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LIVRE QUARANTE-HUITIEME.

fort méconlent de tout ce qu'il avait vu, et, s'il

avait été juste, il aurait

du

étrc aussi rnécontcnt

de Jui que des autrcs, car il n'avait pas mcrnc su

faire cntendrc aulant de vérités que son gouvcr–

nement l'avait autorisé

a

en dire, et autanl qu'il

en devait

a

Napoléon, pour se laver cnvcrs Jui

de tout reproche d'ingratitude,

en

acceptant Je

nouveau róle qu'il allait bicntót jouer.

AVienne les choses ne se passaicnt pas micux,

bien qu'avec bcaucoup plus de clairvoyance et

d'esprit de la part des représcntanls de la France

et de l'Autriche . Tandis que

M.

de Narbonne

était en route pour s'y rendre, Ja situation avait

encore empiré po ur nous, et

l\I.

de .Melternich

et l'empereur, pressés entre l'opinion universelle

de J'AJlcmagne qui les sommait de se joindre

a

la coalition, et la France envers laquelle ils

étaicnt engagés, ue savaient plus comment se

tirer d"embarras, et se trouvaient condamnés

chaque jour a de plus pénibles dissimulations.

Leur but n'a-vait pas cbangé, car

il

n'y en avait

qu'un de sage et d'honnéte

a

poursuivre dans

leur situation. Passer de l'état d'allié de la Ftance

a celui d'allié de la Uussie, de la Prusse, de

l'Angleterre, par un état intermédiaire , cclu i

d'arbitre, imposer aux uns comme aux autres

une paix avantageuse

a

l'Allemagnc, se tenir a

ce róle intermédiairc le plus longtemps possible,

ne se réunir

a

la coalition qu'a la derniére ex–

trémité , était aux yeux qu prudent empereur,

de l'habile ministre, la scule conduite

a

ten ir.

Pour l'empereur, elle conciliait, comme nous

l'avons dit, ses intéréts de souverain allemand

avec ses devoirs de pere; pour le ministre, elle

offrait une maniere convenable de passer d'une

politiquea l'au lre, et de rester décemment

a

la

tete des a1Taires. Pour les deux elle avai't le

grand méríte d'épargner

a

l'Autriche

Ja

guerre

avec la France, qui,

a

leurs yeux, présentait

toujours des chances síngulierement e1Trayantes.

l\fais faire

accepte~

aux coalisés, e'xaltés par la

h aine et l'espérance, cette lente transition vers

eux, faire accepler a Napoléon des conseils mo–

dérés, était une chose presque impossible, dans

laquelle toute la dextérité du monde pouvai t

échouer, surtout au milieu des incidents contí–

nuels d'une situation extraordinaire. Il eut été

plus commode sans aucun doute de s'expliquer

ncttement et immédiatement avec tous, de dire

aux coalisés comme a Napoléon qu'on voulait Ja

paix, qu'on Ja voulait allcmande pour l'Allema–

gne d'abord, dont on devait avoir les intérets

a

creur, pour l'Europe el'suite,

a

I'équilibre de

la.quelle une Allemagne indépcndante était in–

dispensable; que, pouvant jeter da ns la balance

un poids décisif, on était prét

a

le faire contr·e

celui qu_i n'admettrait pas complétement et tout

de suite ce systcme de pacification générale.

Mais parle1· ainsi avant d'avoir deux cent mille

hommes en Bohcme pouvait étre chose hasar–

deuse en présence d'un caractere aussi impé–

tueux que Napoléon, et d'une coalition aussi

enivrée de succes inespérés que l'était celle de

Ja Russie , de l'Angleterre et de la Prusse. 11

était done prudent de gagner du temps avant de

s'expliquer. Le cabinet autrichien n'y négligea

rien :

iI

était en fonds d'habilcté pour l'éussir

dans une. tache parcille.

D'abord

il

avait voulu en Allemagne mcme se

ménager des adhérents asa politique médiatrlce,

et il les avait cherchés parmi les princes engagés

comme luí dans l'alliance

fran~a ise,

par pru–

dence ou par intérét. Il avait commencé par

s'adresser secretement

a

la Ptusse, qui, avec

une mobilité tenant

a

sa position et aux passions

de son peuple, avait versé tout d'un coup d<i Ja

médiation dans la guerre. Ne pouvant plus se

servir de la Prusse,

il

avait, toujours en secret,

tourné ses efforts vers la Saxc et la Baviere, qui

ne demandaient pas mieux que d'avoir la paix,

surtout de l'avoir avantageuse a l'Allemagne, et

íl ies avait rattachées a sa politique. Il avait

amené, comme on l'a vu, le roi de Saxe

a

quit–

ter Dresde,

a

nous refuser son contingenL en ca–

valerie, et

a

enfermer daos Torgau son contin–

gent en ínfanterie. Mais ce n'était plus assez ,, il

voulait maiótenant le conduíre d.e Ratisbonne a

Prague, pour en disposer plus complétemcnt, et

luí faire adopter toutes ses vues. La princj pale

de ces vues consístait

a

obtenir du vieux roí le

saerifice de Ja Pologne, présent bien flatteur ele

Napoléon, mais présent ehiméríque et dange–

rcux, dont la campagne de Moscou venait üe

démontrer le péril et l'inanité. Aya-nt le consen–

tement du roi de Saxe pour la suppression du

grand-duché de Varsovie, 'Je cabinet autrichien

cspérait trouver moins de difilcultés de Ja part

de Napoléon, qui n'aurait plus !'embarras et Je

désagrément d'abandonner un allié pour lequel

il

avaít toujours affiché la plus grande faveur.

Alors , avec les territoires qui s'étendent du Bug

a

la Warta, on avait de quoi rcconsLituer la

Prusse, on délivrait la Ru ssie de .ce grand-duché

de Varsovie, qui était pour elle un fantóme ac–

cusateur et

mena~ant;

on lui donnait quelqüe

chose pour le duc 'd'Oldenbourg, et on r epre-