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CON

la dil'convenance de fes propres idées. Car

Í'i

nous

.-éfléchiJfons fur notre maniere de penfer, nous trou–

vcrons que quelquefois l'cfprit

apper~oit

la conve–

tJance ou la difconvenance des deux idées, immédia–

inent par elles-m@mes,

{ans

l'intervention d'aucune

.autre; c'eíl-Ia ce qu'on appelle

comzoif!ance intuitive.

L'efprit ne fait aucun effort pour failir une telle véri–

té ;

ill'apper~oit

comme l'reil voit la lumiere. Cette

~onnoiffance

eíl la plus claire

&

la plus certaine dont

la foiblelfe humaine foit tapable. Elle agit d'une ma–

niere irréíiilible' fetnblable

a

l'éclat d'un beau jour;

elle fe fait voir immédiatement ,

&

comme par force,

des que l'efprit fe tourne vers elle, fans qu'illui foit

poffible de fe foufuaire

a

fes rayons qui le percent

de toutes parts. C'efr-la le plus haut degré de cerri–

tude, o1t nous puiílions prétendre. La certitude dé–

pend li fort de cette inntition,que dans le degré fuivant

de

connoi.ffanct,

queje nomme

démonjlracion,

cette in–

tuition eíl abfolument néceífaire dans toutes les con–

hexions des idées moyennes; deforte que fans elle

ñous ne faurions parvenir

a

aucune

connoijjfznce

ou

certirude.

Il fe l'réfente ici une queílion, favoir li parmi les

~onnoiJJances

intuitives !'une eíl: plus aifée

a

formet

que l'autre.

Il

ne paro!t pas d'abord que cela puiífe

fe faire; car la

connoi.f!ance intuitive

ne confiíl:ant

qu

'a

décou

vrir

d'une fim.fle Vlle ,

tellt chofi

ejltelle

chofe,

toutes les

connoijjance.s in.tuicives

devroient ,

ce me femble, etre également aifées

a

difccrner.

11

eíl: vrai, qu'il eft égalcment aifé de voir le rap–

port qu'a une chofe avec celle qui eíl: la meme en

reífemblance ; c'eíl-a-dire,

a

rrouver la parfaite ref–

femblance entre deux aétes de notre efprit, qui ont

précifément le meme objet : mais certain ob¡et eíl:

plus aifé a découvrir que l'autre;

&

un objet limpie

s'apper~oit

plus aifément qu'un objet compofé.

Lorfque deux t ábleaux repréfentent parfaitement

le meroe objet; li l'objet de ces deux tableaux n'efr

qu'un feul perfonnage , je verrai plus aifément que

les deux tableaux repréfentent le meme fujet' qne li

l'objet dans les deux tableaux étoit compofé de dif–

férens perfonnages: la facilité ou la difficulté ne

tombe done pas fur l'identité de rapport entre !'un

&

l'autre, mais fur la multiplicité des objets partiaux,

dont eíl: compofé chaque objet total. L'objet total

ne pouvant s'appercevoir d'une limpie vue ' deman–

de en quelque Corte autant d'attentions différentes

de l'efprit, qu'il fe trouve d'objets partiaux

e!;

un coté:

entre chacun defquels il faut voir le rapport avec

chacun des objets partiaux qui font de l'autre coté.

La

connoijfanct

démonfuative

&

de raifonnement

conliíle dans la reífemblance, ou identité d'idées

que l'efprit

apper~oit

en deux objets , dans l'un

del~

quels fe trouve quelque modification d 'idées qui ne

(ont

pas dans l'aurre: au lieu que s'il ne fe rrouvoit

ni dans l'un ni dans l'autre , nulle modification cl'i–

dées, ou nulle id

ee parti

culiere différente; alors la

connoiflñ.nce

feroit

intuit.iv'

,

&

non pas fcu.lement

de–

monjlraúve

ou

conjonélive,

quoique la démonílrative

fuppofant l'intuirive, doive la renfermer par certain

endroit. Lorfque

don~

dans un des deux objets il fe

trouve qnelque modification d'idées q_ui ne font pas

dans l'autre, l'efprit a quelquefois beío;n, pour ap–

percevoir leur convenance ou leur difconvenance,

de l'intervention d'ane ou de plufteurs autres idées;

&

c'eíl ce que nous appellons raifonner ou démon–

-trer. Ces idées c¡u'on fait intervenir pour montrer la

convenance des deux autres, on les nomme des preu–

ves;

&

c'efr de la facilité, qu'on a a trouver ces idées

moyennes qui montrent la convenance oula difcon–

venance de deux autres idées, que dépend la Caga-

cité de l'efprit.

.

Cette efpece de

connoij[ance

ne frappe pas li vtve–

ruent ni

fi

fortement les efprits , que la

connoiffance

.Tome iii,

CON

imuitl-ve.

Ene ne s'acquien que par cellx qui 3'appli–

qu~nt

fortement

&

fans relikhe, qui envi íagent leur

ob¡et par toutes fes faces,

&

qui s'cngagent dans une

certaine progreffion d'idées, dont tout le monde n'eíl:

l'as capable de fuivre le fil auffi long-tems qu'il eíl

·néceífaire pour déwuvl'ir la vérité.

Une at\tre différence qu'il y a ehtre la

connoif–

Jan,ce

intuitiv~.

&

la

connoij[ancedémohfrrative:J

c'eft

qu encore qu ti ne refre aucun doute dahs cette der–

niere, lorfque par l'intervention des idées moyen–

n es on

apper~oit

une fois la convenance ou la dif–

convenance des idées qu'on conlidere, il y en avoit

avant la démonílration ; ce qui dans la

connoifJan–

ce

intuitive ne peut arriver

a

un efprit attentif.

n

eíl: vrai que la perception qui eíl produite par voie

ae démonfrration , efr auíli fort claire : mais cette

évidence

eíl

bien différente de cette lutniere écla–

tante qui fort de la

conMij[ance

inmirive. Cette pre–

miere perception , qui efr produite par voie de dé–

monftration, peut Ctre comparée

a

l'image d'un vi–

fage réflechi par plulieurs miroirs de !'un

a

l'autre_

Auíli long-tems qu'elle conferve de la reífetnblance

avec l'objet, elle produit de la

connoijfance ,

mais

toujours en perdant ' achaque réflexion f·ucceílive'

quelque patt1e de cette parfaite clarté qui eíl dans

·I,a

J'~en~ier;

image, jufq.u'a ce

qu'~nfin

aptes

a

voir

ete elotgnee plulieurs fots elle dev1erit fo rt conftúe,

&

n'eíl plus d'abord li reconnoiífable ,

&

fllr·tout

a

des yeux foibles.

Il

en eíl de meme <'l l'égard de la

connoijfance

qui eíl produite par une longue fui re de

-preuves. Quand les conféquences font li fort éloi–

gnées du J'rincipe dont on les tire , il faut avoir une

certaine etendue de génie pour trouver le nreud des

objets qui paroiífent defunis ; pour failir d'un coup

d'reil tous les rameaux des chofes; pour les réunir

a

leur

fou~ce

&

dans un €entre commun,

&

pour les

méttre fous un m@me point de vCte. Or cet1e difpo–

fition eíl extremement rure,

&

par conféquent aulli

le nombre de ceux qui peuvent faili r des démoníl:ra–

tions compLiqLtées ,

&

remonter des conféquences

jufqu'aux principes.

Mais pourquoi certaines conféquences font-elles

plus éloignées que d.'autres du principe dont on les

tire t outes?

Voici fur cela les raifonnemens du pere Buffier.

II

fuppofe d'abord que le principe eíl: une

connoiffance

donr on tire une autre

connoif[ance

,

qu'on appelle

conflquenct.

Une premiere

conno{/Jiutce,

dit-il ,

fert

de principe

a

une feconde

connoijfance

qúi en eíl: la

conféquence , quand l'iclée de la premiere contient

l'idée de la feconde; enforte qu'il fe trouve entre

!'une

&

l'aun·e une idée commune , ou femblable,

-ou la meme idée. Cependant la premiere

connoiffance

renferma outre cette idée commune, d'autres idées

particulieres ou circonílances

&

modifications d'i–

dées , lefquelles n·e fe trouvent pas dans la feconde

connoifJance:

or plus la premiere; qui fert de prin–

cipe, renferme de ces idécs parri.cul.ieres di'fférentes

dé l'idée qui eíl commune au pnnctpe

&

a

la con–

féquence, plus an:J! la

conf~quence e~

él?ignée :

moins elle efr chargee de ces tdées parnculteres ,

&

moins la conféquence efr éloignée.

Ce qu1unit done

b

conféquence au principe, c'ell:

une idée commune

a

l'un

&

a l'autre: mais cette idée

•commune eíl enveloppée, dans le príncipe; de mo–

difications, patmi lcfi¡uelles il eíl plus difficile dans

k s conféquences éloignées, ele reconno!tre

&

de dé·

meler cette idée commune; au lieu que dans les con–

féquences prochaines, l'idée commune n'efl accom–

pagnée dans le principe , que d'un petit nombre. de

modificailons particulieres qui la lái.lfent plus atfé–

ment difcerner. Une épingle ne fe trouve pas auíli

faciletnent dans un ras de foin , que dans une bolte

ou

i,).

n'y

am·a

que cene épingle

a

vec une

aig~lle;

y

Vvvv

'J