Table of Contents Table of Contents
Previous Page  350 / 570 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 350 / 570 Next Page
Page Background

55G

LIVRE

QUARANTE-CINQUIE~iE.

la main dans la direetion qu'il indiqucrait. Mais

une pcnséc,une sculc, le relcnailcommc malgré

lui, et l'arrétait toutes les fois qu'il allait prcndrc

une

dét.el

'min::ition. Ce n'était pas, comme on l'a

c1·u

1

l'espérancc de la paix,cspérancc qu'il n'avait

gucre, e'él:iit lacrainle ele perdrc l'aseendant de

lavictoi1·c, en

comrncn~lrnt

aux ycux du monde

un mouvcmcntrétrograde, etcncelail cédnit non

point

a

une illusion puérilc, mais

a

un scnti–

ment prorond de sa situation.

11

se disait que le

prcmier pas fait en arricre scrait le eommcnee–

mcnt d'unc suite d'avcux péniblcset dangcrcux,

aveux qu'il était allé trop loin, qu'il lui était

impossiblc de se soutenir

a

cclle dislancc, qu'il

s'était trompé, qu'il avait manqué son but dans

cellc eampagnc. Que de d.érections, que de pcn–

sécs insurrcclionnellcs pouvailsusciterlc spccta–

clc de Napoléon,jusquc-lainvinciblc,obligéenfin

derétrogradcr

!

Orgueil

a

part, et l'orgucil sans

doulc avait sa place daos les scntimcnts qu'il

éprouvait,

il

y

nvail un immense danger

a

ce

premicr pasenarriCrc. Ce pouvaitCtrc, en effct,

le

commcnccment de sa chulo

1

Préoccupé de ce danger, il songcait toujours

ou

ft

hivcrncr UMoscou

1

ou

ti

cxécutcrun mou–

vcmcnt qui, en le rapprochant de ses magasins,

eUt l'apparcncc d'unc mnnc:euvre et non

d'une

rctrailc. Hivcrncr a Moscou était une résolulion

d'unc singuliCrc audncc, et cette résolulion avait

des partisans.

11

en était un méritant la plus

srandc considération, c'était M. Daru, qui avait

nccompagné Napoléon en qualité de sccrétairc

cl'ttat, qui était chargé de lous les détails de

l'intendance de l'armée, et

s'enacquiltait avec

un zclc, une intelligencc, une activité dignes de

ccttc haute el difficilc fonction. Cct adminislra–

tcur éminenljugcait cnco1·c plus facilc denourrir

l'armée

a

Moscou

1

et

d'y

nssurcr ses communi–

cations pcndant l'hivcr, que de In ramencr saine

et sauve

a

S1nolcnsk, par une roulc inconnuc si

on en

prenait une nouvcllc, ou dévastée si on

reprcnait ccllc qu'on uvait déja pnreouruc. Na–

poléon nppclnit ce conscil un conscil de lion, et

il cst cerlain qu'il cut

foil

u une rare audacc pour

oscr le suivrc. Ln plus grande difficulté n'était

pas cellc de nourrir les hommes, commc nous

J'avons

drja

dit ; on avnit en cfTct du blé, du

riz,

1

C'cst piéC!clien main,d'aprCsla corrcs!JOndancemCmeclc

Napoléu11, ctd'aprésunc<1uanlitédcnotesécrites 1rnrlui

1

toutcs révélnnt sa \'érilal>lc ¡icnsCc, que j'a\'ancc

et

quej'af–

firme

ce1teréril~

1

queNapoléon, co:1treln t1·aditiou

re~ue,

ful

rcteuu ilMoscou moins par l'espéranecde la pnix, (¡uc par In

craintedepmlre !onuccndantmoralctmilitaircenopérant

des légumes, eles spiritucux et quclqucs 1•iandcs

salécs. On pouvnit mc1nc se procurcr de la

viandc fraichc,

it

la condition toutcfois de réu–

nir du bétail avant lamauvaise saison, et de se

procurcr du fourragc pour alimc11tcr ce bétnil

pendant quclqucs mois. La principalc difficulté

c'était de faire vivrc les chcvaux qui cxpiraient

d'inanition, et qu'on ne savait trop comment

nourrir, mCme dans ce momcnt qui n'était pas le

plusdéfavorablc de l'année. On avnit biencneorc

la rcssourcc de portcr sescantonncmcnts

a

douzc

ou

a

quinze

licues

a

Ja

ronde, comme

oil

l'avait

déja fait; mais oulrc qu'il n'était pasccrtain que

ce fút assez pour trouver les fourragcs

néccs~

·

saircs, commcnt,

la

nrnuvaise saison arrivéei

pourrait-on soulcnil' ces cantonncmcnts

a

une

parcillc distancc, avcc une cavalcric légcrc épui–

sée, et contrc une innombrable quantité de Co·

saques, déja venus, ou prets

a

Yenir des bords du

Don? Ces difficultés vaincucs,

i1

en restait une

non moins grave, cellc d'cnlrelcnir la communi–

cation entre tous les postes qui jalonnnicnt· la

l'OUlcdc Smolcnsk

a

Moscou, d'assurcr non-scu–

lcmcnt leurs relalions de l'un

a

l'autre, mais la

conscrvation particuliCre de chacun d'cux, car

a

moins

de

les convertir

en

places

fortcs,

comment

s'y prendrcpour les mettrc a l'abrid'un corps de

douzc a quinzc millc hommcsqui cntreprcndrait

la !<\che de les atlaqucr et de les cmporler suc–

ecssivcmcnt? 11 en fallait

a

Dorogobougc ,

a

Wiasma,

¡,

Ghjat,

a

Mojaisk, cte., sans comptcr

bcaucaup d'autrcs moins imporlants muis néccs–

saircs; et en supposant tous ces postes armés,

approvisionnés, pourvus non-seulemcnt de gar·

nisons permanentes maisde forces mobilcs cnpa–

blcs de s'cntre·sccourir,

i1

était évidcnt que cct

objct scul cxigcrait prcsque la valcur d'une nr–

méc. Et malgré tousces soins pour maintcnir les

communications, que do\'iendrait París, que fc–

rait l'Europc, si un jour on n'avait pas de nou- •

velles de Napoléon, et si on était séparé de lui

commc on l'avait été deMasséna pcndanl la cam·

pagnc de Portugal? fa1fin, ces difficullés si mul–

tipliécs une foissurmontécs de lamaniere la plus

hcurcusc, qu'aurait-on gagné, leprintemps venu,

i1se trouved Moscou? A Moscou, on étaitil-180

licues de Saint-Pétcrsbourg, 180 licues l;l'unc

uu mou1•cmc11l

!'füograde. J'ai

pcu

le

goULde

changcrle'

\'crsious1·c~ucs

enhistoire; je cherche il Ctre \'l'lli,

nonU.Nl

'e

nou1·cau. On cst déjU.bien assez uou1·enu par celaseulqu'on

estnai. Jesoutiensdoncl'asserlion<lontils'agil surles rno–

tifsdu long

séjout·deNapoléonll Moscou,

parce que

j'ai

Ja

con,·ictionctlaprcm·e de sonexllClitudc,