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CAN

Celui-ci plus furp_ris.

qu'e~rayé

d'une itruption

fi

fu–

bite, fit une forue 1mprevue, entra dans le camp

'de

Canut,

jetta par-tout le défordre

&

l'effroi; Val–

demar' de fon coté ' fit des prodiges de bravoure; on

n'accorda aucun qua.rrier aux vaincus ,

&

la haine

de Suénon n'eftt pas épargné

Canut

s'il fut tombé

entre fes mains. Il alla porter fes malheurs

a

la cour

de l'empereur, qui le rec;ut avec une compaffion

politique. Il

y

avoit long-tems que les Céfars jet–

toient fur le Danemarck des regards ambirieux;

Canut

plus jaloux d'arracher un rrone

a

[oo rival

que de le poíféder lui- meme '

&

comptant pour

ríen la honte d'etre efclave d'un empereur, pourvu

qu'il ef1t d'aütres efclaves fous lui , offrit

a

Fredé–

ric I de fe reconnoitre vaífal de l'empire, s'il pou–

voit le faire rentrer dans fes états. Le monarque

{ourit

a

cette propofition'

&

ne voulant point aban–

donner au hafard des combats le fucces qu'il fe

prometroit, peu fcrupuleux d'ailleurs fur le choix

des moyens, pourvu qu'il réufsit, il propofa

a

Sué–

non une entreVLLe

avec

Canut,

prit le titre de média–

teur,

&

affeél:a le défintéreífement le plus généreux.

Suénon

&

Valdemar , pleins de cette confiance

qu'infpirent de grands fucces

&

.un grand courage,

fe rendirent

a

Merfebourg fans efcorte. Alors Fre–

déric leur dit qu'il ne les avoit appellés que pour

recevoir d'eux l'hommage qui lui étoit dft par les

vaífaux de l'empire; que

Camtt

plus docile s'étoit

acquitJté de ce devoir,

&

qu'il falloit le remplir, o u

perdre tout efpoir de retour en Danemarck. Les

princes céderent

a

la néceilité

~

&

firent un ferment

contre lequel ils réclamerent des qu'ils furent libres.

Le jeune Valdemar, moins ambitieux que Suénon,

l'engagea a céder

a

Canut

quelques terres difperfées

dans le Danemarck: la difi:ance des domaines qu'on

lui laiífoit rendoit fa révolte plus difficile; Suénon

y

confentit; JJ:?ais,

~i~nto~ corr~mpu

par l'yvreífe,

qui fuit les proípentes,

Jl

opprxma

&

fon peuple,

&

Camtt,

&

Valdemar lui-meme. Les deux mal–

heureux fe réunirent contre leur ennemi commun;

ils firent entr'eux un partage des états clont ils étoient

chaífés. Valdemar fut reconnu roi par

Canut,

& ,

Ca·

nut

par Valdemar. Enfi.n apres bien des viél:oires &

des défaites, des négociations échouées, renouées,

rompues, reprifes eneore, on · convint du partage

du Danemarck; on laiífa les ilesa

Canut.

Le fucces

de cette entrevue fut célébré par des fetes publiques.

Les deux princes auroient dft trembler de la facilité

avec laqueHe l'ambitieux Suénon leur abandonnoit

les deux plus beaux fleur0ns de fa couronne ; les

careífes dont il les combloit en fe dépouillant ainfi

pour eux, devoient leur infpirer de nouvelles al–

larmes; mais Valdemar jeune

&

généreux, étoit in–

capable de {oupc;on.

Canut

étourdi par une profpé–

ri.té

íi

inattendue, ne voyoit, n'entendoit rien. Sué–

non, l'an

1 1

57' les convía

a

un fefiin magnifique :

ils s'y rendirent :

Camtt

fut aífaffiné; Valdemar

échappa aux bourreaux, tandis qu'Abfalon, fon mi–

nifire

&

fon ami, rec;ut

Canut

mourant dans fes

.bras, croyant

y

recevoir fon maitrt, défendit long-

teros fon cadavre palpitant,

&

l'emporta du théa–

.tre

Otl

fe paífoit cette fcene .funefie.

Canut

éroit un

prince fans vertus

&

fans vices; plus

opini~hre

que

courageux, malheureux fouvent par fa faute, il al–

téra, par la Hicheté avec laquelle il reconnut l'em–

pereur pour fon maitre, l'intéret que fes revers au–

roient infpiré. 11 laiífa deux fils légitimes, Nicolas

qui fut faint, Harald qui fut chef de parri, un

fi.ls

naturel, Valdemar, qui fut éveque,

&

deux filles

qui, malgré les infortunes de leur pere, trouverent

des alliances illufires.

(M.

DE SACY.)

,

CANUT

V[,

furnommé

Le pieux,

(

Hijl. de

Dane–

mart:k.)

roi de Danemarck , étoit fils de Valdemar

I , qui furvécu t a l'infortuné

Canut,

&

au

perfi.de

CAN

Su~non;

&

qui, par la douceur de fon gouverne–

ment, effas:a

ju_fqu'~ux tr~ees

des m?lheurs que la

guerre des tro1s r01s avolt caufés. Elevé fou les

yeux d'un fi grand prince, partageant avec lui le

fa~deau des affaires, apprenant de lui l'art de faire des

heureux,

Canut

ne pouvoit etre un tyran. Valdemat

l'avoit défigné pour fon

fucc~:lfeur:

mais apr€s la

mort du pere en

1182,

les Scamens, peuples enclins

a

la révolte, vexés par les intendans de Valdemar

qui l'avoit ignoré, échauffés par Harald, prince dtt

fang Danois, qui che.rchoit a troubler l'état pour

faire époque, refufereldt de rendre hommage

a

Ca–

nu.t VI.

Ce prince, qui vouloit fignaler fon avéne.–

ment au trone, par un aél:e 9-e c1émence, leur en–

voya l'éloquent Abfalon (

Voyez:

ce mot) pour leur

offrir une amniftie,

&

les ramener a leur de voir par

les voies politiques. Elles ne réuffirent pas; il fallut

en venir aux mains. Harald vaincu par-tour, pour–

fuivi de retraite en retraite, alla mourir en Suede,

&

la révolte sléteignit avec luí. Peu de fang avoit coulé

dans cette guerre;

&

la nature avoir fait pour

Cartut

les frais de la viél:oire ,_dans la bataille qui fe donna

fur les bords de la Luma; un ouragan affreux s' ' leva

tout-a-coup ' dirigeant fa C0urfe du coté des Sca–

niens, enleva les boucliers des pius foibles, mit les

plus robufies

J.at<

1S l'impoffibilité d'en faire ufage;

&

les laiífant expofés fans armes défenfives

a

tous

les traits des royalifies, les contraignit de faire une

retraite précipitée. La clémence de

Canut

s'étoit laf..

fée; il vouloit abandonner la province au pillage ;

mais Abfalon défendit les vaincus contre la fureur

de fon roi, comme il avoit défendu fon roi

~.ontre

la fureur des rebelles.

Leur ü!diti0n avoit été fecrettement fomentée par

Fréderic Barberouífe, qtÜ vouloit faire fentir

a

Ca–

nut

VI

la néceffiré de fe reconnoitre fon vaílal, a

fin

d'obtenir l'appui de la puiífance impériale. Ill'invita

en

1188'

a

venir renouveller

a

fa cour cette invio–

lable amitié qui l'avoit uni, difoit-il,

a

Valdemar fon

pere : il ne falLoit pas une politique bien profonde;

pour pénétrer le deífein de l'empe:eur : l'exemple

de Suénon

&

de Valdemar fuffif01t pour inftruire

Camu.

ll différa fon voyage fous différens prétextes.

Frédéric prit ces délais pour un refus; la chimere_de

'de la monarchie univerfelle, prefque réalifée par

Charles-Quint, commenc;oit

a

:flarter des -lors

les

ambitieufes efpérances des empereurs. Leurs liai–

fons avec les papes les accoutumoient

a

fe regar..;.

der, ainíi que les pontifes;, comme les maltres de

l'univers. Frédéric écrivit

a

Canut

avec ce fiyle im–

périeux, dont fe fervoit leur. fainteté, lorfqu'elle

daignoit écrire aux rois. Il lu1 manda que, s'il ne

venoit lui faire hommage de fes étars, il alloit en

difpofer en faveur de quelque prince mieux ínflrnit

de fes devoirs.

Canut

répondit

~<

qu'avam de donnet'

,

le Danemarck , il falloit le prendre ; puis miHant

H

la plaifanterie

a

la fermeté' il ajouta que,

íi

Fré–

H

deric vo,uloit lui céder la moitié de fon empire,

H

il s'avoueroit fon vaífal pour cette partie

» •

Ce,.

pendant Valdemar., auffi eíclave des promeífes de

fon pere que des fiennes , lui envoya fa {ceur,

~gée

de fept ans, que Valdemar avoit promife

a

Frédé..o

ric duc de Souabe, fecond fils de l'empereur.

Canttt,

peu inquiet dn c&ré de l'Allemagne, pa:ífa ert

Juthland, oit quelques troubles avoientrendus fa pré–

fence néceífaire: Bogiflas, duc de Poméranie, créa–

ture de Barberouífe ,

&

qui avoit juré d'arracher les

armes

a

la main' l'hommage que le roi refufoit

~

l'empire, faífit cette c1rconfiance, équipa une flotte:1

&

prépara une irruption dans l'ile de Rugen, dont

le prince étoit vaífal du Danemarck. Abfalon qui

p enfoit qu'un bon minifire peut, fous un bon roí

j

agir par lui•meme, n'attendit pas Jes ordres de

Ca–

nut;

il arma une flotte, attaqua 'elle de BogiJlas, la