LA BÉRÉZINA. - ocronRE
1812.
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route detestable, sans compter JOO pour venir
de Smolcnsk
a
Moscou, ce qui en faisait 280
pour les rcnforls qui auraient
a
joindre lagrande
armée en marche sur Saint-Pélcrsbourg, tandis
qu'a Witebsk, par exemplc, on n'en serait qu'a
-150 licues. Si lacampagne prochaineconsislait
a
diriger ses cfforts sur la sccondc capitalc de la
Russie,
il
valait micux évidernmcnt partir de
Witebsk que de Moscou ; c'était rnéme le scul
point de départ qu'on pút adoplcr.
L'hivcrnagc
a
Moscou soulcvait clone les plus
graves objcctions. Toulcfois la répugnancc de
Napoléon pour un mouvement rétrograde était
si prononcéc, qu'il n'cxcluait pas l'hypothCse de
l'hivcrnage
a
Moscou, et que lout en ayant or–
donné le départ des blessés transportables, afin
d'clrc libre de ses mouvemcnts, il faisait forlificr
le Krcmlin, déblayer les approchcs ele ce cha·
teau, couvrir ses portes de lambours, armcr de
canons ses muraillcs et ses tours, amcnc1· des
renforts
a
l'arméc, et porter assez loin ses posles
avancés pour étudier les ressources du pays soit
envivres soit en fourrages.
Au milieu de ces erucllcs pcrplexités, la pré–
fércnce de Napoléon élait Loujours pour la bclle
manreuvre qui, le rnp¡ll'ochant de la Polognc pa1·
une marcheoblique vers lenord, J'eút placé cler–
ricre le duc de Bellune
a
Veliki-Luki, et lui cút
donnél'apparenecnonpas deserelirer,maisd'ap–
puyer un mouvement offensif sur Saint-Pétcrs–
bourg. Malhcul'Cuscmcnt chaquejour qui s'écou·
lait, en omenant l'hiver , rcndait une dircction
aunor·d plusanlipathique
a
l'armée, etd'aillcurs,
les nouvelles venues du midi reportaicnt forcé–
ment de ce cólé les combinaisons du moment.
Tandis que !out était staliounaire sur la Dwina,
que Macdonald se morfondait devant Riga sans
pouvoir assiégcr cctte place ,
que.lemaréchal
Sainl-Cyr reslait immobiic
a
Polotsk, sans pou–
voir tircr desavictoircdu ·18 aotit d'aulrc résul·
tal queeelui de se maintenir dansso position, au
contraire, l'amiralTchilchakoff rcvenantdeTur–
quie, aprcs la signaturc de la paix avec les
Turcs, avait traversé la Podolie et la Volhynic,
et, rassuré par la neutralité de la Gallieie seerc·
tcment convcnue a1·ec J'Autrichc, avait pénétré
jusqu'aubord du Styr pour renforeer Tormazoff.
Obligéde laisscr quclques mille hommcs sur ses
derricrcs, il n'cn amcnait gucre que50 mille, ce
qui portait
a
60 mille les deux armécs réunics.
11
en avait pris le commandcment général, et il
avait ohligé Scbwarzenbcrg et Reynicr, qui n'en
comptaient pos 56 mille
a
euxdeux, de se replier
sur le Bug, puis derricre les marais de Pinsk,
afin de eouvrir le grand-dt,1ché. De tout ce que
Napoléon avait demandé pour le prince de
Srhwarzcnberg
il
n'élait arrivé que le balonde
maréchal, et la promesse d'un renfort de 7
a
8
mille hommcs qu'on ne voyait point paraitre.
J,'alarmes'était de nouveau répandue
a
Varsovie,
oU régnait, au Iieu <l'un enlhousiasme créateur,
un aballcmcnt géuéral, ou l'on se disait aban· .
donné par Napoléon, oú l'on se plaignait dece
qu'il n'avait pas réuni laLithuanie
a
laPologne,
oú J'on faisait de toutcs ces plaintes une excuse
pom
1
ne point agir, pour n'cnvoycr ni rccrucs ni
matériel au princc Poniatowski.
Ce n'est pas daos une situation pareille qu'on
JlOUl'ait penser
a
Un lllOUVClleOl l'ers le nord,
car c'cut été laisscr un ehamp lrop vaste auxen·
trcprises de l'amiral Tchitclwkoff.. Une marche
vcrs Kalouga eonvenait bien mieux a ladirection
actuelle des forces ennemics et
a
la disposition
des csprits, qu'on rassurait en leur offrant en
pcrspective leclimatc! l'abondance des provinces
méridionales.
Par toules ces raisons, Napoléon imagina une
combinaison mixtc, consistant
a
se porter sur le
camp de Taroutino,
a
en chasser Kutusof, ce qui
n'avait pas certes l'apparenee d'une retraitc,
a
Je
rcfoulcr soit
a
droite, soit
a
gauche,
a
se porler
ensuite sur Kalouga,
a
y amcncr par laroute de
Jelnia le duc de Bellune, ou au moins une forte
division toutc pretca Srnolensk, d'hiverner ainsi
a
Kalouga, au milieu d'un pays ferlile, sous un
ciel pcu rigourcux, en communication par sa
droitc avcc Smolensk, et par ses derricrcs avec
Moscou. Dans ce plan, Napoléon songcait
a
gar–
dcr le Ktcmlin,
a
y laisscr le maréclrnl Morlier
avee 4 mille hommcs de la jcune garde, avcc 4
millc hommes de cavalcrie démontée organisés
en batail!OnSd'infantcric, O)' dépOSCI' son maté·
riel le plus lour<l, ses blcssés, ses malades, ses
trainards,
it
fournir ainsi
U
CC
maréchal
d'u11 CU·
ractereéprouvé
10
millebommesde garnison, et
des vivrespour six mois. Napoléon, placé
i1
Ka–
Jouga, auscind'unc sorte d'abondance, pouvaul
donncr la main ouau maréchal Morticr, dont il
serait
a
cinq journées, ou au duc de Bcllune,
dont il serait
a
cinq journées aussi cn l'amenant
a
Jclnia, se trouvcrait comme une araignée au
cenlre de sa toilc, prct
a
courir parlout ou un
mouvement se fcrait sentir.
JI
n'aurnit de celle
fa~on
rien CvacuC; il aurait au contrairc cnvahi
de noul'ellcs provinces, en prenant positiondans
lepays le plus bcau, leplus central de la Russie.