PÉROU ET BOLIVIE.
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apres une pareille -victoire, il fallut
songer
sérieusement aux
affai res.
Francois de Carvajal, le conseiller in–
time
0
de Pizarre, voulait qu'on profi–
tfit largement lle la défa1te de l'en–
nemi, et qu'on pOUSSAt
l PS
choses
a
!'extreme.
JI
excitait Pizarre
a
pren–
dre . un parti décisif, lui disant que
daos sa position les moyens termes
étaient beoucoup plus dangereux que
les résolt¡tlons hardies.
11
irritait son
ambition en faísant briller
a
ses yeux
la perspective d'un pouvoir absofu et
saos contrdle.
JI
l'engageoit
a
se dé–
clarer indépendant, et lui indíquait en
méme temps les ressources dont il
disposait pour consolider son pouvoir;
il lui conseillait surtout de se conci–
lier Je re pect et l'affection des indi–
gent> ; et pour cela, il luí avait sug–
gér6 l'idée assez ingénieuse d'épou er
parmi les
r.oyas,
ou filies du soleil,
celle qui était le plus rapprochée du
tróne. Cette union établirait un líen
indissoluble entre la famille de Pizarre
et la nation péruvienne, et l'autorité
de Gonzale acquerrait aux . eux des
Indiens un caractere de légitimit qui
lui donnerait une force nouvelle.
Ces
exho rtations, vivement
ap–
puyées par le licencié Cepéda, aulre
conseiller de Pizarre, chatouillaient
les instincts cupides et despotiques de
Gonzale. Mais, soit que le vainqueur
du vice-roí se méfiAt de la mobilité
de cette tourbe efe courtisan et de
soldats, qui, de trahi on en' trahison,
avaient fini par ,Se donner
a
lu i, S<JUf
a l'abandonner le lendemaia; soit plu–
tót que son intélligence bornée se re–
fusat a apprécier les
avanta~cs
du parti
que luí proposait Can
1
ajal, il recula ef–
frayé devant une usurpation complete.
II
ne comprit pas que, rebelle
a
demi,
il
était tout aus i coupab le aux yeux
du roi; qu'en pareil cas, la distance
du plus au moins a'est comptée pour
rien. et que, ear conséquent, il
y
a
plus de prolit a jouer le tout pour le
tout. Pizarre n'avai l pos le courage
de son role, et il
lais a 'clrnpper la
plu
helle orca ion qui put jamais
s'offrir
a
lui .
11
e horna a solliciter
de la cour d'Es¡rngne la favcur d'étre
maintenu danS' le gouvernement du
Pérou. Un de ses officiers fut chargé
d'aller présenter sa requéte
a
l'empa–
reur.
De son coté, le
~ouvernement
de
Madrid cherohait ies moyens de faire
rentrer les insur.gés dans la voie de
l'obéissance et du devoir.
JI
ignorait
encare le sort tragique du vice- roi,
mais il savait la révolte de Pizarre et
l'emprisonnement de Nugnez Véla.
Malheureusement Cbarles-Quint, alors
absorbé ea
All~magne
par les préoc–
cupatioos que lui causait la fameuse
ligue de Smalcalde, ne pouvait prési–
der aux mesures que réclamait l'état
du Pérou.' Abandonnés
a
leurs ins-·
pirations, ses ministres et son fils
Philippe n'oserent prendre un parti
énergique. Ap1"es avoir pesé les avan–
tages et les inconvénients d' un retour
offensif contre Pizarre, ils s'arréterent
a
des réso lutions plus pacifiques. Du
reste, il faut reconnaltre que toute
autre déci ion eut été, en ce moment,
d'uae exécution fort difficile. L'Espa–
gne, épuisée par l'ambition de son
souverajn, étaitJ
a
bout d
sacrifices
en hommes et en argent; elle ne pou–
vait envoyer au dela des mers un
co rp de troupes suffi ant pour met–
tre les Insurges a la raison. En second
li eu, Pizarre étant, comme nous l'a–
vons dit, maltre de Nombre-c!·e-Dio ,
la communication d'11n oeéan
a
l'autre
par Panama étai t impossible. On pou–
vait,
a
la rigueur, se diriger sur Quito
par Ja
ouvelle-Grenade; mais cette
route était longue,
fati~ante,
bérissée
de périls de toute e pece. La
itua–
tion exigeait done l'emploi des moyens
dilatoires et de mesures de conciiia–
tion.
Pierre de la Gasea, ecclésiastique
et conseiller de l'iaquisition, fut chargé
d'aller faire entendre aux rebelle des
paroles efe clémence, et rétablir l'or–
dre au Pérou. On pensa qu' uo homme
d'un caractere doux, mais ferme, co n–
ciliant dan
les formes, mais au fon d
tres -
éner~ique,
serait plus propre
qu 'un militaire
a
remplir une mi sion
aus ·i délicate. Ce fut de la part de
Gasea un acte de vrai dévouement que