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628

GLO

rique de

gloir<,

foit que les hommes ayent compt.! lcurs

plaítirs au nombre des plus grands biens,

&

les A

m

qui les caufoienr , au nombre des dons

les plus pré–

cieux que le Ciel eilt faits

a

la terre; loit qu'ils n'aycnt

jamais era pouvoir

lrop honorer ce qui avoir comri–

bué

il

les rendre moins barbares;

&

que les Ans cou-

1idérés comme compagnons des vertus, ayeiJt été

JU–

g~s

dignes d'en partager

le triomphe, apres en avoir

fecondé les travaux .

Ce n'efi meme qu'a ce titre que les raleas en géné–

ral nous femblent avoir droir d'entrer en fociété de

gloire

avec les vertus,

&

la fociété devient plus intime

á

me–

fure qu'ils concourenr plus direélcment

a

la

m~me

fin.

Cene fin e!l le bonheur du monde; ainli les rateos qui

oontribuent le plus

a

rendre les hommes heureux, de–

vroient narurellemeor avoir le plus de pan a la

gloire.

Mai; ce prír attaché aux talens doit €tre encore en

raifon de Ieur rareté

&

de leur urilité combioées . Ce

qui n'en que difficile, ne mérite aucune auemion; ce

qui e!l aifé, quoique urile, pour exercer un ralem com–

mun, n'anend qu'un falaire modique.

11

fuffit au labou–

reur de fe nourrir de fes moitfons . Ce qui e!l en me–

me

tems d'une grande imporrance

&

d'une

exrr~me

difficulté , demande des encouragemens proporJionoés

aux

taleus qu'on y employe. Le mérite du Cueces e!l

en raifoa de l'utilité de l'enrreprife,

&

de la rareté des

moyens.

Suivaot cette regle, les talens appliqués aux beaux

Arrs, quoique peut-erre les plus étoonans, ne four pas

les premiers admis au parrage de la

gloire.

Avec moius

de géuie que Tacite

&

que Coroeille, un minifire, un

législateur feront placés au-detfus d'eux .

Soivant cene regle cocore, les memes talens ne fout

pas roOjours égalemenr recommandables;

&

leqrs prore–

éleurs, pour encourager les plus uriles, doiveC)'t con fui–

ter la difpoútion des efprits

&

la con!litutioo des chafes;

favorifer, par exemple, la Poélie daos des rems de bar–

barie

&

de férocité, l'Eioqueuce daos des tems d'abat–

temenr

&

de delolarion, la Philofophie daos des tems

de fuperflition

&

de faoatifme. La premiere adoucira

les moeurs,

&

rendra les ames Bexibles; la feconde rete–

vera le courage des peuples,

&

leur iofpirera ces réfola–

tions vigoureu(es qui triomphent des revers: la derniere

diilipera les fautómes de l'erreur

&

de la crainte ,

&

montrera aux hommes le précipice ou ils fe laiffeut con–

doire les mains liées

&

les yeux bandés.

Mais comme ces effets ne font pas excluGfs ; que

les talens qui les operent fe communiqoent

&

fe con–

fondent; que la Philofophie éclaire la Poéfie qui l'em–

bellit; que l'Eioqueuce anime l'une

&

l'aucre,

&

s'eu–

richit eje leurs thréfors, le partí le plus avantageux feroit

de les nourrir, de les exercer enfemble, pour les faire

agir a-propos, rour-3-tour oa de concerr , fuivanr

l~s

hommes, les lieux

&

les tems. Ce font des mJyens

bien pniffaos

&

bien négligés, de eonduire

&

de gou–

verner les peuples. La fageffo des ancieones républiqoes

brilla for-rnut daos l'emploi des talens capablcs de per–

fuad er

&

d'émouvoir .

Au contraire ríen n'annonce plus la corruption

&

l"i–

vrelfe ou les efprits font plongés , que les honneurs

exrravágans aocordés

a

des arts frivoles . R.ome n' eft

pln; qu'un obJet de pitié, lorfqu'elle fe divife en faélions

pour des panrom imes , lorfque l'exil de ces hommes por–

dos c!l une calamué,

&

leur retour un rriomphe.

La

gloire,

comme nous l'avons dir, doit étre réfer–

vée aux eoopérateors do bien public ·

&

nou-feulemenr

les rateos, mais les venus

elles-mé~es

n'ont droir d'y

afpircr qu'a

ce

titre .

L'aélion de Virgioius immolant fa filie, eft auffi

forre

&

plus pure que celle de Brutos condamnanr fon fils ·

cepeodant la dernicre efl

glor;m{e'

la premiere ne

red

pas. Poorquoi? Virginius ne

l~uvoit

que l'honneur des

fien>, Brutus lauvoit l'honneur des lois

&

de la patrie.

JI y

avoit peot-etre bien de l'orgueil daos l'aélion de

l3rurus, peut.etre n'y avoit-il que de l'orgueil:

¡¡

n'y

avoit daos cell"e de Virginius que de l'hooncteté

&

du

coura~e;

mais celui-ci faifoit tour pour fa famille, celui-

13

failoit ¡out, ou fembloit faire tour pour Rome;

&

Rome, qoi n'a regardé l'aélion de Virginius que com–

me celle d'un honne re homme

&

d'un bon pere, a

confacré l'aélion de Brurus comme celle d'un héros.

R íen n'ell plos jufte que ce retour .

L~,

grand> facrifices de l'intéret perfonnel au bien

pubbe, demanden¡ u

u

elfort qui éleve l'homme au-def–

f~s

de

lu1-m~ me,

&

la

gloire

efl le feul prix qui foit

d•gn~

d'y etre attaché. Qo'offrir

¡,

celoi qui

immole

f¡¡

vJe

1

cornme D éctus; fon honoeur, comrne

f

abius;

GLO

fon retfentiment , comme Camille; fes enfans, commé

Brutus

&

Manlius? La ven u qui fe fuffit, efl une venu

plus qu'humaine: il n'efl done ni prudent ni jufle d" exi–

ger que la vertu fe fuffilc. Sa récompoufe doir etre

proportionnée au bien qu'elle opere, au facrifice qui lui

en cotne , aux taleos perfonnels qui la fec?ndent ; ou

(l

les taleos perfonnels lui manquent, au ch01X

de~

talens

étrangers qu'elle appelle

a

Con fecours: car ce ohotx daos

un homme pnblic renferme en lui tous les ralens.

L'homme public qui feroit tour par lui-méme, feroir

peu de chofes.

L'~loge

que donne Horace

a

Augufle,

Cum tut ¡,ftinea.s,

&

tanta ne/IotiafoltU,

lignifie feu–

lcmem que rout fe

faifoit en Ion nom , que tout fe

paffoit fous fes yeux. Le don de régner avec

gloire

n'exige qu'un talem

&

qu'une verta ; ils ticnnem Jieu

de tour,

&

rien n'y lupplée. Cette vertu, c'c(l d'aimer

les hommes; ce talent, c'efl de les placer. Qu'un roi

veuille coucageufement le bien, qu'il y employe a-pro–

pos

1

es talens

&

les venus analogues ; ce qu'il fait par

infpiration n'en e(l pas moins

i

lui,

&

la

gloire

qui lui

en revient ne fait que remonter

a

fa fource.

JI

ne faut pas croire que les talens

&

les verrus fub !i–

mes fe donneat rcnctn-vous poor fe trouver enlemble

dans rel

liecle

&

daos tel pays ; on doit foppofcr u11

aimant qui les auire, un foutll o qui les développe,

l11l

elprit qui les anime, un centre d'aétivité qui les encha1ue

autour de lui. C'elt done

á

jufle titre qu'on attribue

a

Un roi qui a

fU

régnor, !OUte la

g/oire

de foo regne;

ce qu'il a infpiré, il l'a fait,

&

l'hommage lui ea

ert

du.

Voyez un roi qui par les liens de la confiance

&

de

l'amour unir routes les partie• de fon état, en fait

Ufl

corps dont

il

cft

!'ame, encourage la population

&

l'ín–

duflrie, fait fteurir I'Agriculturé

&

le Commerce; excite,

aiguillonne les Arts, rend les talens aélifs

&

les venus

fécondes: ce roi, Caos couter uoe larme

a

fes fujets,

une goune de fang a la rerre , accamule au fein du

repos un thréfor immenfe de

gloire,

&

la moitfoo en

appartienr

a

la main qui !'a femée.

IVIais la

gloire,

commo la lumiere, fe communique

fans s'atfoiblir: celle do fouverain

fe

répand fur la na•

tion;

&

chacun des grands hommes donr les rravaux:

y

contribuent, brille en particulier du rayo

o

qui émane

de lui .

On

a dit

le grand Condf, le grand Colbn·t,

le grand Corneillc,

comme on a dit

LOttis-le-Grand.

Celui des fujets qui contribue

&

participe le plus

a

la

gl•ire

d'un regue heureux, c'efl un mioillre éclairé, la–

borieux , acceffible , égalemeut dévoüé

a

l'état

&

au

prince, qui s'oublie lui-meme ,

&

qui oe voir que

le

bien ; mais

la

gloire

meme de cer homme éronnant

remonte au roi qui fe l'auache. En t!fet,

ti

l'utile

&

le merveilleux font la

gloir•

,

quoi de plus gloricox:

pour un prince' que la découverte

&

le choix d'un

a

di~ne

ami?

Dans la balance de la

g loire

doivent entrer

~•oc

le

bie n qo'on a fait , les diificultés qu'on

a

furmomées;

c'e(l l'avaotage des fondareurs, tels que Lycurgue

&

le c7,ar Pierrc. Mais on doit auffi diflraire du mérir e

du lucces, tour ce qu'a fair la violence.

JI

e(l beau de

prévoir, comme Lycurgue, qu'on humanifera un pe<l–

ple féroce avec de la muo que; il n'y a aucon mér ite

a

imaginer' comme le cza·r' de fe faire obéir-

á

coups

de labre. La féule dominarían glorieufe ell celle que

les hommes préferent ou par raifon ou par amour:

imperatoriam majefiatem armit duoratam, legibru opur–

tet e(fe armatam,

dit l'empereur Juflinien .

D1: tous ceux qui onr defolé' la tcrre, il n'en efi au–

eun, qui,

3

l'en croire, n'en vouiUt afstirer le boo–

heur . Déliez-vous de quiconque prétend reodre les

h<>mmes plus heureux qu'ils ne veuleot !'erre; c'c!l la

chimere des ulurpa<eurs,

&

le prérexte des ryrans. Celui

qoi fonde un empire pour lui-meme, tnille dans un peu–

pie comme daos le marbre, fans en regretter les débris;

celui qui foode un empire pour le people qui le com–

pofe, commence par rendre ce people flexible ,

&

le

modifie fans le brifer. En général, la perfonoalité daos

la eaufe publique , e!l un crime de

le(e huma11itl

_

L 'homme qui fe facrifie

3

lui leo! le repos, le bonheur

des hommes, efl de toos les aoimaux le plus cruel

&

le plus vorace: tour doit s'unir pour l'accabler.

Sur

ce

príncipe nous nous fommes élevés conrre les

aotcurs de toure guerre io¡u!le. Nous avons invité les

difpenfateurs de la

gloire

á

couvrir d'opprobre les fiJe–

ces meme des conquérans ambitieux; mais nous fom–

mes bien éloignés de difputer

a

la profeffion des armes

1

a par( qu 'elle doit

a

voir

3

la

gloire

de l'état doot elle

efl le bouclier,

&

du throne dont elle efl la barriere.

Que celui q11i fert

fon

prinoe ou fa patrie

loit

armé

pouc