q6 -
C AN
pk11t annuellrnient clepui_s le moi_s d'avril jufqu'a la
fin d'aout ; ce fkuve, qt11 en
re~o1t
Jes
ea~1x,
les ap–
portc en Egypte ou ii. ne pleut
pr~fqt:e pc·1~t.
II
c:-m–
mence
a
crolcre dcpt11s la fin de
JU!n, &
11 continue
de croim: jufqu'a la fin
de
frpcembrt; alors ii celfe
de
grollir ,
&
va tof1jours en diminuant pw dant
k s
mois d'oltobre
&
de non mbre , apres quoi
ii rentre
dans fon
lit,
&
prend fon cours ordinaire. Ce qu'il y
11
d'admirable, eft de voir que
penda~t
Jes
quacre mois
q tii fu ivenc cd 11i de juin, ks vents <lu nord-efl: fouf
fknt regulierement .
&
repoulfrnt
l'eau d u Nil q ui
s'ecouleroic crop vitc
a
la mer. Les voyageurs moder–
nes ant crouve routes ces obfervacions aflez conformes
a
cc que Jes anciens auteurs en one eerie. A uffi-tot
que
le
Nil eft retire ,
le
labomeur ne fait que retour–
ncr
la
terre en
y
melant un peu de fable pour en
diminuer la force; enfuite
ii
la feme ,
&
deux mois
apres elle
fe
trouve route couvene de grains
&
de
legume ; de forte que dans le cours de
l'annee , la
meme terre porte quatre efpeces de fru its differens.
Comrne la chaleur du foleil ell: extreme en E gypce,
l'h11rnidice que le Nil a caufee
a
la terre feroit bien–
tot delfechee fans
It
frcours des
cana11x
&
des refer–
voirs dont elle
elt
toute remplie, parce quc ks fai–
gnees que !'on a foin d'y faire fourn ilfent abondam–
ment de l'eJu pour arroler Jes campagnes. P ar-la on
a
trouve
le
moyen de faire d'un terrein naturellemrnt
fee
&
fablonneux, celui du monde le plus gras
&
le
plus fert ile.
Si !es Chinois font, comrne plufieurs favans le pre–
tendent, une colonic d'Egyptiens ,
ils ant du empor–
ter dans
leur pays la connoilfance de l'amelioracion
d t: !'agriculture par
le
moye n des
cana11x
d'arrofage ;
auffi cet art s'c:ft-il perfeetionne chez eux au point
que leur pays ell: devenu
le
plus ricbe,
le
plus fer–
t ile
&
le plus peuple de
tout l'univers. T oui:e
la
Chine erl: cou pee de beaucoup de rivieres,
&
fes ha–
bitans ingen·ieux font parvenus , pa·r un cranil im–
menfe ,
a
ouvrir dans toutes !es prairies
des
canau:.·
navigabks aux petits bateaux. De petites ecl ufes Cli–
fperfees fur ces petirs
ct111a11x
facil itent l'arrofement ge-
11fral,
&
on fait,
a
volonte , rentrer ces eaux dans leu r
lit. Ceux q ui font eloignes des rivieres
&
rnnaux,
&
q ui habitent k s montagnes , pratiquent par-tout , de
d i!l:ance en diftance
&
a
differences elevations , de
g rands rffervoirs pour amener l'eau
de
pluie
&
celle
q ui coule des montagnes . afin de la difl:ribuer egale–
.ment dans
l~u rs
parterres de riz. C'eft
a
quoi ils ne
plaignent ni foi ns ni fatig ues , foi t en lailfant cooler
l'eau par
fa
pente nacurelle <les
rffervoirs fuperieurs
dans Jes parterres !es plus bas : foit en t·a faifant mon–
ter <l'erage en etage jufqu'aux parterres Jes pl us ele–
ves , des
rCfervo1rs
inferieurs. !Is entendent
fi bien
l'agriculture
&
la diftribution des eaux, que la cul–
tun: du riz, cette nourriture fi fai nc
&
fi abondante ,
&
la multitude des
ca11a11x
ne Jes ex pofent jamais aux
m aladies qu'oot eprouvees ceuic qui ont elfaye de !cs
imiter en Europe. Ce dernier motif a fai t defend re la
culture du riz en France. A u moy<!n de l'arrofement
des cerres , !'agriculture ell: pollffee au dernier degre
de perfeetion en Chine
&
au J apon,
&
ii n'y a pas
un arpent de cerre q ui ne foit ferti le
&
cultivc. Ces
p euples ont les meilk ures loix poffibles,
&
celles qui
regardent !'ag riculture font adm irables. On peuc juger
des autres par celle-ci :
Celui qui lai.f!era pa.f!er tme an–
nle fans cultiver
fo11
champ
,
perdra Jon droit de propriiti.
//oyez
mon
'Iraiti de la mourure ico11omique.
Les Babilo111ens ,
&
ks ·peuples \•oifins du T igre
&
de l'Euphrate, tiroicnt j'ufqu'a cinquante
&·
cent pour
un de !curs rerres, parce qu'ils avoient !'art de deri–
ver J'eau de ces fleuves par des rigoles,
&
de !es con–
du ire dans leurs champ
enfemences par le moyen des
aqueducs (
b) ,
comme je l'ai obfave <lans ma dilfa.
(b)
On a conferv6 la meme cputume dans
la
P~rfe
,
&
CAN
tation latine fur ks principes phyfiques de l'ag"ricul-'
ture
&
de la vegetation. J e vais rappurter ici
le
paf–
fage de !'original.
Irrigatio e11im aquarnm jertilitatis fem–
pcr fuit ·i11dicium,
&
amfa
&
fine aq11is arida
·
omnis ac
niifera agriculrura.
Babil~ne
f.cpe
cum
quinquagfjimojrenor?
me.f!es reddebant an:a
,
quil!I rigabmztur Euphrald!
:
ibi verg
1·iga11di modus mt111u ltmperabatur. Nil enim fertilius qttam
Jolum irrigt1t1m qttia
'·
tit jam diximus , 'e terra
&
aqua
fit
mixtum fal111um verum plantis alimentum. S.ttpe etimii
aqua Jola
&
p11ra ad vegetationcm fujficit
,
ut videre eft
in experientiis f/a11hel111011tii, BoJlii , Bonnet , Duhamel ,
&c.
Sinenjis regionis f ertilitas
&
opes femper renafcentes debm–
rur canalibzu
&
aqu"' du&tibus ,
&c. &c.
Les Romains ,
a
!'imitation des E gypciens,
acqui~
rent beaucoup d'indurl:rie dans l'arrofage des terres.
Selon Caton
&
tous
Jes
anciens , la plus riche de tou–
ces Jes polfeffions eft un champ qu'on peuc arrofer par
Jes eaux,
folum irriguum.
Ciceron ,
I.
ojfic.
14 ,
rea-arde
\'irrigation des champs comme la caufe
premie~e
de
leur fertil ite,
&
ii la recommaride avec
fuin,
adde
dutlus aquarum , derh:atioms jl11mi11um , agrorum iYl"igatio–
ms.
On peut voir cecre maciere traitee avec ecendue
dans Vicruve.
A
pres la deftruaion de
!'Em
pin:, ks
lta!iens
confervere~t
l'ufage d'arrofer leurs campagnes •
fur-tout celles qui font voilines des montaones , parce
qu'elles fourniffcnt des fources abondances: done ii ne
s'agit plus que de menager
le
cours des eaux en Jes
foutenant
a
une hauteur convenable au chemin qu'on
veut qu'elles fa lfenr.
.
Les Suilfes, cc peuple fi
fenfe ,
&
qu'on accufe
-
avec tant d'injuftice d'etre encore groffier , puifq u'il
a_toujours
fo
fe conferver la liberte
&
la paix au mi–
lieu de l'efclavage
&
des guerres qui affiigent fans
celfe Jes aucres nations, puifqu' il faic fe procurer l'a–
bondance dans le pays
lc.o
plus ingrat
de
I'
Europe,
Jes
Suilfes , dis-je , one fu fc faire une fource inepui–
f• ble de richeffes par la dil1ribucion des eaux fur Jeur
fol aride. Si on veut voir un beau tableau de ce que
peut leur ind uftrie
a
Cet egard , qu'on
Jj(e
Je
traite de
I'
lrrigation des pres,
par
M.
Bertrand , mon illuftre con–
frere dans la fociete de Berne.
floyez
aufli le
mot
AcR1-
cuLTURE da ns ce
Supplimmt.
L a fertilice de la Flandre
&
des Pays.Bas e!l: due
a
la mulciplicice des
ca11aux
done ces pays font coupes
&
arrofes. E n France ,
Jes
habitans du Dauphine , ceux
de P rovence
&
d u R ouffillon ont aum acquis beau–
coup d'indu!lrie
&
·de connoi{fances pour bien mend-·
ger les eaux
&
!es diflribuer a p ror os.
II
y
a peu de pays q ui n'ait befoin d'etre arrofe ,
q udk q u'en fo1t la
fitu ation, parce que !es pluies–
viennent quelquefois
trop
tot ,
&
q uelquefois n op
ta rd,
& Jc
plus fouvent mal-a-propos , <l'Oll ii refulte
beaucoup de dommages aux biens de la campaone
cc qui caufe
q_u~lqudois
la .ruine de tout un pays'.
On. ne peut
r~med1er
au premier de ces inconvcniens,
ma1s on comge
le
fecund par le moyen des
cana11x
d'arrofage.
II n'y
a
guere de pays en F rance plus froid
&
plus Jt~et
a
l'humidite q ue le haut D auphine, parce
qu'il
d t
rempli de moncagnes chargces de neige pref–
que couce l'annee,
&
conm: k fq utlles
Jes
nuees
vicn~
la Babylonie; Jes Voyageurs nous apprenncnt
~u rappor~
de Fontenelle , dans
I'
doge
de
G uglialmini , qu'en Perle ,
la charge de
furintend:111r des
eaux , ert une des plus
conliderablcs ,
a
caufc de
la
fechereffe du pays ,
&
de
la difficalcc de l'arrofer (uffifamment
&
egalemenr ; voyez
auUi ce que dit Pline
a
ce fujet
&
les memoires Jes Sa–
vans C!rangers ,
tom.
I .
p.
7.
&c.
j'ajoutcrai
fculement
qu'H<·rodote ,
/iv .
I.
n.
193 ,
&
T hcophrafle ,
Hijl.
plant.
I.
VIII.
c.
7. portent jufqu'a dcux
&
trois cens pour un
le produit des terres dans la Babylonie , chofc incroya–
ble ,
Ii
oo 13 compare au produit de hos mcilleure cer–
res , qui n'crt au plus que de huir
a
dix pour un. Nous
n'aVQOS
done pas
Ull¢
iJec des effets et&nllans de !'irrigation,