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LAC
Dans ce't'te république l'oifi veté des jeunes gens étoit
1nife au rang des fautcs copitales , tandi• qu'on la rcgar–
doit comme une marque d'honneur dans les hommes
f•its ; car elle fcrvoit a dilcerncr les maltres des eída–
vcs: mais avant que de goüter les douceurs d
u
repos,
il fal loit
s'~tre
continnellement c>ercé dans
la
Jenndfe
A
la lutte,
a
la courfc, au íout, anx combats, aux évo –
lutions militaires
A
la challe,
a
la danfe,
&
m~
me aux
petirs brig•ndages'. Ou impofoíc quelquefois
a
un enfant
un chitiment ·bien. fingulier: on
roor~oit
k
doigt
a
c.e.–
lui qui avoit failli: Hc!Cychius vous dtra les noms d!l·
férens qu'ort donnoit aux jeuncs gct1S, li:lon l'ordre de
l'age
&
des exorcices, je n'ofe entrer dans ce genre de
détails.
Les pcres , en eenaios jours de fctcs, faiíoicnt cni–
vrer lettrs e[claves,
&
les produifoient dans cer
~tat
mé–
prííable devant la .jeunelte de
L_acldémonf,
alí~
de
la
préferver de la débauche du vm,
&
lm eofetgner la
venu par les défams qui lui fonc oppofés; comme qni
voudroít faire :1dmirer le< beautés de la nature, en mon–
uant les horreurs de la nuit.
Le larcin étoit permis aux enfans de
La<lá!mo>u,
-¡>our lenr donner de l'adreffe, de la ruíe
&
de l'aéli·, í–
tt!,
&
c'éroit le mémc uíage che1. les Crétois. Lycur·
gue, dit Montagne , conCtdéra
an
!arein,
h
vivaciré ,
dilígence, hardielTe , enf¡,mb1e !'milité qni reviene au pu–
blic, que chacun regarde plus ouríeu(ernent
ii
la con–
fervation de ce qui efl' fien;
&
le législateur efl'ma que
de certe double in!litutioo
ii
affaillir
&
a
défendre, il
s'en tíreroit du fruit pour la fcíence milítaire de plus
grande con!idératlon que n'étoit lo defordre
&
l'ínju!lice
ae íemblables vols, qui d'ailleurs ne pouvoient coofifl-et
qu'en quelques volaillcs ou légumes ; cependant ceux
quí étoíent prís fur le faít, étoient chhiés pour kur
mal-adrelfe.
lis craignoieot tellement la honte d'étre déconvert<,
qu'un d'eux ayant volé un petit renard, le cacha f<>us
fa rohe,
&
foufFrit, fans jetter un feul cri, qu'íl luí
dé–
ehidt le vcntre avec les dents jufqu'a ce qu'il tomba
mort fur la place. Ce falt oc doit pas parottre íncroya ·
ble, dit )?lutarque,
a
ceux qui íavent ce que les enfa ns
de la meme vílle font encore. Nous en avons vu, éon·
tinue cet hi!lorien, expirer fous
les verges, fur l'autel
de
Diane Ürthia, fans díre une íeule parole.
Cicéron avoít auffi été témoin du fpeébcle de ces
enfans, qui pour prouver lenr patience dans la douleur,
fouffroient,
a
I'age de fllpt ans, d'étre fouettés ]Ufqu'au
j
fang, fans altérer leur vtíage. La coutume ne 1':1uroít
pas chez nous emporté fur la nature; cur notre juge–
ment empoifonné par les délices, la molleffe, l'oiíiveté,
la Ucheté, la pareffe,
non~
l'u,•ons pervertt par d'hon–
teufes habírudcs. Ce
n·~n
p as moi quí parle aínfi d.- ma
natíon, on pourroit s
1
y .tromper
i\
cette pcinture, ciell
Cicéron lui-meme quí porte ce témoignage des Ro–
mains de fon fieele;
&
pour que perfonne n'en dome,
1'0Íci
fes propres rermes :
nus Hmbris
delitii..r,
otio, ian–
guore,
dif,diá,
1211imum
i,fecimus,
maloqtte
more
deli–
llitrun, mollivimru.
Tnfc. quretl.
li·ll.
V.
ctJp. xxvij.
Tclle cltoit encere l'éducatíon des cnf.1ns de Spartc
f¡u'clle les rendoit propres aux travaux
les plus rudcs .'
On formoit leur corps aux riguenrs de toutes
les fai–
fons; on les plongeoit dans
l'eau froide pour les en–
durcír aux fatigues de la guerre ,
&
on les faifnit cou–
cher for des rofeaux qu'il s étoient obllgés d'allcr arra–
cher
d~ns
l'Eurotas, fans autr-e ín(lrument que leurs feu–
Jes mams .
Ou reprocha pnblíqucmcnt
a
un jeune fpartiate de
~'étre
arrété pendant l'orage [pus le couvcrt d'une mai–
fon, camme auroít fait un cíclave.
11
éroit lmnreux
a
la jeunelfe d'étre vue fo¡¡s le cquvert d'une autre tolt
que celui du cíel ,
qu~lque
tems qu'il fit. Apres cela
pous c!tonnerons·nous que de tcls cnfans devinífcm
de~
nommes li forts, li vígoureux
&
li courageux
~
L acldt!mone
pendant envíroo fept Ctecles n'eut poiut
d'autres murailles que les bouoliers de fes foldats o'é–
toit encore une infiitution de Lycurgue :
,
Nou~
ho–
~,
norons la valeur' m:tis bien moins qn'on nc
f:lifoit
a
,
Sp~rte;
a_um o'·éprou-vons-nous pas
a
l'afpeél d'une
,
vtlle forufiée, le fentiment de méprís dont étoienr
, affeélés les Lacéd€moníens. Quelques-uns d'eux paf-
fant fous
l~s
mursde Corinthe; quellcs fcmmes, de–
" manderent-Jis, habaent cette ville?
Ce
[ont
leur ré–
pond!t·on, des Corinthíens: N e [avent-íls p;s, repn–
" rent·tls,
~es
hommes vils
&
13ches, que les feuls
remparc_s •mpénéttables a l'ennemi, font des citoyens
, 1
déterm!!'és
a
la mort_,i Philíppe ayant écrit aux Spar–
uates, qu
•!
empechcma lcurs emrcprifes: Quoi! nous
empé<;h~roJs-tu
de mourír, lui ré¡:.ondireot-ils? L'bifioíre
L.A
e
de
LtrcMimon•
en pleine de pareils traits ; elle cfi tout
miraele en ce genre.
]
e fc;:ais, comme d'autres, le prétendu bon mot du
[y
barite, que Plutarque nous a conícrvé dans Pélopi–
das. On lui vantoit l'intréprdíté des L acédémonieos
a
•ffronter
la
mort d:tns les périls de la guerrc . Dequoi
s'étonne-t-on, réponJ
it cet homme voluptucux, de les
vo:r chercher dans les
comb.usune mort qui lts déli–
vre d'une
vje
miférab
le . Le fybarite fe
trompoit; Ull
fpartíatc ne menoit point une trille vie, une vie míféra–
blc; il oroyoit feulcmtnt que le bonheur ce confi!le ni
3
vivre ni
a
mourir,
mafs 3
faire J'.nn
&
l'autre
3VI!'C
g)oire
&
avec gaieté. ,
u
n'étoit pas rnoins doux
a
un
,
lacédémonien de vívre
a
l'ombre des bonnes lois,
, qli'aux Sybarires a l'ombre de Ieurs bocages . Que
,. diS·Je! Dans Su1.e
m~me,
au milieu de la mollefie,
,
le lpartiate ennuyé foupiroít apres íes groffiers fefiins,
,
feuls conveoables
a
Con
tempéramcnr , .
H
foupíroit
apres l'ín!lruaion publique des falles quí nourríffoít Ion
efprit; apri:s le• fatiguans exercices qui
conr~rvoient
fa
íamé ; apres f.'l femme, dont les fa vcurs étoicm toujours
des phifirs nou veaux; enfin apres des jeux dont ils fe
délaffoienr
3
la guerre.
Au moment que les Spartiares enuoiem en campa–
gne, leur vic étOit moins
pénibl~.
lenr nourriturc plus
Mlicate,
&
ce
quí les wucfioit davamage, c'étoit
le
moment de Ñiire hrillcr leur gloíre
&
leur valeur. Ou
letn permertoit
a
l'urm~e,
d'embellir lcurs habíts
&
leurs
armes, de parfumcr
&
de treffer leurs longs cheveux.
Le jour d'une bataille, ils couronnoíent leurs chapeaux
de tleurs. Di:s qu'ils étoient en préfence de l'ennemi •
leur roi Ie mettoit
ii
leur tete, commandoit aux joueurs
de tlüte de jouer l'air de Cafior,
&
entonnoit
luí-m~
me
l'hymue pour
li¡~;n:1!
de
la
charge. C'étoit un
ípefta–
cle admirable
&
terrible de le< voir 's'avancer
a
l'enoemi
au ron des fintes,
&
affronter avec ínttépidité, fans ja–
mais rompre leurs
ran~s,
toutcs le• horrcurs dll trépa .
Liés par l'amour
de 111
pntrie, ils périlfoient tous en–
femble, on revennient viél:oricux.
Quelqucs Chalcidiens arrívant
ií
Laddl mone,
allerent
voir Argiléonille, mere
de
Bralida; , qui venoit d'i'tre
tué en les défendant conrre les Athéhiens. Argiléonide
lcur demanda d'abord
les !armes aux yeux,
li
íon fits
éwit mort en hom me de cretH,
&
s'íl étoit digne de
fon pays. Ces
étran~ers
pleíns d'ad mírarioo pour Bra–
fidas, exalterent fa b!lllvoure
&
fes exploits, Jllfqu'a dí–
re que dans
S
parte, íl n'y avoit pas Con égal. Non,
non, repartit Argíléoníde en les interrompant,
&
ell
elfupnt fes !armes, mon fils étoít, j'eípere, digne de
fon pays, mais fache7. que
S
parte
err
picine de fujctS
qui ne lui cedent
~point
ni en verrn ni en conrage.
En etfet, les aélions de bravoure des Spartiates paf–
fero!ent
peut-~tre
pour folles,
G
elles n'étoicnt conf.1 -
crées par l'admíratíon de tous les
(jecles. Gette auda–
cíeuíe opíniatreté, qui les rer¡doír invincibles, fut tou–
jours enrretenue
P"
leurs héros, qui f.woient bien que
trop de prndeuce émouffe la force du
coura~e,
&
qu'un
pcuple n'a poínt les venus doot
ll
n'~
pas les fcrupu–
les. Auffi les Spartíates toujours
imp3tiens de combat–
tre, fe précípítoient avcc fureur daos les bataillons en–
nemis,
&
de toutes parts envíronnés
de
la mort , ils
n"cnvífageoíent autre chofe que la gloire .
Jls inventerent des armes qui n'étoient faires que pour
eux ; m:tis leur difciplíne
&
leur vaíllance produiíoient
leurs vérítables forces. Les autres peuples, dit Séneque,
couroienr
:1
la viéloíre quand !ls
la voyoíent cerraine;
mais les Spartíates couroient
:1
h
mort, quand elle étoit
affurée
¡
&
ii
ajoute élégamment,
turp• efl <Hilib•t
fu~
giffc,
Laconi
vero
deliberaffe;
c'efi une honte
a
qui
que ce foít d'qvoir pris
la
fuite, maís c'en e!l une
a
un lacédémonien d'y avoír feulement fongé.
L es érrangers alliés de
La<ld!mo!te,
ne lui detpan–
doíent pour routenír leurs guerres, ni argeot, ni vaif–
feaux, ni troupes, íls ne lui demandoient qu'un Spnr–
tiare a la
!~te
de leurs armées;
&
qu3nd ils
l'ovoient
0btenu, íls lui rendoíent avec une entiere foumiffion too–
tes íortes d'honneurs
&
de re[peéls . C'ea ainli que les
Sicíliens obéirent
a
Gylíppe, les Chalcidiens
ii
Brafidas,
&
rous les Grecs d' Alic
ii
L yfandre,
it
Callicratidas
&
a
Agéfilas.
Ce peuplc belliquoux reprc!íentoit
toutes fes déi'tés
armées,
V
énus
elle·m~me
l'étoit:
armatam /7e>urem.
vidit
Lacedemona
;Fallas .
Bacchus qui par touc 2,illeurs
tenoít le tbyrfe
a
la main, portoír un dard
a
L acld!–
mone
.
Jugez fi les Spartíates pouvoieut manguer d'etrc
yaillans. lis n'alloíent jamais daos leurs temples qu 'ils
n'y trouvalfent une efpecc d'armée,
&
ne pouvoieutja–
mais prier les dieul ,
q~'en
!liCme ttms la dc!vatíon nc
fé
veilli
t
leur
coura~e .
ll