai jamais eu la torce de

me

refufer

a

ta loüange: fen ai femi croltre mon gout pour la

vérité,

&

m~lO

amour pour la vertu, Pourquoi tant

d'oraifons funebres ,

&

fi peu de paoégyriques des vi–

vans? Croit-on que Trajan n'eut pas eraillt de démen–

tir fon panégyriCle? Si on le croit, on ne connoit pas

toUle I'. utorité de la eonlidération générale, Apre, les

bonnes aaions qu'on a faites, I'aiguillon le plus vif pour •

en multiplier le nombre, e'eCl la notoriéré del premie–

res; e'e!t eeue notoriété qui doolle

a

I'homllle un ea–

raétere public auquel

iI

lui e!t diffieile de renoneer,

Ce Ceeret innoeent n'ell-il pas méme un des plus im–

portans de I'éducation"vertueufe? Meltez vOlre fils aans

I'oeeafion de pratiquer la vertu; faites-Iui de fes bonnes

aétions un earaé1:ere domeflique; attaehez

a

fon nom

quelque épithete qui les lui ¡appelle; aceordcz,lui de la

eonfidération: s'il franehil jamais eerte barriere,

j'

ofe

aflCtrer que le fond de fon ame eCl mauvais; que vo–

tre enfant efl mal né

1

&

que vous n' ell ferez jamais

qu'un méchant; avec eette dit!'érenee qu'i1 fe fOt pré–

cipité dans le viee tete baiITée,

&

ql1'arreté par le eon–

tralte qu'il remarquera entre les dénominuions hono–

rables qu'on lui a accordées,

&

célles qu'¡¡ va encou–

rir,

iI

fe laiITera gliITer vers le mal, mais par une pen–

te qui ne fera pas alTez infenliole pour que des pareos

attentifs

ne

s'apper~oi

vent point de la dégradation Cue–

eeffi ve de fon earaétere,

J

e hais eent fois plus les fatyres dans un ouvrage,

que les éloges ne m' y plaiCem : les perfonnalités font

odieufes en tout genre d'éerire; on e!t ror d'amufer le

eommun des hommes, quand on s'étudie

11

repallre fa

méchanceté, Le ton de la faryre ell le plus mau vais

de IOUS pour un diélionnaire;

&

,I'ouvrage le

plu~

im–

peninent

&

le plus ennuycux qu on pur

cllneev~" ,

ce

feroit un diétionnaire ratyrique: c'e!t le [eul qUI nous

manque,

11

faut abColument bannir d' un grand Iiv,re

ces a-propos légers, ces allufions tines, ces ,embelltf–

femens délicats qui feroient la for,tune d'une hliJorletre:

les traits qu'il faut expliquer devlennent

f~des,

ou ne

tardent pas.a devenir intclligibles , Ce ferolt ,une chofe

bien ridieu le, que le beCoill d'un

~omme~talre dal~s

un

ouvrage dont les dilférentes panles ferolent defllllées

a

s'interpréter réciproquement, Toute ee,tte lége.reté n'e,a

qu'une moulTe qui tombe peu-a: peu; bJen-tór la p,arlle

volatile s'en e!t évapocée,

&

1I ne rene plus qu une

vafe infipide,

~el

e!t 3uffi le foct de la

plupar~ d~

ces étincelles qUl paneHt, du choc de la,

eonverf~lIon,

la fcnfation agréable, mals palragere, qu elles

ex~uent,

nait des rapporrs qu'elles ont au

momcl~t,

aux clrcon–

nances, aux liellx, aux perfollnes ,

~

1

évenem~ot d~

jour' rapportS qui paITent promplement , Les tralts qUI

ne f; remarquent point, paree que l'éclat n'en e!t pas

le mérite principal,

plein~

de,

~ubCl~n,ce,

&

pOrtallt en

eux le earaélere de la

~Impllclté

,J0lOte,

a

un grlnd

fens, fom les feuls

~UI,

fe

Coullendr0le~t ~u gral!~

jour: pom fentir la frlvol ué ?es autres, 1I

~

y. a qu a

les écrire , Si I'on me montrou un auteu: qUI cut com:

ofé fes melanges d'aprcs des, c?nverfatlons " Je ferOl,s

Prefq ue ro r qu' il auroit

recueJ\~1

,lOut ce, qu 11 fa II<,>'t

pégliger

&

négligé tout ce qu 1I Importolt de reeuell–

nr Gardons-nous bieU de eommettre avec eeux que

,

nous