EDIFlANTES ET CURIEUSES.
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J~
m,embarquai le
22
de mars, avec mes petites
provisions , résolu de jet"mer avec les Grecs , et de
ñ'etre pas moins austere qu'eux : ils ne mangeut
point de poisson, si ce n'est le jour de l'Annoncia–
tion et du d:imanche des Rameaux , qui s nt deux
jours privilégiés. La plupart ne mangent qu'un peu
d'herbes et de Iégumes. On leur permét les
buitre~
et les coquillagcs , les écrevisses et autres poissons
qui n'ont point de sang, et qui s'attachent aux ro–
chers. Ils sont si rigides dans l'abstinence d'reufs, de
heurre, de laitage , qu'étant malades
:J
ils aiment
mieux se laisser mourir que de
la
violer. On ne sait
ee que e'est que d'accorder des dispenses, de quelque
considération que soient les personnes qui les de–
mandent, et pour quelque raison que ce soit. Je
vous avoue, mon révérend pere, que cette sévérité,
peut-~tre
outrée, peu_t-etre déplacée, me fait faire
souvent d'affiigeantes réflexions sur l'audacieuse li–
berté avec laquelle on insulte aujourd'hui en France
a
ces saintes lois.
Une des choses qui inspire aux Orie-ntaux le plus
d'aversion pour l'Eglise romaine, est le relachement
m\ ils se persuadent faussement qu'elle nous
entr~
ti~nt
sur ce point.
Qu~lque
mal fondée que soit cette
é\Version, je ne voulus pas l'augmenter: elle eút été
ex.tl'~me,
s'ils eussent vu un religieux comme
PlOi .
aussi immortifié que les séculiers; et malgré toute
ma régularité, il
y
avoit encore parmi les passagers
des gens qui ne me regardoient pas de bon reil, et
qui n'écoutant que leurs préventions, ne pouvoient
se persuader que je fusse fidele
a
ces ohservances.
Un jour que j'invitai une personne du vaisseau
a
venir manger avec moi un peu de riz assaisonné avec
d~
l'lmile' un jeune enfant de huit
a
neuf ans' quí
étoit,
a
ce que je crois' le fils d'un
pr~tre'
l'arréta'
et
lui dit qu'il prh garde
a
ce qu'il alloit faire
~
c¡u.a
T.
J.
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