CAN
ilent
(e
rompre ,
&
ou l'hyver, ave' toutes
fes ri–
gueurs, durc: au rnoins fept mois; cependant ii n'y a
point d'endroit ou l'on arrofe le, terres avec plus de
foin ,
&
dont on tire un meilleur parti. De meme
clans les Pays-Bas , oi'l !'on laic que les eaux font en
grande abondance, on n'e!l: pas moins attentif
a
-re–
medier au rnrt que peuvent caufer les grandes feche:
relfcs en remplilfant d'c:au Jes fo!les ou
wat~rgans
dont
les campagnes font coupees, afin de Jes rafraichir par
tranfpiration.
Si da n' des climats
Ii
dilferens on a befoin de
ca–
naux d'arrofage ,
on peut concl ure qu'il y en a peu oi'l
ils ne to•cnt abfot ument necelfaires. En elfet , efl:-il
rien de plus avancageux que de pouvoir convenir les
terres labourables en pres ,
enfuite les pres en terres
labourables. O!tnd on peut changer en prairie une
· p iece: de cerre fatiguee de porter du bled, elle en de–
vient bien meilleure quelques annees apres, pourvu
q u'on la puilfc: arrofer. De meme quand la terre d'un
pre vient
a
s'emouffer, ce qui ell:
~n
figne cerrain
qu'dle fe lalfe, la remettant en labour pendant quatre
ou cinq ans, el le produit enfuice du bled en abon–
dance. D'autre part, cette mutation donne lieu d'en–
tretenir
&
d'elever beaucoyp de beftiaux, done on
connoic affez la neceffice.
Ri~n
ne prouve mieux l'utilite quc: l'on peut tirer
des
canaux d'arrofage,
que l'exemple qu'olfre la plaine
de la Crau en Provence, entre Aries
&
Salon. Cette
plai ne forme une ecendue de pays de fepc
a
huit lieues
de long fur trois
a
q uatre de large; elle a pour ca–
pitale Salon,
&
confine au terricoire d' Aries done elle
fa
it parrie : Its anciens
l'appelloient
campus /apideru ,
parce qu'elle efr tellement couverte de pierres, qu'on.
n'y voit prefque point de terre
(
c).
Peyrefc ,
cei
horn.
me celebre qui encouragea tous Jes arts '
&
qui rellffit
dans
tout~s
les fcic:nces , croyoit que la quantite de
pierres qu'on voit dans la Crau"d'Arles , venoit de ce
que cecce plaine avoit ere autrefois
inondee pendant
long-rems par la D urance ou par I<:! Rhone qui y avoit
depofe un germe pierreux , dont routes ces pierres
s'etoient formees en fe coagulant
a
la longue.
~oi
qu'il en foic, la Crau d'A rles ne doit
fa
fercilice
ntl:udle qu'au
canal
ou
val/at de Craponne,
ainli ap–
pellee du nom de fon auteur,
&
la majeure partie de
cetce plaine a entierement change de face.
Adam de Craponne, plaifamment nomme
Pal/at de
Crapon11e
au
mot
SALON clans le
Difliomzaire
raif. des
Scimm
(
vallat veur dire en Proven\:al ,
Joffe,
p~til
ca–
nal ,
a
va!!o),
contemporain de No!l:radamus
&
ne dans
la meme ville,
fe
diftingua fous Henri II. par fos
con–
noilfances dans la mechanique hydraulique,
&
fut un
des plus habiles ingenieurs de fon terns. II fit ecou–
ler les eaux croupiffantes de Frejus ,
ce
qui rend it l'air
de cette ville plus fain; ii avoir encrepris de joindre
les deux mers par
le
centre du royaume ,
&
Henri H .
le prfferoit
a
tous les
ingenieurs que Catherine de
M 'dicis
avoit
a~enes
d'ltalie, .Prffere.nce qui
lui
fut fatale par la ploufie des l rahens qui l'empoifon–
nerent
a
l'age de. quarante ans. Cec ingenieur ayant re–
connu
par des n;vellemens que la Durance, prife pres
du village: de la Roque un peu au-de!fous de Cade–
net
a
fix lieues de fon embouchure dans le Rhone
etoit de beaucoup fuperieure
a
la plaine de la Crau :
ii
en
fit
deriver en 1558 le vallat ou
canal
de fon
nom, le fit pa!for par les campagnes de Salon
fa
pa–
trie, de Gran, d'lftres ,
&c.
Ce
caJtal,
apres avoir ar-
(c) C'cft dans ce champ pierreux, que la fable place le com–
bat ll'Hercule contrc lcs geans , enfans de Neptune, ou plu–
tot contre les Liguriens ,
&
fuppofe que J upiter fon pere fit
~omber
une pluie de picrres , pour Jui fournir les armes dont
1~
manquoit. Sans rccourir
a
la fable, ni
a
la fauffe cxptica–
tion de Peyrefc , ii tfl vraifemblahle que la mer ayant forme
u_n golfe dans ce lieu, y a dcpofe cette grande qu:mtite de
p1erre• roulees qu'on y trouve. Ce qui femble continuer cette
id•e, c'etl
_!:
g~~rnl
nombre d'etangs fates qui y fon t; re–
mar
e tlcp fa11e par Strabo.n , au /,
IV.
de
fa
Gio?raphie
1ome
JI!
~
'
CA N
r77 .
ro(e !es terroirs de Cabane
&
de Noves, traverte lur
un aqueduc le territoire d'Arles,
&
vient abuurir dans
le
Rhone
a
un
quart de
li~ut
de la partic:
m~rid1onale
de cerce ville , apres avoir fai t tourner plufieurs mou–
lins; cc qui paroir alfez curicux , ell: de
vuir
qu'au-drf–
fous de ce
canal d'arrofage
a
l'endroic de l'aqueduc, palfe
un autre
cairal
pour
l'ecou1vment des e,rnx do pays.
L e
canal
de Craponne n'efr point navigable, n'ayani;
que dt:ux
a
trois picds de largeur lur tr
ois de pro–fondeur; tout petit qu'il ell: . 11 produit neanmo.ns
des richelfes confiderabks 'fur une etendue de <louze
lieues de longueur. O n ell: parvenu , · par un grand
nombrt: de rigoles
tranfverfaks,
a
faire naitre l'abon–
dance dans un canton qui n'c:n avoit pas paru lulte–
ptible. On y a feme du bkd dcpu1s dans les cnd1 01ts
Jes plus favorables ,
&
les aum:s produ1fent, cncre
Jes cailloux,
UC
l'herbe fucculente , fervant
a
nOtlf~~
un grand nombre de croupeaux. Cet exempk fc:rv1 ra
·toi'.1jours d'encouragement pour tenter un ptojet plus
vafre
(d).
Le rneme Adam de Craponne , qui merita
li
bim
de
fa
patrie , avoit encore trace le plan d'un autre
ca_–
nat
d'arrofage
&
de navigation que le
farneux
l'q–
refc , ce M rcene de fon fiecle, voulut executer foixan–
te ans apres. II s'agiffoit de faire conduire
a
Aix , de
la D urance ou du Verdon qui fe jette dans cem::
ri–
viere; un
canal
qui eut rendu la capiralt:
flun!fante
&
riche par la facilite du debouche qu'il lui auro1t
procure, tant avec la haute Provence , qu'avec la mer.
Peyrefc ecrivit en Flandre en 1628 , pour avoir un
des ingenieurs qui avoit creufe des
canaux
dans
le
p~ys ,
&
qui meditoient alors le projet de faire: cornmuniquer
l'Efcaut avec la Meufe. L e
canal
eut ece execute aux
frais de Peyrefc, fi
la pefte, qui furvinc l'annee
lui–
vante '
&
les troubles de l'etat ' ne l'eu!fc:nt fair eva–
nouir. Puilfent de eels exemples
infpirer le dc:fir de
Jes imiter
!
· Comme ce dernier projet a eu beaucoup de
fuite
en P rovence, done on connoit
la !l:erilite des cam–
pagnes
a
caufe des frcquentes fechere!fes _qui
y
regnenc '
on me permettra d'en fuivre
le
Iii
h1Cl:or1que
avec
quelqu'erendue
(e).
Peu de rems apres Pc:yrefc, ii
y
eut, en 1.645 , un nouveau nivellc:ment ues
·c:aulC,
mais fans aucune fuite. Louis
X IV,
peu apres fon
voyage de Provence en 1662 , accorda, pour Ii::
me7
me objet , des letttes-patentes au fieur Colomby, qui
fit l'annee fuivante un nouveau nivellement. Ces kt–
tres font rapportees au
tome 11.
de
l'Hifloire de
Provm-
.(d)
M. l'abbe d'Expilly, particulieremenc inllruit de tour ce
qui concerne la Provence , remarque
a
ce mot que de–
puis Ja confcClion du
canal
dc-Craponne on a vu fuccedcr
aux lieux defens
&
incultes , de belles habitat">ns ,
Jc
vi–
gnobles , des prairies • des vergers complantes d'oliv1ers qui
donnent de ces bonnes huiles dans toute l'etendue quc le
canal
peut arrofer ; qu'on a obferve
qu'a
force d'arrofemens
Jes cailloux
(e
precipitent dans la tcrre,
&
que celle-c1pre–
nant le de!Tus on en tire le parti le plus avantageux; que
malheureufemcnt cc
canal
ne dGnnc pas autant d'cau qu'on
en fouhaiteroit, mais qu'il feroit aife de lui en fournir beau–
coup plus,
&
de deriver enfuite de ce
canpl
quantite d'au–
tres moindrcs
(ttnaux
qui parcourroient
&
f<rtiliferoient toute
la Crau ; qu'on pourroit alors
y
biitir des villages pour fcr–
vir de retraite aux habitans de
la
haute
Pro~ence
,
a
qui
lcs moycns de fubfillani:e manquenc aujourd'hui, depuis que
le defrichement des bois
y
a occafionne l'el>oulernent des
terres clans la fuite emportees par la force
&
con1i11uire des
pluies,
&t.
•
(e)
Ces memoires m'ont ete communiques par M. l'abbe de
Luminy, official de Marfeillc, favai>t aulli ctillingue par
fon zele pour le bien public que par
fa
modeflic
Cc:s
ra–
res connoi!fances.
Aya-nt
bien voulu s'affocier avcc moi paur
travailler
a
l'Hijlofre naltlrellcde la
vigne
&
dlS
vi111
quc
nous
avons cntreprife de co11cert,
ii
s'eft fair un pla1fir
de
me
communiquer
tout ce· qur concerne le
"'""I
de Proven–
ce. Le P. Bercier, de l'academie des f.;icnces , connu par
fa
Phy/ique du def ,
a eu la bonte de me fai re part de cc
qu'il favoit
Cur
le
ca
11
at
de Provence. Le JcCleur trouvera raf–
fc~ble
ici
en peu de pages Jc precis d'une infinite d'ecri1s
cuneu11
&
peu connus,
Z