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188

LIVllE

QUARANTF.-TROISll\~IE.

batcaux, cut ordrc de jctcr lrois ponls avec le

concours de la division Morand, la premicrc du

maréehal Davoust.

Aonze heures du soir en cffct, le23 juin 1812,

les voliigcurs de

In

division Morand se jclcrcnt

dans quclques barques, travcrserent Je Niémcn,

largc en cct cndroit de soixantc

a

quatrc-vingts

toiscs, prircnt posscssion sans coup férir de Ja

rive droile, et aidcrcnt les pontonnicrs a fixcr

les amarres auxqucllcs devaicnt ctrc atlachés les

bateaux. A la fin tle Ja nuit, trois ponts, silués

a

cent toises l'un de l'autrc, se trouvCrcnL solidc–

ment établis, et lacavalcrie légcre put passer sur

l'aulre bord.

Le 24 juin au matin, ce

qui,

dans ce pays et

en cctte saison, pouvait sigoifier trois hcurcs, le

soleil se leva radicux, et vint éclaircr de ses

feux .une scCnc magnifique. On avait lu nux

troupes, qui étaicnt pleincs d'ardcur, une p1·0·

clamation courlc et énergique,

eon~uc

dans les

termes suivants :

1i

Soldats, la sccondc gucrrc de Po1ognc cst

11

commcncéc. La prcmiCrc s'cst tcrminéc

a

" Fricdland et a Tilsit!,,, A Tilsit,

In

Uussic a

" juré une élcrnelle alliancc

a

Ja France et la

u

gucrre

á

l'Anglclcrrc. Elle viole aujourcPhui

u

se~

scrmcnts; clic ne vcut donncr aucune

u

cxplication de son étrangc conduilc, que les

1

t

aigles franc;.aises n'aienl repnssé le Rhin, lnis–

" sant par Ja nos alliés

it

sa discrélion ... La

" Uussic cst cnlrainéc par la fatalité ; ses des–

" tins doivcnt s'accomplir, Nous croit-cllc done

" dégénérés? Ne scrions-nous plus les soltlats

" d'Austcrlitz? Elle uous place entre le déshon-

1i

neur et Jaguerrc : notrc c1wix ne saurnit Ctre

" doutcux. Marchons done en avnnl, passons le

u

Niémcn, portons

In

gucrre sur son tcnitoire.

11

La sccondc gucrrc de Polognc

s~n

gloricusc

u

aux armes franc;.aiscs. lUais la pnix que nous

u

conclurons portera avcc elle sn gnranlic; clic

" mcllra un tcrmc

a

Ja funeslc inllucncc que la

·e

Russic cxcrcc dcpuis cinqu:rnte nns sur les

i!

affaircs dé l'Europe.

)1

Cctte proclamation applaudic avcc chaleur,

les troupes dcsccndircnl des hautcurs en for–

rnant trois longucs colonnes, 11ui tour

a

tour

paraissaient et disparnissaicnt en s'cnfonc;.:mt

dans les ravins qui ahoulissnicnt au llcuvc.

Toutcs les picccs de douzc, rangécs sur le t!cmi-

ccrolc des hautcurs, dominaicnt la plainc ou

allnit débouchcr l'arméc, soin du reste inutilc,

car l'enncmi ne se montrait oulle part. Napo–

Jéon, sorti de sa lente et entouré de ses officicrs,

rontcmplait avcc sa lunctte le spcclaclc de cetlc

force prodigieusc, carsi on a rarcmcnt vu dcux

cent millc hommcs agissant

ii

la

íois dans une

gucrrc, on les avus plus raremcnt cncorc réunis

sur un mcmc point, et dans un tel apparcil, et

ccpcndant presquc au mCme moment, et

:1

quclqucs licues de la, deux cent mille autrcs

travcrsaicnt le Niémen

!

L'infanlcric du maréchalDavoust,précédécde

la cavalcrie légCre, se porta la premiCre au

bord du fleuve, et chaque division passant

a

son

tour sur Ja rivc opposéc

1

vint se rangcr en ba–

taillc dans Ja plaine, l'infanteric en colonncsscr–

récs, l'artilleric dansles intcrvallcsde l'infanleric,

In cnvalcric légCrc en avant, la grossc cavalcric

en nrricrc. Les corps des maréchaux Oudinot el

Ncy suivircnt; la gardc aprCs eux, les pares

apres lagnrdc. En quclques hcures Inrive droitc

fnt couvcrle de ces troupes mngniíiques, qui,

dcsccndant des hauteurs de In rivc gauchc, se

déroulant en longncs files sur les trois ponts,

scmblaicnt couler commc lrois torrcnls inépui–

snblcs dans cclle plainc arrondic qu'clles rcm–

plissaicnt déja de Jeurs flots pressés. Les fcux

du solcil étincelaicnt sur les balonncltcs et les

casques; les troupes , enthousiasmécs d'cllcs–

memcs et de lcur chef, poussaienl sans rclachc

le cri de Vive l'Empercur ! Ce n'était pas d'cllcs

qu'on <lcvait attcndrc et désircr in froide rnison

qui nurail pu npprécicr et pré1·cnir cctte fobu–

lcusc cntreprisc. Elles ne rcvaicnt que triomphcs

et courscs lointaincs , car elles étnicnt convain–

cucs que l'cxpédition de Russie allait finir dans

les lndes. On a souvcnt parlé cl'un oragc subit

qui

scrait

vcnu comme un

oraclc sinistrc

donncr

un a\'is non écouté: il n'cn ful ricn, hélas

!

le

lemps ne ccssn pas <l'ctre supcrbe

1

,

el Napoléon,

qui n'avait pas cu les avcrtisscments de l'opinion

publique, n'cut pas mémcccuxde Insupcrstition.

Apres avoir conlemplé pcndanl quclqucs heu–

rcs ce spcclacle extraordinnire, contcmplation

cniv1·antc et stérilc, Napolt'on, monlant

a

chevnl,

quilla la hautcur oú nvaicnt été disposccs ses

tenles, dcscendit a son tour au hord du Niémcn,

lmvcrsa l'un des ponts,

el

tournant

brusquc-

plus tuinctc¡uclqucs

L'cS1 r0>·m,ec <1·1"""qui l'css11yac11 passant