í!:DIFIANTES
ET
CURIEUSES.
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le repas ils se lav-ent les mains avec de l'ealt
et
du savon : la malpropreté rend cette précaution
nécessaire.
Les amis de mon hote vinrent me voir , plus ?lr·
curiosité que par honneteté. Quaild ils m'eurent
contemplé
a
loisir ' ils se retirerent' P.t je fos fort
·surpris de voir tontes les filles et les femmes qui
composoieut la famille se ranger autour de moi, et
me tenir compaguie. Dans ce pays jamais elles ne
paroissent ou il
y
a des hommes: apparemment que
Soliman leur avoit dit que j'étois nn religieux franc :–
et
qu'il
n'y
avoit pas de déshonneur pour elles de
rester toutes ensemble avec moi. Ce qui augmenta
ina surprise, c'est qu'elles avoient leur voile levé.
11 est vrai que je ne les regardai jamais au visage ,
te seroit ici la plus grande incivilité, et
des
qu'elles
s'en apers;:oivent, elles Jaissent tombn leur voile.
Telles sont les lois austeres que leur imposent et
l'éducation, et la pudeur. Bon Dieu, que ces mcrurs
sout différentes des nutres
!
dans toutes mes missions
d'Europe, jamais je n'avois re9u tant de marques
de bonlé et de bienveillance que j'en re9trs de cette
famille
infidele~
Ces bonnes gens me parloient éter–
neJlement, et je ne les entendois pas; ils avoient la
patierice de tourner la phrnse en tant de manieres;
qu'enfin je cornprenois quelque chose. Nos Fran9ais,
tout polis qu'ils sont, u'ont pas ordinairement cette
complaisance pour les étrangers. Pour eux ils m'en–
tendoient parfaitement, parce que je ne leur disois
que ce que je savois. 11 est vrai que mes incongruités
en fait de langage , mes expressions , mon accent
les faisoit quelquefois sourire , mais e'étoit d'une
fa~on
plutot aimable que choquante , et pllls capable
de m'eneouragcr que de me déconcerter. Savez-vous
l'arahe, me disoieut- ils? Non, je ne fais que com–
mencer
a
l'apprendrP. Savez - vous le turc ? Non.
Que .sa vez-vous done ? Je sais le
fran~ais
, le grec ,
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