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CON

'r'<s

auffi certaines ,

fi

tes vices, les paffions, des in–

tér~rs

dominaos, ne s'oppofoient direfiemenr

3:

l'e–

xécution d'une telle enrreprife.

L'idée d'un Etre fupreme, infuü en puilrance, en

bonté , en fagelre, qui nous a fairs,

&

de qui nous

dépendons ;

&

l'idée de nOJlS - memes comme de

créarures intelligentes

&

rai(onnables : ces deux

idées; dis- je; b1en approfondies

¡

condu.iroient

A

des

conféqt~ences

fur nos devoits enversD\eu, auffi.

nécelraires

&

auJii lntimemcrft liees, que tomes

le~

conlequences qu'on tire des pr:incipes Mathémari–

ques. On auroit du jufte

&

de l'iojufie des mefores

auffi précifes

&

auffi exafies que celles que nous

a vons du nombre

&

de1'étendt¡e. Par exemple, cette

propofttion;

il

ne Jfauroit

y

a-yoir

dt l'injujlice, oii il

ny

a

poi

m de

propriété,

efr au.ffi certaioe qu'aucune

démoofrtation qni foit dans Eudide ; car l'idée de

propriétl

étant un droit

a

une certaine chofe'

&

l'idée.

qu'on déligne par le nom

d'inju[lice,

étant l'invafion,

ou la víolaúon d'un droit; il évident que ces idées

étant ainli déterminées,

&

ces noms leur étant atta–

chés, je puis conno1tre aufli certainement que cette

propof1tion eft véritable, queje connois qu'un trian–

gle a trois angles égaux

a

d~ux

droits. Autre propo–

fttion d'une égale certitude,

nu.L gouvunement n'accor–

une abfolue liberté;

car comme l'idée de

gOJweme–

mmt

efi un établitrement de fociété fur cenaines re–

t;les ou

lois

dont il exige l'exécution,

&

que l'idée

d'une abfolue liberté emporre avec elle le droit de

faire tour ce que l'on veut; je puis etre auffi certain

de la vérité de cette propoíition, que d'aucune qu'on

trouve dans les Matbémathiques.

Ce qui a donné

a

cet égard l'avantage aux idées

de quantité , c'efi :

1

°.

Qu'on peut les repréfenter par des marques

fenlibles , qui ont une plus grande

&

plus étroire cor–

refpondance avec elles, que quelques mots ou fens

qu'on puitre imaginer. D_es

figur~s ~acéc~

fur lepa–

pier font autant de coptes des tdees qu on a dans

l'efprit' & qui ne font pas fujettes

a

l'incertitude que

les mors ont dans leur lignific:nion. Un angle, un

cercle, ou un quarré qu'on trace avec des lignes ,

paro!t ¡\la vue' fans qu'on puitre s'y m ' prendre' il

clcmeure invariable'

&

peut

~tre

conlideré

a

loiflf;

on peutrevoir la démonfiration qu'on a faite fur fon

fujet,

&

en conlidérer p1us d'une fois tomes les par–

ties , fans c¡u'il y ait aucun danger que les idées cban–

gent lem01nsdu monde. On nepeutpas faire la meme

chofe

a

l'égard des idées morales ; car nous n'avons

point de marques fenúbles qui les repréfentent,

&

p ar oh nous puiffions les expofer aux yeux. Nous

n'avons que des mots pour les exprimer; mais quoi–

que ces mors refient les

m~mes

quand ils font écrits,

cependant les idées qu'ils lignifient, peuvent varier

dans le meme homme ;

&

il eft fort rare qu'elles ne

foient pas différentes en différentes perfonnes.

2

°.

Une autre chofe qui caufe une plus grande

diffintlté dans la morale, c'efi que les idées morales

font ordinairement plus complexes que celles des

figures, qu'on

coníid~re ordinairem~nt dan~

l_es Ma–

thématiques ; d'oll naiÍfent cesdeux mconventeos: le

premier, que les noms des idées morales ont une fi–

gnification plus incertaine,

.Pare~.

qu'on ne

convi~.nr

pas

li

aifémcnt de la colleihon d 1décs fimples qu

ils

ftgnifient précifément;

&

par conféquent le figne

qu'on mct ro(\jours

a

leur place ' lorfqu'on s'entre–

ttent avec d'autres perfonnes ,

&

fouvent en médi–

tant en foi-meme, n'emporte pas conftamment avec

lui la meme idée. Un antre inconvénient qui na!t de

la complication_tles. i?ées morales, C:efi_que

l'efp~t

n e fa uroir retemr a1fement ces cotnb1na•fons préc•–

fes d'une maniere auffi exalte

&

auffi parfaite qu'il

efi nécelraire pour examiner les rappons, les con–

venances, ou les difconvenances de plulieurs de ces

e o

N

s95

i~ées

comi?arées l'une

a

l'autre;

&

fttr-tout lorfqu'on

n en ,Peut

¡uge~

que par de longues déduétions,

&

par 1mtervennon de plulieurs autres idées comple–

xes, dont on fe fert pour montrer la convenance de

deux idécs éloignées.,11 c:fi

d~n.c

cenain que les véri–

rés morales ont une etrotte liatfon les unes avec les

autres, qu'cUes découlem d'idées claires

&

diílinc–

tes par des conféquences nécelraires,

&

que par con–

féquenr elles peuvent erre démontrées.

J

0

Quant

a

la

connoiffance

que nous avons de l'c–

xifience réelle

&

afruelle des chofes, elle s'étend fut'

?ea~c.oup

de chofes. Nous avons une

connoif!ancl

mrumve de notre exifrence ,

voy<{

le

D i[collrs Pr/.>

/iminain

~

une

connoi.Jfance

démonfirativ

e de l

'exif–

t~nce

de Dieu;

voy<{

DTEo: une

connoij{

tm.ct

feníi~

ttv~

.de t?us les objers qui frappenr nos tens;

&

une

tefti~oru~le

de pluíieurs évenemens qui font

parve~

nus ¡túqu

a

nous ' a-travers l'efpace des fiecles purs

&

fans altération.

Yoy<t

VtRITÉ.

'

11 eft coofiant , par tout ce que nolts venons de

dire, qu'il y a des

coiUWiJTancts

cenaines, puifqué

nous appercevons de la convenance ou de la dif–

convenance entre plufieurs de nos idées. Mais ton–

tes nos

connoif!ances

f.Qnt-elles réelles? qui peur fa"

voir ce que font ces iáées, dont nous voyons la con•

venance ou la difconvenance? y a-t-i! nen de fi ex–

travagant que les imaginarions qui fe formen! dans

le cerveau des hommes

?

Otl

eft celui qui n'a pas

quelque chimere dans la

t~te?

&

s'il

y

a un homme

d'un fens raffis

&

d'un jugement tour-a-fait folide

quelle diiférence

y

aura-t-il, en verru de nos regles'

entre la

connoijfance.d'un

re! homme

&

celle de l'ef–

pritle plus extravagant du monde? lis ont rous deux

leurs idées;

&

ils apper,oivent tous deux la conve–

nance ou la difconvenance qui efi entre elles. Si ces

idées

di~er~nt

par

~l eiqu,~ en~roit_,

tout l'avanrage

fera ducote de celut '{'-"a l•magina[lon la plus échauf–

fée, paree qu'il a des 1dées plus vives

&

en plus grand

nombre; de forre que felon nos propres regles, il

aura a

u~

__plus de

connoij{ance.

S'il eft vrai que toute

la

connoiJJane<

confifie dans la perception de la

con~

venance ou de la difconver!ance de nos propres

idées, il

y

aura autant de certitude dans les vilions

d'un enrhouliafte • que dans les raifonnemens d'ttn

homme de bon fens .

JI

n'importe ce que les chofcs

font en elles-memes, pourvil. qu'un homme obferve

la convenance de fes propres imaginations,

&

qn'il

parle conféquemment; ce qu'il dit efi certain, c'efi

la vérité route pure. Tous ces chllteaux bStis en l'air

feront d'auffi forres rerraites de la vérité , que les

démonfirations mathématiques. Mais de que! ufage

fera route cene belle

connoijfanu

des imaginarions

des hornmes '

a

celui qni cherche

a

s'infiruire de la

réalité des chofes ? qu'importe de favoir ce que font

les fanraifies des hommes? ce n'efi

~ue

la

connoij¡;m–

ce

des chofes qu'on doit efiimér; e efi cela feul qui

donne du prix

a

nos raifonnemens,

&

qui fait pré–

férer la

conn<>ij{ance

de ce que les chofes fonr réelle–

ment en elles-m@mes

a

une

connoiffánce

de fonges

&

de vifions. Voila la difliculté propofée dans route fa

force par M. Locke. Voici comme il y répond.

Si la

coiUWijfance

que nous avons de nos idees fé

termine

a

ces idées fans s'étendre plus avant lorf–

'l.u'on fe propofe c¡uelque chofe de plus , nos plus fé.

r1eufes penfées ne feront pas d'un beaucoup plus

grand utase que les reveries d 'u

n cerveau d

éréglé

1

&

les véntés fondées fur cene

connoijfan.ce,

ne fe–

r.ont pas d'un plus grand poids que les difcours d'urt

homme qui volt clairement les chofes en fonge,

&

les débite avec une extreme confiance ;

veltu

.rgri

fomnia , vantr fingenturfpaies.

11 efi évident que l'efprir né conllOit pas les cho–

fes immédiatemenr, mais par l'intervention des idées

qui les lui repréfentent;

&

par cooii quent nowf