2&8
L'UNIVERS.
lui, un décret irnpérial, daté du
.20
novernbre 1542, établit une
audience
ou tribunal suprérne, dont Alanzo de
l\laldonado fut nommé président. Le
siége de cette cour fut fixé
a
Vallado–
lid de Comayagua; mais, sur les justes
observations des habitants européens,
on le transféra dans la ville de Gra–
cias-a-Dios, qui était beaucoup plus
centrale. Plus tard, en 1555,
!'audien–
cia
fut transportée
a
Guatemala, puis
a
Fanama, pour etre bientot rendue
a
la capitale du royaume. Philippe II
étendit ses attributions, et en
fit
une
cour prétoriale indépendante d1i vice–
roi du l\lexique. La juridiction de la
chancelleric royale de Guatemala s'é–
tendait, du coté de l'océan Atlantique,
depuis la cote de Belize, d:ms le haut
de la baie de Honduras, jusqu·a la
petite lle déserte nommée
Escudo de
reraguas,
sur la cote de Veraguas;
du coté de l'océan Pacifique, depuis
la barre du Paredon, dans la province
de Soconusco, jusqu'á l'embnuchure de
la Boruca, dans celle de Costa·Rica.
Le territoire compri!i entre ces limites
offrait une
longueur cL'environ 900
milles anglais; sa largeur, d'ane mer
a
l'autre, variait de 180
a
500 mili es.
Sa surface était de 200,500 milles car–
rés. Ces évaluations, que nous avons
lieu de croire exactes, peuvent donner
une idée de l'étRndue de cet ancien
domaine de l'Espagne.
· L'espritd'independance, que lasévé–
rité d'Alvarado avait comprimé, se
réveilla parmi les gou1•erueurs espa–
g~ols
du pays, vers la moitié du sei·
zieme siecle. La province Je Nicaragua,
conquise et colonisée, en 1523, par
Pe–
drarias Da vi la, était gouvernée, depuis
l'année 1534, par Rodrigo de Contre·
ras, qui ne le cédait pas
a
ses colle–
gues des autres districts pour l'avarice
et la cruauté. Ce gouverneur eut qncl–
ques démelés avec la justice, et profita
de l'occasion ppur ten ter la réalisation
de ses desseins amhiticux. Ses lils fu–
rent ses dociles
instruments; l'un
d'eux, Hernando, marcha sur Panama
et s'en rendit maltre; son frere et lui
devaient, en cas de réussite, se par–
tager Je Pérou et l'Amérique centrale.
C'était une conspiration en regle,·et
des succes .inespérés dans les premiers
temps avaient accru l'audace et l'or–
gueil des rebelles. Ils finirent par suc–
cornber devant les troupes royales en–
voyées contre eux. Une prompte fuite
leur épargna la honte du chatiment dü
a
leur crime. Tout rentra dans l'ordre
a
Panama et
a
Nicaragua; mais cette
sédition eut un long et funeste reten–
tissement dans ces deux provinces.
On s'étonne que l'autorité des Es–
pagnols n'ait pas été plus souvent me–
nacée par l'insurrection, et surtout
que les Indiens n'aient pas cherché sé–
rieusement
a
se délivrer de ce joug
intolérable. Le spectacle des miseres
de l'Amérique,
a
l'époque qui nous
occupe ici, montre
a
quel point les
hommes peuvent pousser la patience
et l'oubli des in jures, quand ils sont
dominés par un respect absurde pour
leurs tyrans.
11
est' vrai que les conqué–
r<Jnts avaie11t usé du meHJcur mayen
pour réduire leurs sujets
a
l'irnpuis–
sance; ¡;'avait éLé d'abord de leur in–
terdire, sous des peines séveres, le
port d'armes quelconqües, de les dés–
habituer ai11si de la guerre; ensuite de
leur inculquer de fausses idées de rési–
gnation, en leur expliquant,
a
leur ma–
niere,
l~s
préceptesd'humilitécontenus
dans l'Evangile; enfin de les abrutir
par l'exces des boissons alcooliques.
Le résultat de cette propagande et du
désarmement &énéral répondit mer–
veilleusement a
l'attente des vain–
queurs: " A présent, dit le mission–
naire angla is Thomas Gage, qui résida
12 ans dans le Guatemala, de 1625
a
1637,
á
présent les Indieñs sont deve- ·
nus sans creur, en sorte qu'ils tres–
saillent de peur lorsqu'ils entendent
tirer un mousquet; ce qui vie11t de ce
qu'ils sont désarmés et opprimés. par
les Espagnols. • Nous trouvons dans
le naif récit du meme voyageur un ta–
bleau poignant des souffrances des in–
digenes sous la domination espagnole,
tableau qui vient
a
l'appui de ce que
nous avons dit plus haut. Nous con–
servons dans la citation qu'on va lire
le vieux francais du traducteur de
Thomas Gage; 'le style du dix-septieme