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MOSCOU. -

JUILLET

1812.

259

principaux magasins, el surlout mis les moulins

hors de scrvicc. Les habilants,

a

l'cxceplion de

quelques prélrcs el de quclqucs marchancls,

a1•aicnt fui

a

nolre approehe, épouvanlés par le

bruit fort cxagéré des ravoges que nous avio11s

commis en Polognc, ravages presquc nuls dans

les villes prolégées par la présence dc-l'armée,

mais lrop récls dans les campagnes livrécs sans

défcnsc aux pillards isolés.

Napoléon enlré dans Wilebsk pour juger par

ses proprcs ycux de l'imporlancc de ccttc villc,

et de l'étcndue des rcssourccs qu'cllc pourraiL

lui olTrir, y passa quelques inslanls, pril posscs–

sion du palais du gouverneur, palais pcu somp–

lucux rnais suffisanl pour sa simplicilé loujours

grande

a

la gucrrc, el puis, aprcs avoir donné

lesordres les plus indispensables, partil pour re–

gagncr

¡,

loutc bridc la tele de ses colonnes. La

chalcur du jour étail sulTocanlc, et, quancl on la

comparail au froid glacial qu'on seraiL cxposé

a

éprouvcr plus lar<l, sernblaiL une dérision de la

naturc. Les chcvaux et les homrnes tombaicnL

sur la roule, par le double clTet de la mauvaisc

nourrilurc el de la chalcur, et ccux de nos sol–

dalsqui

a

la suite de Napoléon avaicnl déj1

Vil

lanl de pays divcrs, ne se rappelaicnt pas avoir

respiré en Jogyplc un air plus brulant, chargé

d'un sable plus fin et plus éloulTant. Chosc

élrangc, landis que nous laissions sur les chc–

minsquanlilé de lrainards, nous ne rcnconlrions

pas un scul Russc en arricrc, quoiqu'ils fusscnt

bien moins alertes que les

Fran~ais.

Dlais ayanl

loujours marché au milicu de lcurs magasins, ils

n'avaicnt cu1 supporlcr aucunc privalion, et de

plus ilsavaient pour les rclcnir dans les rangs le

slimulanl de la craintc; car, tandis que nos sol–

dalsens'allardantélaicnlassurés d'etrc rccueillis

par lcurs camaradcs, cux n'avaient que lachance

d'Ctrc prisou sabrés par notrc cavalcrie acharnéc

n

les poursuil'l'C.

On chcmina ainsi pcndant plusicurs licues sur

les traces de l'armée russc, sans trouvcr un scul

hommc de qui on ptil savoir la vérilé. On finil

pourtanl vcrs la chute du jou1· par en rarnasscr

quclqucs-uns,qui n'avaicnt pu soutcnir la rapidilé

ilcccllcmarchc,ctsoit

a

la <lircclion lointaincdcs

colonnes qu'on apcrccvaitde tcmps en tcmps des

points culminanls du tcrrain, soit aux réponses

des homrncs rccucillis sur la routc, on crul dé–

couvrir que Pcnncmise rctirait: partic sur Smo–

lcnsk, 'partic entre Smolcnsk et Sourage, daos

l'intcnlion évidcnlc de se réunir au princc lla–

gration. Napoléon avait été jour parjour informé

des opérations du maréclial DavoJst, du combat

deMohilcw, des conséqucnccs·dc ce combat, du

détour auqucl le prince llagralion était con–

damné, détour qui rr.tardait, mais qui n'cmpc–

chait pas sa réunion avcc Barclay de Tolly; il

avait done tous les élémcnls néccssaircs pour

bien jugcr des projels de l'cnncmi. Apres avoir

suivi les Russcsjusqu'o la fin du jour, il s'arrcla

de sa pcrsonnc en un pclil cndroit appclé Ilnpo–

nowlschina. L11 il conféra quclques inslants avcc

Mural el Eugcnc, rcconnut avec cux l'inutililé et

le elangcr d'unc poursuilc prolongéc, car le pro–

jct ele dJborelcr Barclay de Tolly dcvcnail impra·

licable, cclui-ci étant aussi bien sur ses garelcs el

ayanl sur nousaulant d'avancc. Ne pom•ant pas

ledéborelcr, on ne pourait pas davantage crnpc–

chcr sn réunion avcc Bagration, qui était en

marche au dc11t du Dniépcr pour le rcjoindrc

dcrricre laDwina. Tout ce qu'il y avait de possi–

blc, en s'obslinant dans cclle poursuile, c'élait

el'obligcr les elcux généraux russcs

¡,

opéi-cr leur

jonction dix ou quinzc licues plus loin, el cct

avanlagc ele pcu <l'importancc ne rnlait pas l'in–

convénicnt d'épuiscr lesforces de l'arméc. Laca–

valcric était dans un état piloyablc; l'arlillcric

avait la plus grande peine

1i

suivrc. Napoléon

promit done 11 Eugcne el

a

Mural de s'arrC!cr de

nouvcau afin de procurcrquclqucs jours de rcpos

aux troupes, de rallicr les hommcs enarricrc el

de rcfairc des magasins avcc les rcssourccs d11

pays que les Russcs n'avaicnl pas cu le tcmps de

détruirc.

Ccllc résoluliou adoptéc, Napoléon se sépara

d'Eugcnc el de Mural, qu'il laissa avcc lcurs

troupes, el rcntra dansWitcbsk lesoir mcmc.

Ainsi ses combinaisons de l'ouvcrturc de la

campagnc, qui étaicnt au nombre des plus bcllcs

qu'il eút jnmais

con~ucs,

avnicnt échoué, quoi–

qu'il ctit hall.u l'cnncmi dans toules les rcncon–

lrcs, quoiqu'il luí cut déja fait pcrdrc cnviron

·I

¡¡

mi lle hommes en morts, bcssés ou prison–

nicrs, el lui cut arraché plusicurs ele ses mcil–

lcurcs provinccs, tcllcs que la Lithuanic et la

Courlandc. Quclqucs faulcs d'cxéculion avaicnt

sansdoutc contribué

a

cet insuccCs, commc ccllc

de s'élrc trop halé de franchir le Niémcn, et de

n':woir pas, nvant tout évcil donné

a

l'cnncmi,

passé 11

Kowno le tcmps qu'il fallul passcr

11

Wilna pour rallicr l'arméc et ses bagngcs; commc

ccllcs d'a1•oir trop compté sm' la jonction du roi

Jérómc n1•cc le maréchal Daroust, ele n'avoir pns

mis cclui·ci en mesure

:1

lui scul de poursuivrc

et d'cnrclopper le priucc Ilngration ; d'nroir, en