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P:f:ROU ET BOLIVIE.

453

nétrés de douleur et de rage,

se

préci–

pittrent, tete baissée , au milieu des

royalistes, criant l'un et l'autre· de

toute leur force :

«

Je sui un tel, qui

a tué le marquis (•)

! ,,

Et ils conti–

nuerent a provoquer ainsi la fureur

de leurs adversaires , jusqu'a ce qu'i ls

fussent mis en pi eces. La bataille ayant

commencé au décli n du jour, l'obs–

curité favorisa

la fuite d'un grand

nombre d'almagristes. Quant

a

ceux

qui espérai ent se sauver en sui vant le

chemin ,de la vallée, ils furent tous

égorgés par les Indiens, qui, cette fois,

du moins, eurent !'esprit de proliter

des qu erelles de leurs oppresseurs;

150

cavaliers , qui se réfugierent

a

Guamanga, distante de deux lieues

du thétltre du coml.Jat, furent désa r–

més et fa its prisonniers par les habi –

tants. Enfin Almal;?ro , qui chercha un

asile

a

Cuzco, y lut arreté par ordre

d'un de ses lieutenants, Rodrigue de

Salazar. Ainsi le successeur de Pizarre

vit son pouvoir d'un jour détruit en

quelques heures, et ne trouva plus 9ue

des ennemis d{lns ceux-la meme qui luí

avaient juré fid élité jusqu'ii la ¡nort;

désappointement cruel, mais dont se

serait moins étonné uo bomme plus

habitué aux trahisons qui désbono–

rent la plupart des guerres civ ile .

Vaca de Castro usa de la victoire

avec une rigueur , conforme peut-etre

a

l'e prit du ternps' mais peu en har–

moni e avec ses antécédents d'homme

de loi. Des le lendemain de la bataill e,

il

fit

mettre

a

mort quelques-uus des

prisonniers qui avaient pris part au

meurtre de Pizarre. Le jour suivant ,

plusieurs capitaines d'Almagro furent

suppliciés

a

Guamanga. Enlin, le gou–

verneur s'étant transporté

a

Cuzco ,

instruisit le proces de don Di egue, et

fit

immédiatement déca piter le con–

damné en place publique , pour frnp–

per, par cet exempl e terrible, l'i 111agi–

nation de la foule. Suivant le histo–

riens,

il

n'y eut pas moins de quarante

(•) Pizarre s'étai l fai t conférer le tilrc de

marquis par le roi o.l'Espa¡;ne. Les bislorieus

l'appellenl indiffércmmenl le gou\•erneur ou

le marquis.

prisonniers envoyés au bourreau, vingt

autres furent bannis, et le reste fut

amnistié.

Ainsi s'éteignit le nom d'Almagro.

11 ne res ta de cette famille, dans le

Pérou, qu' un souveni r m81é de haine

chéz

les uns , d'indifférenre chez les

autres. Les ressenti ments que les mal–

heu rs du pere et du fils avaient dépo–

sés dans le creur el e quelques amls dé–

voués' ne tarderent pas

a

s'effacer

sous l'inlluence de nouvelles passions.

La guerre civjle n'était pas fini e , et

l'hoinme

~ui

l'avait allumée

fut

si bien

oublié, qu on .ne se souvint pas de luí,

meme pour le maudire.

11 n'est pas saos intéret d'appren–

dre que, tandis que Vaca de Castro

se di posait

a

gouverner

a

son tour ce

pays arraché par la violence

a

ses mal–

tres légi times, le malheureux Inca,

qui portait encore le titre fi ctif d'em–

pereur du Pérou, errait saos asile

dans les montagnes, de peur que le

nqu\'.eau gouverneur ne le punit d'a–

voir témoigné quelque bienveillance

au rival de Pizarre.

Jusqu'a ce moment le Pérou avait

été agité par l'ambition de quelques

homme ; l'heure était ve11ue ou la mé–

tropole elle - meme allait y fomenter'

par ses imprudence et des fautes de

toute nature , des troubles non moins

graves que ceux dont on a lu le récit.

Des le premiers temps de la con–

quete, Pizarre, ses frere , et les aven–

turiers qui marchaient sous leur com–

mandement, s'étaient partagé non–

seulement les terres du Pérou, mais

encor.e les babi tan ts de ce malheu reux

pays.

11

y avait eu confiscation du sol

au profit des nou veaux venus, et con–

fiscation de la liberté des indigenes. Le

droit de la 9uerre, tel qu'on l'enten–

dait

a

cette epoque, avait donné le ter–

ritoire aux E pagnols; les préjugés ac–

créd ités contre tous les hommes qui

n'é tLJ ient pas de race blanehe ava ient

au torisé l'attentat

a

la liberté des ha–

bitants. On

con~oit

quels abus avait

enfantés cette double spoli ation. La

cupidité des Européens avai t amené

des querelles déplorables entre les pro·

priétaires, toujours disposés

a

empié-