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D E S E D 1 T E U R S.\

xv

qu'un pas

a

faire.?

Et

pour ne point fortil' de l'Horlogel'ie, pourquoi ceux

a

qui

nOUS

devons la fufée des montres, l'échappement

&

la répétition, ne font-ils pas

auffi eHimés q,ue ceux qui ont travaillé fuccejfivement

a

perfeétionner l'Algebre.

D'ailleurs, fi J

en

erois quelques Philo[ophes <lue le mépris qu'on

a

pour les Arts

n'a point empeché de les étudier,

il

eH certames machines

íi

compIiquées ,

&

dont toutes les panies dépendent tellement l'une de l'autre, qu'il efl: diffieile que

l'invention en foit due

a

plus d'un feul homme. Ce génie rare dont le nOllt e.1li

enfeveli daos l'oubli, n'eut-il pas été bien digne d'et¡;c placé 11 coté du petili

nombre d'efptits créateurs,

qui

nous ont ouvert daus les Sc,ie1'lces des routes

nouvelles?

Parmi les Arts

Ii~éraux

qu'on a réduits

a

des principes, ceux qui fe propefent

l'imitation de la Nature, ont éré appellés beaux Arts, paree qu'ils ont principa–

lement l'agrément pour obje.t. Mais ce n'eíl: pas la ícule chofe qui les difl:ingue

des Arts libétaux plus néce{faires ou plus utHes , comme la Grammaire, la

Lo~que

&

la Morale. Ces den\iers ont des regles fixes

&

arretées, que tout homme

peut tranfmettre

11

un autre: au lieu que ' la pratique des beaux Arts confifl:e

principalement dans une invention qui ne prend g11ere fes lois que du génie ; les

regles qu'on a écrites fur ces Arts n'en font proprement que la partie mécha–

nique; elles produifent a-peu-pres l'effet du TeJefcope, elles ll'aident que ceux

qui voyent.·

.

Il

réfulte de tout ce

que

nous

~vons

dit

jufqu:ici, que les

diffé~~nt~s

manieres

dont notre efprit opere fur. les obJets,

&.

les dlfférens, ufages qu

Ii

t~re

de ces

objets meme, font le premler moyen qw fe préfente a nous. pour dlfcerner en

général nos connoiífances les unes des autre-s. Tout s'y rapporte

a

nos befoins

~

.,foit de néceffité abfolue, foit de convenance & d'agrément, foit meme d'ufage,

&

de caprice. Plus les befoins font éloignés ou difficiles 11 fatisfaire, plus les

connoiífances deíl:inées

11

cette fin font lentes

a

paroitre. Quels progre

s la

Me–

decine n'auroit-elle pas fait aux dépens des Sciences de pure fpéculation, [¡ elle

étoit auffi certaine que la Géométrie?

M:lÍs

i:l

eft encore d'aurre,s caraéteres. tres–

marqué's dans la maniere dont nos connoiífances nous affetlent,

&

dans les dif..

férens jugemens que lIórre ame porte de fes idées. Ces jugemens font

dé[¡gné~

par les mots d'év¡dence, de

certi~

u.de

~

de pfoQabilité, de fentiment & de

go~t.

L'évidence appartient pt'opl'ement

am¡:

iclées, dont l'efprit

apper~oit

la liaifoq

tout-d'un coup; la certitude

a

ceHes dont la l¡aifon ne peut etre connue que par

le fecours d'un certain nombre d'idées intermédiaires, ou, ce qui efl: la meme

chofe, aux l"ropolitiollS dont l'identité .avec

UA

principe évident par lui-meme.

ne peut erre découverte que par

un

eircuit' plus ou moins long; d'ol!

il

s'enfui–

vroit que (elon la nature aes efprits, ce qui efl: év,ide;Ilt pour l'un ne feroit quel–

quefois que\:ertain pour un autre. On pourroit encore dire, en prenant les

mot~

d'évidence

&

de certitude dalls un autre fens, que la premiere efl: le réfuhat

des opérations feules de l'e[prit,

&

fe rapporte aux flléculations métaphyfiquts

&

mathématiques;

&

que la feconde efl: plus propre aux objets 'Phyfiqlles, dont

la connoiífance efl: le fruit du rapport conRant

&

invariable de nos fens. La pro..

babilité a principalement lieu .pour les faits hiíl:oriques,

&

en général pour toUS

les évenemens pafsés, prefens

&

a

venir, que nous attribuons

a

U1~e

forte de ha–

fard, parce que nous n'en

démelons pas les caufes. La

partie de cette connoif–

fance qui a pour objet le préfent

&

le pafsé, quoiqu'elle ne foit fondée que

tUl"

le fimple témoignage, produit fouvent en nous une perfuafion auffi fOl"te que

celle qui nalt des axiomes. Le fentiment eíl: de deux

forte~

. L'un defiiné ame

vérités .de morale, s'appelIe confdence; c'eft Qne fuire de la loi naturelle

&

de

l'idée que nous avons du bien

&

du mal;

&

on pourroit le nommer évidence

du creur, parce que, tout différent qu.'il efl: de l'évidence de l'efprit attachée

aux vérités fpéculatives, il nous fubjugue avec le meme empire. L'autre eipece

de fentiment eíl: particulierement affeété

a

\'imitation de la bel1e Nature,

&

a

ce

qu'on appelIe beautés d'expreffion .

1I

fúfit . ave

e

tranfport les beautés fublimes

&

frappantes, démele avec fineífe les beautés cachées, & profcrit ce qui n'en

a que l'apparence. Souvent meme iI pronoFlce des arrets féveres fans f€ donner

la peine d'en détailler les motifs, parce que ces motifs dépendent d'une foule,

d'idées diffidles

a

déveJopper fur le champ,

&

plus encore

a

tranfmettre aux au–

tres. C'efl:

11

cette efpece de fentiment que nous devons le gont

&

le génie,

dillingués l'un de l'autre en ce que le génie efl: le fentiment qui crée,

&

le

gOllt,

le fenriment qui juge.

Apres le détail ou nous [ommes entré

s

fur les différentes partjes de nos c0n.-.

noif-

/.