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ARI
~'ceuvrcs
de goUt
&
de Philofophie. U
C/c
leélure
affi,
due des otlvrages d'Homere lui avoit formé le juge–
¡ne/1t ,
&
donné un gp11! exquis de la belle Littératu–
re: jamais perfonoe n'a péoétré plus avam daos le cc¡,ur
hu main, ni mieux cOnou les re{forts iovilibles qui le
fom mouvoir !
iI
s'~tol!
ouver!, par la for"e de [00 gé–
nie, une route mre jufqu'aux ·fóurces du vrai beau;
&
!i
aujourd'hui 1'00 veu! dire quelque chofe de bon fur la
R hltorí'{lIr
&
fur
I~
J> oiti'l""
00 fe voit obligé de
le répéter. Nous oe craigooos poim de dire que ces
deux ouvrages fom
CCIlX
qui font le plus d'honneur
a
Ca m émoire;
voyez-cn
un jugement plus détaillé aUJ¡
deu. articles qui portcnt leuT nom. Ses trai!és de mo–
rale vienoent eufuite; I'auteur
'Y
garde uo carsaere d'hoo–
netc-homme gul pla!! iofioiment: mais par miilheur
iI
tattiédit au lieu d'ech;lUffer; on ne lui donoe qu'une ad–
¡niration fUrile; on ne rcvient point
a
ce qu'on a la .
La morale eí! feche
&
infruaueu[e quand cile n'offre
que des vaes générales
&
des propofitions métáphyfi–
ques, plus propres
a
Qrner l'efprit
&
a charger la mé–
moire , qu'a toucher le cceur
&
a
changer la volon–
té . Tel
di
en géoéral l'e[prít qui regne dans les li–
vres de moral e de ce
philoCoph~.
Voici quelques-uos
de fes préceptes, avec le tour qu'il leur doooe.
l·.
Le bonhcur de l'homme ne confií!e ni daos les
plaifirs, ni daos les riche{fes, ni daos les hooueurs, ni
dans la pui{faoce, ni dal1S la ooblelre, ni daos les fpé–
eulations de la philoCophic; mais bien pluI6t dans les
habiludes de l'ame, qui la rcndem plus OU moins par–
faite .
2·.
La vertu efl pleine de charmes
&
d'amaits;
aiori uoe vie ou les vertus s'cncha1nent les uoes avec
les autres, ne fauroit etre que tres-heureuCe.
3'.
Quoi–
que la ¡vertu fe CuBiCe
3
elle-meme , on ne peut nier
eependant qu'elle ne trouve UI1 pui{fant appui d3IJs la
fa veur, les riche{fes, les hooneurs, la noble{fe du fang,
la beauté du corps,
&
que toutes ces chofcs ne COI1-
tribuent
i
lui faire prendre un plus grand e{for ,
&
n'aug–
mentent par-la le bonheur de l'homme.
4'.
T oule ver–
tu Ce trouve placée daos le milieu entre un aae mau–
vais par exces
&
entre un aae mauvais par défaut:
\1inú le courage lÍent le milien entre la crainte
&
I'au–
dace; la libéralilé, entre I'avarice
&
la prodigalité; la
modeflie, entre l'ambition
&
le mépris fuperbe des hon–
neurs; la magnificeoee. entre le fafte trop recherehé
&
l'épa'l~ne
fordide; la douceur, entre la colere
&
l'io–
fenfi bllité; la popularité, entre la mifanrropie
&
la ba{fe
1Ialerie,
(:le .
d'ou l'on peut conclure que le nombre
des vices eí! double de celui des vertus, l'uiCque toute
verlO eí! toujours voifioe de deux vices qui lui fom
f:ontraires.
fO.
11
difliogue deux fortes de juflice; l'une
univerfelle,
&
I'autre particuliere: la jufliee univerCelle
tend
a
conCerver la fociélé civile par le refpea qu'elle
infpire pour toutes les lois: la jullice particuliere, qui
eon fifle a relldre
i
chacun ce qui lui eí! du, efl de
deux fortes; la dií!ribulive
&
la eommutative: la ju–
!lice diílributive difpenfe les eharges
&
les récompen–
fes, feloo le mérite de chaque cicoyen;
&
el le a pour
regle la proportion géométrique : la juflice commu!ative,
qui eon(jfle daos un échange de chofes, donoe a 'cha–
euo ce qui lui efl dli,
&
garde en tout une propor–
tion arithmélique.
6'.
On fe lie d'amitié avec quelqu'un
ou pour le p\3ifir qu'on relire de fon commerce, on
pour I'utilitlí qui en revient, ou pour Con mérite fon–
dé Cur
la
vertu ou d'exeellentes qualités. La dernierc
efl une amilié parfaite : la l>ienveillance o'eí! pas,
ii
pro–
prement parler, I'amilié ; mais elle y conduit,
&
eu
quelque
fa~oo
elle I'ébauche.
Ariflote
a
beaucoup mieu:.: réuffi dans fa logigue que
dans fa morule.
II Y
découvre les principales Courees
de I'art de raifonncr;
iI
perce daos le food inépuiCable
des penfées de l'homme; il démele
Ces
penféas , fait voir
la liaifon qu'ellcs om emr'elles, les fui! dans leurs écarts
& dans leurs contraríélés, les ramene enfin
a
un point
fixe . On peut a{fórcr que fi I'on pouvoit atteindre le
~erme
qe
1
e[prit, Ariflote l'auroit atte;nt. N'eí!-ee pas
uoe chofe admirable , que par différentes combinaifons
qll'il
:¡
failes de toutes les formes
qu~
I'efprit peut pren–
dre en raifonnant,
iI
I'ait telJemelll enehalué par les re–
gles qu'il lui a tracées, qll'¡¡ ne pui{fe s'en éearter, qu'
il nI! caifonne inconséquen:ment? Mais fa méthode,
quoiqlle loüée par toUS les phllofophes , o'efl poim exem–
pIe de défauts.
rO.
11
,'élcnd trop,
&
par-la
iI
rebu–
te: 00 pourroit rappeller
a
peu de pages tour foo Li–
vre des catégories,
&
celui de l'interprétalion ; le fens
y
eí! noyé dans une trop grande aboQdaoee de paro–
les.
2
0 •
11 efl obfGur
&
embarra{fti;
iI
veur qu'on le
4;ievinc;,
&
que fon
le~eur
produife
¡¡V~c
lui Ces peo-
ARl
fées. Quclque habile que l'on foir, on ne peur guere
fe tlatcr de \'a '-oir totalemem emendo; témoio fes ana–
Iytiques, ou tou.! I'art du fyllogiCme efl enCeigné .
To~s
les mcmbres qUl eompo[en! Ca L ogique
Ce
trouvent dlC–
perCés dans les difréreos anicles de ce D iaionnaire; c'efl
pourquoi, pom oe pas ennuyer le leaeur par une ré–
pétition lnu!ile des memes
choCes,
00 a .Jugé
a
propOS
de I'y renvoyer afin qu'i1 les eonCulte .
Pa{fons maimenam 3 la phyfique d'Ari(\ote;
&
daos
l'cxamen que nous en alloos faire, prenons pour guide
le célebre Louis Vises, qui a di[pofé daos I'ordre le
plus mélhodique les différeus ou vrages ou clle efl ré–
pandue. 11 commence d'abord par lcs huit Iivres de,
principes naturels, qui paroi{fent ph1r6r une eompilatioo
de différens mémoires , qu'uo ouvrage arrangé [ur un
meme plao; ces huit livres traitent en géoéral du corps
é¡eodu , ce qui fait l'objel de la. Phy(jque,
&
en par–
ticulier des príncipes,
&.
de tout
ce
qui efl lié
it
ces
f'rincipes,
eomf.nele mouvement, le lieu, le tems,
(:le ,
Rieo n'eí! plus embrouillé que IOUt ce long délail; les
définitions renden! moins intelligibles des chofes quí par
elJes-memes auroiem paru plus cJaires, plus évidenres.
Ariflote blame d'abord les philoCophes qui l'ont précé–
dé,
&
cela d'une maniere a{fe1. dure; les uns d'avoir
admis !rop de principes, les autres de n'en avoir ad–
mis' qu'un feul : pour lui, il eo élablit trois, qui Cont
la
matiere,
la
forme,
la
privation.
La matiere efl,
~e
Ion lui, le fujet général Cm lequel la naturc Iravall–
le; Cujct éternel on meme tems ,
&
qui oe celle ra Ja–
mais d'exifler; c'eí! la merc de toutes choCes, 5jui Cou–
pire apres le mOllvemenr,
&
qui fouhaile avec ardeur
que la forme vienne S'unir a elle . On De fait pas trop
ce qu'Ariflote a entcodu par cetrc matiere l'remiere qu:
il défin!t, .
'e
t{lú
n'~ft,
ni 9u:", ni
com~ien
$rand
~
,ni
'{uel,
nt
"en
de
re
par
'{"Ol
I et re eft determmé ..
N
a–
t-jl parlé ainfi de la matiere que parce qu'il étotl ,\c–
coútomé
¡¡
mertre un certain ordre dans Ces penfées.
&
qu'il
eommen~oit
par enviCager les chofes d'une vac
générale, avant de de[eendre au particulier? S'il n'a vou–
lu dire que cela, c'efl-a·dire fi daos Con eCpri! la ma–
~lere
premiere n'avoit d'aUlre fondemem que celte mé–
thode d' arranger des idées ou de concevoir les ch,!"
Ces,
il n'a ricn dit qu'on ne pui{fe lui accorder: mals
auffi cetre mariere n'efl plus qu'un etre d'imaginalion;
une idée purcment abflraite; elle n'exifle pas plus que
la lIeur en général, que l'homme en géoéral,
(:le.
Ce
n'efl pourtanr pas qu'on ne voye des philofophcs . au–
jourd'hui, qui, tenant d' Ariflote la maniere de confl dé–
rer les chofes en général avant que de venir
iI
leur$
cCpeces,
&
de pa{fer de leurs ofpeces
i\
leurs individllS,
ne Coutiennent de Ceos froid,
&
meme avec une
cfp~ce d'opiniitreré, que I'univerfel e(t dans chaque obJet
particulier : que la tleur eo géoéral, par exemplc, en
une réalité vralmeot exiflante dans chaque jonquil/e
&
dans chaque violette.
11
par01t
a
d'autres que, par
mtf–
t iere premiae,
Ariflote n'a pas emeodu feulement le
corps en général, mais une pale uniforme dom tout
dcvoit elre coní!ruit; uoe cire obéi{fame <ju'il regardoi!
comme le fond commlln des corps , comme
\e
da–
nier terme ou revenoit chaque corps en Ce délruiCam ;
c'ótoil le magnifique bloc du Slatoaire de la Fonraille;
Un bloc de marbre
él.ítji
be,," ,
Q¿t'un
Statrlaire
en
fit
/'
cmplette:
flu' en [era,
dá-il,
mon cífealt?
Sera-t-íl dieu , table ou C1Ivette?
BriCez ce dicu de marbre, que vous refle-t-iI en main?
des morceaux de marbre . Ca{fez la table ou la cuvet–
te , c'efl encore du marbre; c'eí! le meme fond pnr–
tOut; ces chofes ne differ-ent que par une forme eXlé–
rieure .
1I
en efl de méme de touS les corps; leur mafle
eí! e{fentielJement la meme: ils oe dificrent que par la
figure, par la quantit¿, par le repos , ou par le mou–
vement, qul foot tomes
choCes
accidentelles . Ceue idée
qu'on do!t
a
Ariflote , a paru (j Cpécieufe
a
tous les Phi-
10Cophes, tant anciens que modernes , qu'i1s I'onr gé–
uéralement adopté
e :
ma!s eeue ¡dée d'une matiere gé–
nérale dans laquel le s'en recournent tOllS les corps en
deroiere décompofition, efl démenrie par I'expéríence;
fi cl le étoit vf3ie, voici ce qui eo devroit arrivcr. Com–
me
le
mouvemenr fait Corrir de certe oire un animal,
uo morceau de bois, une marre d'or; le mouvement,
en leur
Ótan~
une forme
~a{fagere,
devroit les ramener
ii
leur cire primordial e . Empedocle, Platon , Ariftoce
&
les Scholafliques le difenr : mais la chofe n'arrive
poinr . Le corps organiCé fe dilfout en différentes
ma(fe~
de