CRA
Les fujets des feolies
f~
tiroicnt non - reulement de
I'amour
&
du vin, comme aUlourd'hui, mais encore de
l'hiltoire, de la guerre,
&
meme de la morale . Tel–
le
elt
c.ue,banfon
d' Ariltotc fur la more d' Hermias
fon ami
&
fOil allié, laquelle ti! accufer fon auteur
d'impiélé .
" O vertu, qui malgré les difficuhés que vous pré–
~,
feme1.
aUI
foibles mortels, eles I'objel charmam de
" leurs recherches! vertu pure
&
aimable! ce fUI 10(\–
" Jours aux Grccs un dellin digne d'en vie, que de mou–
" rir pour vous,
&
de fouffrir fans fe rebuler les mallX
" les plus alfreux. Telles font les femences d'immor–
" ta lité que vous répandel. dans taus les creurs; les
" fruits ell fon! plus précieux que ['or, que l' amitié
" des parcos, que le fommeil le plus tranquille: pour
" vous le divin Herculc
&
les tils de Léda eíruyerem
" mille travaux,
&
le fueces de leurs exploils annon–
"
~a
votre puiírance. C'ell par amour pour vous qu'
" Aehille
&
AJu allerem daos l'empire de PIUIOll;
&
e'ell en vOc de votre aimable beauté que le prinee
" d' Alame s'ell aum privé de la lumiere du foleil ; prin–
" ce
a
Jamais célebre par fes aétions! les tilles de mé–
moire ehameronl fa gloire taUles les fois qu'elles chan–
terom le eulte de Jupiler hofpilalier, ou le prix d'u–
" ne amÍlié durable
&
fineere ".
TOUles leurs
,banf.m
morales n'étaiem pas li graves
que celle-l;\: en voiei une d' un goG! différelll, tirée
d'Alhénée .
" L e premier de tous les biens efl la famé; le Ce–
" eond, la beaulé; le troili"me, les riehetres amaírées
" fans fraude;
&
le qualrieme, la jeunetle qu·on paOc
" avec fes amis ".
Quanl aUI feolies qui roulent Cur I'amour
&
le vin,
on ell peul juger par les foixante
&
dix odes d' An,–
créoll qui naus reflenr: mais daos ces ron es de
chal' ·
j om
meme on voyoi[ encare briller ce[ amour de la
patrie
&
de la liberté dou[ les Grecs étoiem tran(por–
!és.
" Du vin
&
de la fanté, ·dit une de ces
cb¡mfonl,
" pour ma Clitagora
&
pour moi, avee le Cecours des
The{faliens ". C'efl qu' outre que C Htagora c!toi!
If'hetTalicune, les Athéniens avoient aUlrefois
re~u
du
feeours des Theíraliens contre la tyrannie des Pififlra–
lides.
lis avoien! aum des
.banfon!
pour les diverfes pro–
remons : lelles éloient les
cbonfo"l
des bergers, dOn[
une efpece appellée
bu,oliaJme,
étai[ le véritable chaO!
de ceu. qui conduifoien! le bétail;
&
I'autre, qui etl
propremem la
pajlorale,
en étoit I'agréable imitation:
la
, banfon
des moiíronneurs, appellée le
/)'ticrl< ,
du
Dom d'un tils de M idas qui s'oecupoi! par goOt
:i
fai–
re la moillon : la
,banfon
des meuniers, appell ée
hy–
m le
ou
Ipiauli.,
comme celle-d tirée de Plularque:
Motl/~::.
mUlle,
mOlllez:.;
Gar P lttOCltJ '1111
r~gne
d"nI
l'augtt!1e' Myti/ellt, a;me
ti
mOlldre;
paree ql1e
Piua–
cus ¿talt grand mangeur: la
,banfon
des tiírerands, qui
s'appelloit
I/ine:
la
,banjon jul.
des ouvriers en Inine:
celle des nourricos, qui s'appelloi[
,ataball,alef.
ou
nttn–
Ni. :
la
,banfon
des amans, appellée
nomiou:
celle des
femmes, appellée
,alye!,
&
barpalyce
celle des tilles ;
ces deu¡ deroieres étoienr aum des
chanfonl
d'amour.
Pour des occafions particulieres, ils avoiem la
, ban–
¡O"
des noces, qui s'appelloi[
bymlnl., Ipitbalame :
la
chan!on
de Datis , pour des oeealions joyeufes: les la–
memations,
I'ialéme
&
le
linof ,
pour des oceafions fll–
nebres
&
Irifles: ee
linol
fe chamo;[ aum chez les E–
gyptieos,
&
s'appelloit p1r eux
monerOI,
du nom d'un
de lcurs princes. Par un paffage d'Euripide cité par
i\–
thénée , on voit qlfe le
lilloJ
pouvoi[ aum marquer la
joie .
Entin il
y
avoit encore des hymnes ou
,banfo1ll
en
1'honlleur des dieux
&
des héros: telles é[oiem les ju–
les de Céres
&
de Proferpine, la philélie d' Apollon ,
les upinges de D iane
&,.
(S)
Ce
~enre
paíra des Grecs aux L atins; plulieurs des
odes d Horace [001 des
,hanrom·
galames ou bacchi–
ques.
(B)
Les modernes om aum leurs
cbanfonJ
de différentes
efpeces Celan fe ¡¡énie
&
le earaétere de ehaque nation:
mais les
Fran~OIs
l'emportem Cur tous les peuples de
l'Europe, pour le Cel
&
la grace de leurs
,banfonJ:
ils
fe fOn! 100jours plGs
iI
cet
amufemem,
&
Y onr to(\–
jours exeellé; lémoin les anciens Troubadours . Nous
avons eneore des
,banJonJ
de Thibaut eomle de Cham–
pagne. La Provenee
&
le Languedoe n'ont poim dé–
généré de leur premier talem: on voit toajours régller
dans ces provinees UD aír de gaieté 'luí les porre au
Tome lll,
CRA
II)
ehant
&
~
la dan fe : un
proven~al
menaee fon enne–
mi d'une
,banfon ,
comme un l talien menaeeroit le fiel1
d'un C'lUp de fly let; chacun a fes armes. L es autres
pays om aum leurs provinee
, banfonnicrn :
en Angle–
lerre, e'el! l'Ecoíre; en !talie, c·e(l VeniCe .
L'ufage <![abli en Franee d'un eommeree libre emre
les femmes
&
les hommcs, cene galanteric aifée qui
regne dans · les fociétés, le mclange ordinaire des deux
fexes dans tous les repas , le caraaere meme d' efpri!
des
Fran~"is ,
ont dil potler rapidement che1. eux ce
genre
a
(.1 perfeétion.
( B )
N os
,banfonl
[om de pll1(ieurs efpeces; mais : n gé–
néral elles roulen[ ou fur I'amour, ou fur le
V1tl ,
OU
Cur la fat)'re: les
cbanjom
d'~mour
Com les air> tcn–
dres, qu'on appelle eneOre
airJ f l rieux:
les romances ,
dom le caraétere el! d'émouvoir I'ame par le réci[ ten–
dre
&
naif de quelqu'hilloire amoureuCe
&
trngique ; les
,bonfo",
paflorales, dom plu(ieurs Con[ faires pOllr dan –
Cer, comllle les mufelles , les gavones , les branle¡,
&,.
(S)
On ne conno!! guere les auteurs des paroles de nos
,banfom
frnn~oifes:
ce font des moreeaux peu réfié–
chis, fortis de plulieurs mains,
&
que pour la.
plílpar~
le plaifir du moment a fait naltre : les muflclens qm
en om fair les airs Cont plus eonnus, parce
q~'
ils en
om laiOe des reeueils eomplets; tels Com les ¡'vres de
L ambert, de D ubonffet ,
&,.
Cette [a rte d'ouvrage perpétue dans les
r~p~s
le plai–
lir 3 qui il doit fa naiíranee. On chame indtftéremmenr
¡¡
table des
,banjonJ
tendres , bacchiques,
&,.
Les
é–
transers conviennent de naIre fupériorilé en ce genre:
le 1-
ran~ois
débarraíré de foios, hors du 10urbiJlon des
atfaires qui I'a enerainé [Oule la jonrnée, fe délaOe le
foir daos des foupers aimables de la f.1[igue
&
des em–
barras du jour : la
,banfon
efl Con égide contre l' en–
nui; le vaudeville e(l fon arme ofi"nlive con!re le ridi–
eule: il s'en Cert aum quelquefois eomme d'une efpeee
de fonlagemem des pertes ou des revers qn'il eOuie; i1
el! faeistail de ce dédommagemem; di: qn'¡¡ a chamé,
L1 haine On (.1 vengeance expirem .
( B )
Les
, hanfo'"
a
boire fom aOn communément des
airs de baOe, ou des rondes de table . N ons avom en–
core une efpece de
,banfon
'In'on app"lIe
parodie;
ce
Com des paroles qll'on ajune Cur des nirs de violan
ou d'autres intlrumens,
&
que I'on fair rimer tam bien
que mal, fans avoir d'égard ;\ la mefure des vers .
La vague des parodies ne peue montrer qu'un tres–
mauva;s solle; car OUI(e qu'il faur que
la
voi. excede
&
pa.r~e
de be1ueoup fa julle portée pOllr ehamer des
atrs faltS pour les inflrumens: la rapidité avec
la~uel
I~
on f"il paírer des fyllabes dures
&
chargées de con–
(onnes ,
r."
des doubles croches
&
des imervalles diffi –
cile , choque I'oreille trcs·defagréablemem . Les Italiens
d?m la
~'lJ1gue e~
bien pi us aouee que la n6 tre ,
pro~
dlguem a
b
vénté les v, teíres dans les roulades ; mais
qU2nd
la
voix a quelques f)'llabes
¡¡
articu ler ils one
gran? foi? de
la
faire marcher p!us
por¿men~,
&
de
mamere a rendre les mOls aifés
a
prononcer
&
a
en–
tendre .
( S)
e
H A N T,
r.
m.
( M ujir¡ru)
ell en général une
forte de modioea[ion de la voix, par laquelle 011 for–
m~
de, fOil, variés
&
apprétiables .
11 cf!
tres - diffi eile
de dé[erminer
~n
quoi le fOil qui forme la paeo lc, dif–
fere du COIl qUt forme le
, ba/U .
Cetre dilférence el!:
ce, taiae; mais on ne voir pas bien pr¿eifément en quoí
elle confifle .
11
ue manque peUt·"tre que la permanen–
ce
~ux
fa ns qui formellt la parole, pour former un
vérttable
,hant:
il parolt autr; que les diverCes inflexions
qu'on donne
:i
fa voix en parlanr, formenr des inter–
vall~s
qui ne font poi", harmoniques, qui ne fom poin!
pawe de nos fyOcmes de Mulique,
&
qui par conCé–
quent ne peuvenr etre exprimés en nOles.
Cbant,
appliqué plus pan iculieremen[
:l.
13
Mulique ,
Ce dit de toUte mutíque vocale;
&
dal1s eelle qui el!:
melée d'inflrumells , on a!,pelle
pareie
de
, bant
toUtes
celles qu font deflinées pour les voix.
e
har.t
Ce
die
aum de la maniere de conduire la mélodie dans tautes
fortes d'nirs
&
de pieces de mufiqu c . L es
, ba"'J
agréa–
bIes frappent d'abord ; ils [e gra ven! fad lemem dans la
mémoire: mais peu de eompofiteurs y réumírent.
\1
Y
a pnrmi chaoue narion des tours de
,batrt
uf':s , dan.
lerquels la piapan des cOIllPO!itcucs retombem toulours .
Iuven[cr des
chantJ
nouvenux ,
n'3ppartieot
qu'a l'hom–
me de génie ; trouver de beaux
,bantl,
appartient
i
l'homme de goat.
(S)
Le
cbane
ell l'uoe des deux premieres expretliolls du
feDliolellt, donnée. par la nature .
.
Voy'"
G
E
S
TE.
P
1.
C 'el!: