4.22
L'UNIVERS.
qui nous reste pour compléter cette
étude sur le Pérou ancien et moderne.
" Le caractere de ces sauvages, dit
M. d'Orbigny, offre la réunion la plus
monstrueuse de tous les défauts que
puisse amener, ohez
l'bomme sans
instruction et superstitieux, une éd u–
cation affranchie du fl·ein des répri–
mandes et meme des plus si111ples con–
seils. Les Yuracares sont assez gais,
ont une pénétration facile, de ]'esprit
meme et beaucoup de finesse; ils se
croient les premiers hommes; hau–
tains, insolents, bardis, entreprenants,
ils ne redoutent Hen. Cruels autant
pour eux-memes que pour les autres,
endurcis aux souffrances physiques,
Jeu r insensibilité est extreme, babi·
tués qu'ils sont, dans chacune des oc–
ca ions que leur offrent des supersti–
tions sans nombrll,
a
se couvrir de
blessures'
a
martyriser leurs femmes
et leurs enfants. lis n'ont aucuh atta–
chement pou1· leurs peres, qu'i l aban–
dónnent souvent, et
immolent de
sang-froid IPurs enfants da11s le seul
but de s'affnanchl r de !'embarras de
les éleve . Ennemis de toute espece
de société qui pourrait leur oter un
peu de leur indépendaoce, ils ne vi–
vent que par familJes. et encare dans
celle - ci meme ne connalt - on ni les
égards mutuels , ni la ubordination,
chaque individu ne vivant l¡ue pour
soi. Les femmes partaaent e carac–
tere des hommes, et chez elles on ne
trouve metn'e pas touj ours 'le senti–
meut maternet; elles inmiolent fré–
qu.emme1\t la moitié de leurs enfa'(lts,
tollt en restant esclaves de ceux qu'elles
éléve\lt.
" Les mceu'rs des Yuracares sont
tout
a
fait en harmonie avec Je'ur ca–
ractere : ils se montrent encare au–
jourd'hui ce qu'ils étaient avant l'ar–
rivée des Espagnols, et n'ont en rien
modifié leurs usages par le contact de
la civilísa tion qui les entoure, vivant
touj ours au plus épais des bois, par
pet1tes familles ambulantes, qui se
fuient, et: cherchent plllSque jamais
a
s'éloigner des
lieux habités par les
chrétiens. Marié apres ·une orgie, un
Yuracares se sépate aussitot de ses
parents et va s'établir aveo sa femme
pres d' un ruisseau, au sein des plus
sombres forets.
La,
aidé des sien
,
qu' il a invités
i.t
le joindre dans cette
circónstance, il abat des arbres, cons–
truit une vaste cabane couverte de
feuilles de palmier , ensemence un
ch:imp, et, en attendant la récolte ,
vit de chasse et de peche.
11
y
séjourne
quelques années, pu is quitte la place
pour aller se fixer
a
peu de distance;
la femme alors se charge de tout le
bagage renfermé dans une espece de
fil
et, dont tout le poids pese sur le
front, et,
en
outre, qe ses jeunes en–
fants, tandis que son mari ne porte
que sbn are et ses fl eches. Visiteurs
infatiga!Jles, les Yuracares n'arrivent
jamais chez leurs voi ins sans les pré–
venir de loin par des fanfares ou par
des sifllements. lis se traitent les uns
les autres avec beaucoup de cérémo–
nial, et ont des conférences prolon–
gées, sans jamais se rPgarder en par–
lant. Ces réuníons amenent presque
toujour's de or¡¡;ies de boi ons fer–
mentées et de
dan es manotones;
elles se renouvellent
i.t
divPrses épo–
ques de leur exi tence ,
i.t
la nubilité
d'une jeune filie par exemple , et ne
se terminent jamais sans que chacun
ait
a~rosé
la terre de son sang, en se
fai ant de nombreuses blessures aux ·
bras et aux jambes. Les femmes vont
accoucher au milieu des bois, au bord
d'un ruisseau, dans lequel elles se bai–
gnent immédiatement, et reviennent
i.t
leur maison reprendre leurs travaux
ordinaires; mais souvent elles tuent
de suite leur eufant, soit parce qu'elles
en ont 11n as ez grand nombre , soit
parce que leurs premiers n'ont pas
vécu. Les homrnes pratiquent le sui–
cide et
e battent souvent en duel
a
coups de fl eches. En réunion , ils man–
gen t ensemble, et leurs repas, comme
leu r chasse et leur peche, sont assu–
jettis
il
une foule de superstitions.
Les malad es sont trai lés. souvent au
milieu des bois , par des saignée
lo–
ca les ou par des cérémonies supersti –
tieuses. A la n'lort de
l'un d'eux ,
tout ce qui appartenait au défunt est
anéanti ; on abandonne sa cabane et