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ELO

fervitude de tout exagérer; ainli

I'¡¡o'fumee

a(jatique

fut monflrueufe. L'Occident étoit barbare du tems d' A–

riflote.

L'i1oqumce

véritable commenc;a 3 fe montrer dans

Rome 3u tems des Gracques,

&

ne fut perfeétionnée

que du rems

d~

Cicéron. Mare-Amoine I'orateur, Hor–

lenlius, Curion, Céfar,

&

plu fieurs autres, furent des

hommes éloquens .

.

.

Cene

"0'lltence

périr al'ec la répubilque

~1O(j q~e

celle d'Arhenes.

L'ilc,/uence

rublime

n'app~rtIenr,

dlr–

on, qu''¡ la liberté; c'eU qu'elle confifle a

d~re

des vé–

rités hardies

a

éraler des raifons

&

des pelOtures for–

les .

Souveo~

un maitre o'aime pas la vériré, craint les

raifons ,

&

aime mieux un complimenr délicat que de

grands rraits.

Cicéron apres avoir donné les exemples dans fes ha–

rangues, donna les préceptes dans fon Iiv,re ge l'Om–

Icur ;

iI

fuit prefque lOure la méthode d Aflflote,

&

l'explique avec le fiyle de PlalOn.

.

11 dill ingue le genre limpie, le rempéré

& .

le fubh–

me . Rollin a

f~ivi

cet!e divi(jon dans fon rralté des é–

tudes;

&,

ce que Cicéron ne dir pas, il prétend que

le rempéré efl

un. b,lI. riviere ombragle de vertel ¡o–

rét! del deux eótft; le jimple, fine table f ervie pro–

premm t dont tOUI lel métl font d'un goút excellent,

&

dont on bannit toitt rafinement

;

'1ue le ji,blime ¡ou–

droíe,

&

fue c'eft un f/euv. ímplt,tCux ,/lti rmverfe

10ut ee

'1"1

luí rlfifte .

an fe meme

á

cet!e table,

&

fans fuivre ce fou–

dre, ce Ileuve

&

celte riviere, tout homme de bon fens

voir que

I'¡¡o,/umce

fimple efl cdle qui a des chofes

limpies

á

expofer,

&

qu~

la clarté

&

I'élégance fonr

tour ce qui lui convicnr. II n'efl pas befoin d'avoír la

Ariflme, Cicéron ,

&

Quintilien . pour femir qu'un a·

vocat qui débute par un exorde pompeux au fujer d'un

mur mitoyen , efl ridicule: c'étoit pourtanr le vice du

barreau jufqu'au milieu du

XVI!.

fieele; on difoir avec

emphafe des chofeS rriv iales; on pounoir compiler des

volumes de ces exemples: mais taUS fe réduil'enr 3 ce

mor d'un avocar, homme d'cfpril, qui voyant que Con

adverfa ire parloit de la guerrc de Troie

&

du Scaman–

dre, ¡'inrerrompir en diCant,

la eOllr ob{ervera 'fue ma

partie ne I'appelle pal Seamandrc , mait Michaut.

L e genre fu blime ne peut regarder que de pui/fans

imérers trair és dans une grande arrcmblée. On en voir

encore de vives traces dans le parlement d' Anglerer–

re; on a quelques harangues qui y furent prononcées

en 1739, quaod il s' agirroit de déclarer la guerre 3

¡'Efpagoe . L'efprit de Démoflhenc

&

de C icéron ont

diété plufieurs trairs de ces difcours ; mais ' ils De paf–

feronr pas

ii

la poflériré comme ceu x des Grecs

&

des

R omains , parce qu'ils manquent de cet art

&

de ce

charme de la diétion qui meueor le fceau de I'immor–

taliré au! bons ouvrages .

Le genre rempéré efi celui de ces difcours d'appa–

reíJ, de ces harangue's publiques, de ces complimens

étudiés, dans Itfquels il faut couvrir de fleurs la futi-

lité de 'la rnariere .. .

Ces trois genres rentrent encore fouvent l'un dans

l'autre, ainli que les trois objets de

I'/Io,/uence

qu'A–

riflote confidere,

&

le grand mérite de l'orareur efl de

les rnéler 2 propos.

La grande

él0'luenee

o'a guere pu en France

~tre

connue au barreau, parce qu'elle ne conduit pas au!

honneQrs comme dans Athenes, dans Rome,

&

com–

me aujourd'hui daos Londres,

&

n'a point pour ob–

jet de grands in térets publics: elle s'en réfugiée daos

les nrailens funebres ou elle tien r un peu de la poélie.

Borruet,

&

apres lui Flechier, femblent avoir obé!

ii

ce précepte de Platon, qui veut que l'élocution d'un

orareur foit quelquefois cellé meme d'un pocte.

. L'é/o,/uence

de la chaire avoit été prefque barbare

Jufqu'au P. Bordaloüe; il fut un des premiers qui

fi–

reO[ parler la raifon .

Les Anglois ne vinrent qu'enfuite comme

l'

avoüe

B~rnet

éveque de Salisburi. lis ne coonurent point

1'0-

ralfon funebre; ils év itereot dans les fermons les traits

~éhém~ns

'lui ne leur parurent point convenables

a

la

mpllcné de l'Evangile'

&

ils fe défirent de ceue mé–

thode des divifions

rech~rchées

que

l'

Archeve'lue Fe–

oelon

~ondamne

dans fes dialogues fur

l'l lo'fuence.

Quolque nos rer mons rouleor fur l'objei le plus im–

portam de I'homme , cependant il s'y trouve peu de

ces morceaux frap

.

.

de Cicéron

&

d

ns qUI, cornme les beaux endrolts

les de

t

t I e émoflhene font devenus les mode-

1l0urtantO~i:~_a¡r,

nrions

occid.e~tales . ~e l~éteur

fera

,

e e trouver ICI ce 'lUI arnva la pre-

ELO

miere fois que M. Maffillon', depuis

év~que

de Clér–

mont .. précha fon' fameux fermon du petit nombre des

éhh:

il y eut un endroit ou un tranfport de faifirre–

ment s'empara de tout l'auditaire; prefque tout le mon–

de

Ce

leva ¡¡ moitié par un mouvement involontairc;

le murmure d'acclamation

&

de furprife fut fi fort, qu'

il

troubla I'orateur ,

&

ce trouble ne fervit qu'¡¡ aug–

menter le parérique de ce morceau: le voici. " Je fup–

" pofe que ce foi t ici notre derniere heure

a

tous, que

" les cieux vont s'ouvrir fur nos tetes. que le tems en

" rarré

&

que I'érernité comnience, que JeCus- Chrin

" va parolrre pour nous juger felon nos ecuvres,

&

" que nous Commes tOUS ici pour auendre de lui I'ar–

" ret de la vie ou de la mort éremelle: je vous le

" d(mande, frappé de terreur COlllme vous, nc fépa–

" raut point mon fort du v6tre,

&

me meHan1 dans

la meme fituation ou nou s dcvons tOUS paroitre un

" jour devanr D ieu norre juge:

li

Jefus-Chrifl dis-je,

" paroilfoit dcs-a-préfent pour faire la terrible fépara–

" rion des jufles

&

des pécheurs; croyel-vous que le

plus grand nombre fut fauvé? croyCl-vous que le

" nombre des jufles fut au moins

é~al

¡¡ celui des pé–

" cheurs? croycl' vOUS que s'il faifeit maimennnt la

" difcullion des Cl!uvres du grand nombre qui efl dans

" ceue églire,

iI

trouv~r

feulemenr. dix jofles parmi

" nous ? en troul'eroir-il un fcul?

&c."

(11 Y a eu

plulieurs éditions différentes de ce diCcours, mais le

fonds efl le meme dans toutes.)

Cene figure la plus hardie qu'on ait jamais emplo–

yée,

&

en meme tems la plus 1 fa place, efl uu des

plus beau! ((aits

d'/Io,/umce

qu'on puirre lire chel les

nations anciennes

&

modernes;

&

le refle du difcours

u'efl pas ind igne de cet endroit fi faillant. De pareils

chefs-d'Cl!uv res font tres-rares, tout efl d'ailleurs de ve–

nu lieu commun . Les préd icateurs qui ne peuvent imi–

ter ces grand s modeles (eroient mieu x de les appren–

dIe par cecur

&

d~

les débiter

il

leur audiroire (fi'lp–

pofé encore qu'ils eullent ce talent fi rare de la dé–

c1amat ion), que de précher dans un flyle languirrant

des chofes aulli rebatrues qu'utiles.

On demand e

fi

l'(/0'l,,,nee

efi permife aux hifloriens;

celle qui leur efl proprc confifle dans I'art de prépa–

rer les evenemens, dans leur expofirion taajours net–

te

&

éleganre, tam6t vive

&

prclfée, tant6t éteodue

&

Ileurie, dans la peinture vraie

&

forte des mecurs

générales

&

des principaux perfonnages. dans les ré–

flexions

incorpor~es

natmellement au récit ,

&"

qui n'y

paroirrcnt point ajoutées.

L'

I/0'lumce

de lJémoflhene

ne convient pas

a

Thucidide; une

haran~ue

direéte qu'

on me\ dans la bouche d'un héros qni ne la pronon–

<;a jamais, n'efl guere qu'un ' beau Mfaut.

Si pourtant ces licences pouvoient quelquefois fe per–

meure; voici une occafion ou Mel.eray dans fa gran–

de hifloire femble obrenir grace ponr' ceHe hardielle ap–

prouvée chel les anciens;

iI

efi égal

a

eux pom le

moins dan s cet endroit : c'efl au commencement du .

regne d'Henri IV. lorfque ce prince, avec tres-peu de

troupes, éroi r prellé aupres de D ieppe par une armée

de trenre mille hommes.

&

qu'on luí confei lloir de Ce

rerirer en Anglererre . Meleray s'éleve au-derrus de lui–

meme en faífanr parler ainfi le maréchal de Biron qui

d'úlleurs éroit un homme de génie,

&

qui peur fort

bien avoir dit une partic de ce que I'hiflorien lui at–

tribue .

" Quoi! Sire, on vous confeille de monter fur mer,

comme s'il n'y avoir poine d' autre moyen de con–

" ferver vorre royaume que de le quiuer?

ti

vous n'é-

riel pas en Frauce,

iI

faudroi t percer au - travers de

" tous les hafards

&

de tous les obflacles pour

y

ve–

" nir :

&

maiotenant que vous y

~ tes,

on voudroit que

" vous en Corti ffiel?

&

vos amis feroient d'avis que

" vous filliel de votre bon gré ce que le plus grand

" effort de vos ennemis ne f¡lUroit vous contraindre de

" faire? En I'état ou vous etes, forrir de F'rance feu–

" lernent pour vingr-quatre heures , c' efl s' en bannir

" pour jamais. Le péril, au refle, n'efl pas fi grand

" qu'on vous le dépeinr;

~eux

qui nous peufenr enve–

" lopper, Cont ou ceux-memes que nous avons tenus

enfermés fi l!lchement dans Paris, ou gens qui ne

" val enr pas mieux,

&

qui auront plus d'altaires enrre

" eux·memes que contre nous . Enfin, Sire, nous fom–

, mes en France,

ti

n'ous y faur eDterrer :

il

s' agit

,; d'un royaume, il faut ·I'emporter ou , perdre la vie ;

&

quand meme il n' y auroit poinr d' autre mreré

" pour vorre facrée perfonne que la fu ite, je fais bien

" que vous aimeriel rnieux mille fois mourir de pié

,,. ferme, que de vous fauver par ce JlIoyen . Votre

" maJe-