Table of Contents Table of Contents
Previous Page  16 / 616 Next Page
Information
Show Menu
Previous Page 16 / 616 Next Page
Page Background

6

LIVRE QUARANTE-HUITJE1\1E.

au front des princes de Saxe. Aussi le cabinet

autrichien voulait-il amener le roi de Saxe de

Bavicre en Bohcrue, pour mieux disposer de

luí. Afin de l'y altirer, il faisait valoir aupres

de ce prince l'avantage d'étre

a

Prague dans

un pays inviolable' et a quelques heures de

Dresde, en mesure par conséquent de parler

chaque jour

a

ses sujets, et de conserver leur

aífection.

Les négociations entamées avec la Baviere

étaient tout aussi délicates, et préscntaient meme

beaucoup plus de difficullés. Outre qu'il fallait

lui faire agréer un projet de médiation qui était

tout

a

fait en dehors de la poli tique ele Napoléon

(ce qui ne laissait pas d'avoir ses dangers), il fal–

lait la disposer a un sacrifice nullement utile

a

la

cause générale, mais lres-utile

a

f

Autrichc, c'é–

tait le réLablissement de la frontiere de !'Ion,

entaméc aux dépens de l'Aulriche et au profit de

la Baviere par le lraité de paix de 1809. Ici il

n'y avait que la menace

a

employer, et aucun

dédommagemcnl

a

offrir,

CUl'

il ne se trouvait

aulour de la Baviere que les territoires de Baden,

de '\Vurtemberg, de Saxe, qu'on n'aurait su

comment démembrer áu profit d'un voisin. La

tache étaiL difficile, et on eo urait la chance que

la Baviere mécontente ne révélat tout

a

Napo–

léon. Quant a nos alliés de Bade, deWurt.embcrg,

l'Autriche n'avait pu les abordcr qu'avcc beau–

coup de ménagemenls, leur voisinage des bords

du Rhin les rendant tout

a

fait dépendants de la

domination vigilante de Napo1éon.

C'est au milicu de ce. lntvail subtil et secret

que

l\I.

de Narbonne vint surprendre l'Autriche,

et lui apporter ,des vues malheureusement bien

différentes des siennes.

An

lieu du projet de re–

constituer la Prusse, et de rendre l'Allemagne

indépendante, M. de Narbonne apportait un

boulcversement de l'Allemagne plus grand cn–

core que celui auquel on voulait remédier, c'est–

a-dire la Prusse détruite définitivement, la Saxe

suLslituée a la Prusse, et l'Autriche payée il est

vrai par la Silésie, mais plus dépendante que ja–

mais

!

Certes il n'y avait pas avec de telles pro–

positions grand moyen de s'entendre; ajoutez que

M. de Narbonne, récemment entré dans la

fa–

veur de Napoléon, arrivait nalurellement avec

le désir de se distinguer, et surtout avec la pré–

tention de n'etre pas comme son prédécesseur

dupe de

1\1.

de Mettcrnich

!

Dispositions dange–

reuscs, quoique fort conccvablcs, car ce qu'il y

aurait eu de mieux, c'eut été de parailre dupe

sans l'etre, et mcme de l'elre réellement, plutót

que de forcer l'Aütriche

a

se prononcer, en lui

montrant qu'on l'avait devinée.

L'accueil de M. de l\Ietternich

a

l\I. de Nar–

bonne fut des plus empressés et des plus flatleurs.

1\1.

de MeLternich, ne se contentant pas d'cLre

un esprit politique profond, se

piquai~

d'etre

aussi l.m esprit aimable et sincere, et savait l;étre

au besoin. Il

fit

avcc M. de Narbonne assaut de ...

grace; il l'accueillit comme un ami auqüel

il

n'a–

vait rien

a

cachet', et avcc le sccours duquel il

voulait sau ver la France, l'Autriche, l'Europe

d'une aífreuse calastrophe, en s'expliquant fran–

chemcnt et tout de suite sur toulcs choscs. ll se

donna done beaucoup de peine pour savoiL' si

l\L de Narbonne apportait enfin quelques conces–

sions

~1

la politique européenne, qui prouvassent

de la part de Napoléon une disposition a la paix.

:Mais

1\1.

de Narbonne attendait encore de Paris

ses dernicrrs instructions, dans lcsquclles on do–

vait lui traccr point par point la maniere dont

il

fcrait succcssivement a l'Autriche les importantes

ouverlurcs dont on allait le ehargcr. Jusque-la

il

n'avait presque rien a dire, si ce n'est que Napo –

léon entendait ne ríen céder, mais que si l'Autri–

che voulaít devenir sa complice,

il

la payerait

bien, ovec des territoires qu'on prendrait n'im–

porle a qui. En pareille situalion, se taire, beau–

coup .écouler, beaucoup deviner, en attendant

qu'il pót parler, était tout ce que l\I. de NarLoirne

avait de mieux

a

faire, et e'est ce qu'il

fit.

Comme

il ne parlait pas,

1\1.

de l\fotternich essaya de

parler. Il <lit des choses qu'on aurait du deviner

sans qu'il les dit, et qu'on aurait au moins du

comprendre, quand il prenait.soin de les répéter

sisouveut, et avcc une bonne volonté si évidente

de les rendre utiles. On était

a

Vienne,

~uivant

1\1.

de l\fetternich (et il disait vrai), dans une po-·

sition <les plus difliciles depuis la défection de la

Prusse. L'Allemagne entiere demandait qu'on se

joignit aux Russcs el aux Anglais contre les Fran'.:.

~ais.

Toutes les classes

a

Vienne, quoique moins

hardies qu'a Berlin, tenaient au fond le meme

langage, et ce qu'il y avait de plus grave, c

9

est

que l'arrnée partageait leur avis. Tout le monde

voulait qu'on profitat de l'occasion poúr affran–

chir l'Allemagne du joug de la France, et pour

faire ccsser un état de choses intolérable. L'Au–

triche savait saos doute tout ce qu'il y avaiL

d'exagéré, d'imprudent dans ce langage. Elle

savait que Napoléon était tres-puissant, tres–

redoutable, qu'il ne fallait pas s'attaquer

a

luí

témérairement; el lui,

1\1.

de l\fetternich, n'allaii

pas retomber dans les fautes dont il avait voulu