570
A R 1
le. N ous ne Caurions oous palfer d'Arit\ote dans I'l!gli–
Ce,
dit encore Mélanél:hon, parce que c'ea le feul qui
nOllS llpprenne
¡¡
définir,
a
divifer,
&
a
juger; lui Ceul
oous apprend
m~me
a raiConncr ; or dans l'EgliCe tout
cela n'ea-II pas néceflairc ? pour les choCes de la vie,
n'avons-nous pas befoin de bien des choCes que la Phy–
lique feule nous apprend? Platon en parle, a la vérité:
mais on diroit que c'en un prophete qui annonce l'ave–
nir,
&
non un mairre qui veut inaruire; au lieu que
dans Ariaote, vous trouve. les principes,
&
il en tire
lui-meme les conCéqucnces. Je demande feulement, dit
Mélanél:hon, qu'on s'annche aux chofes que dit Ari–
{lote,
&
non aux mots, qu'on abandonne ces vaines
fubtilités,
&
qu'on ne fe Cerve de dillinélions que 10rC–
qu'elles (erom nécelfaires pour faire Cemir que la diffi–
culeé ne regarde poim ce que vous défende.; au Iicu
que communémenr on diningue afin de vous faire per–
dre de vue ce qu'on Coílrienr: ell-ce le moyen d'é–
c1aircir les matieres? Nous en avons, je crois, alfe.
dit pour démomrer que ce n'ell pas Cans raiCon que
nous avons compris Mélnnélhon nu nombre de ceux
qui om rétabli 1:1 philofophie d'Ariaotc. Nous n'avons
pas préteodu donner Ca vie; elle renferme beaucoup
plus de circonances intérelfantes que cclles que nous
avons rapportées; c'ell un grand homnie,
&
qui a joiié
un tres-grand r61e dans le
mond~
: mais fa vie ell tres–
connue,
&
ce n'étoit pas ici le rieu de I'écrire.
N icolas Taureill a été un des plus c¿lebres philofo–
phes panni les Protefhns; il naG.uit de, parens dOD! la
fonune ne faiCoit pas eCpérer a Taureill une éducation
telle que fon eCprit la demandoit: mais la fadlité
&
la .pénétration qu'on
apper~ut
en lui, fit qu'on engage:!
le duc de Vinemberg a foum ir aux frais .
11
Ii¡-
des
progres extraordiuaires ,
&
jamais perConne n'a moins
trompé
Ces
bienfaiteurs que lui . L es ditférends des Ca–
tholiq ues avec les Protellans I'empecherent d'embralfer
l'état ecc1éliallique .
11
Ce lit Medecin,
&
c'ell ce qui
arrera Ca fortune a la COur de Virremberg . Le due de
Vinemberg deliroit I'avoir aupres de lui, pour lui faire
défendre le parti de la réforme qu'i1 avoit embralfé,
&
e'ell en partie pour cela ql1'il avoit foumi aUl: frais de
fon éducatiun: mais on le
foup~onna
de pencher pour
la confemon d'Ausbourg ; peut-etre n'étoit-jJ pour aucun
pani: de quelque religion qu'il fílt, cela ne fait rien
:l
la Phil?Cophie . Voila pourquoi nous ne diCcutoDS pas
cet artlcle exaélemem . Apres avoir profelfé long·tems
h Medecine , Bale, il palfa
:l
Strasbourg;
&
de cette
"iHe, jJ revint
:l
B~le
pour y
~tre
profelfeur de Mo–
rale . D e-1i\ il repa(fa en Allemagne olí il s'aequit une
grande réputation:
Con
école étoit remplie de barons
&
de comtes, qui venoicm I'entendre .
11
étoit li de–
lintérelf¿, qu'avcc toute cette réputation
&
ce cOllcours
pour I'écouter ,
iI
ne devim pas riche.
1\
mourut de la
pelle , agé de cinquante-neuf ans. Ce fut un des pre–
m iers hommes de
Con
tems ; car il oCa penCer feul,
&
iI
ne fe lailfa jamais gouverncr par I'autorité: on dé–
eouvre par tous fes ¿crits une certaine hardielfe dans
fes penCées
&
dans Ces opinions. Jamais perfonne n'a
m ieuI faifi une ditliculté,
&
ne s'en ell mieux Cervi
contre (es adverCaircs, ql1i communément ne pouvoient
pas tenir cOlltre lui.
1\
fut grand -ennemi de la phi lo–
fophie de CreCalpin; on découvre dans tous Ces écrits
qu'i1 étoit fort contem de ce qu'i1 faiCoit; I'amour pro–
pre
s'r
montre un peu trop a découvert,
&
011 Y ap–
per~olt
quelquefois une préfomption inCopportable.
11
regardoit du haut de
Con
eCprit tous les philoCophes
qui l'avoient précédé, li on en excepte Ariaote
&
quel–
ques aneiens.
11
examina la philofophie d'Arillote,
&
iI
Y
apper~ut
plulieurs erreurs; il eut le courage de les
rejener,
&
alfe. d'eCprit pour le faire avec
Cucc~s .
11
ell beau de lui emendre dire dans la préface de la mé–
thode de la M edecine de prédiél:ion, car tel ell le ti–
tre du Ilvre:" Je m'attache
a
venger la doélrine de Je–
" Cus.Chrill,
&
je n'accorde a Arillote rien de ce que
" JeCu&-Chrifl parolt lui refuCer : je n'examine pas me–
" me ce qu i elt eontraire
a
I'évangile , parce qu'avant
" tout examen, je Cuis a(fílré que cela
ea
faux". Tous
les philoCophes devroient avoir dans l'eCprit que leur
philoCophie ne doit point etre oppofée
¡¡
la rcligion;
toute leur raiCon doit s'y briCer, parce que c'ell UII édi–
tice appuyé Cur
l'immuabl~
vérité.
11
fau t avoüer qu'i1
ell difficile de faifir fon fyflcme philofophique . Je Cai
feulement qu'i1 méprifoit beaucoup tous les commen–
tateurs d'Arillote,
&
qu'i! 3voue que la philoCophie pe!–
ripatéticienne lui plaiCoit beaucoup, mais
co~rigée
&
ren–
due conforme
a
J'évangile : c'ell pourquol Je
n~
cro!s
~as
qu'on doive l'effaccr du catalogue des Pénpatéu-
ARI
ciens, quoiqu'il I'ait réformée en plufieurs endroits.
UII
eCprit auffi hardi que le fien ne pouvoit manquer de
lailfer échapper quelqucs paradoxes: fes adverfaires s'eo
10m Cervis pour prouver qu'i1 étoit athée, mais en vé–
rit~,
le r.eCpea qu'!I, té!noi nc par-tout
¡¡
la religion,
~
qUI certalllemellt n etOlt
t limulé doit le meltre a
I'abri d'u.l1e pareille
~ccur.~tion;
IIne 'prévoyoit pas qu'
~H1
pílt
l1~er
de
~arell\.es cOI!fequcnc~~
des principes qu'
II
avan~oll;
car J6 fUl s per(uadé qu II les auroit retra–
élés , ou les auroi! expliqués de facron
3
fatisfaire tour
le monde. Je crois 'Iu'on doit
~rre
fort reCervé fur
l'accuCation d'athéifme;
&
on ne doit jamais conelurre
Cur quelques propofitions haCardécs, qu'un homme dI:
3thée: il faut confulter tous Ces onvrages;
&
I'on peue
arrílrer que s'iI ell réellemem, fon impiété fe fera fen–
tir par-tout.
Michel Piccart brilloit vers le tems de Nicolas Tau–
reill;
iI
profelfa de bonne heure la Logique,
&
s'y di–
Ilingua beaucoup;
i1
Cuivit le torrem,
&
fut péripaté–
ticien. On lui confia apres Ces premiers elfais la chaire
de Métaphyfique
&
de Poelie, cela paro?t alfe. difparat,
. &
je n'augure guere bien d'un tems olí on donne une
chaire pour la Poeae a un Péripatéticien : mais enfin
il étoit peut-etre le meilleur dans ce tems-U ,
&
iI n'y
a rien
a
dire, 10rCqu'on vaut mieux que tous ceux de
Con
tems . Je nc comprends pas commcnt dans un lie–
cle olí on payoi!
Ii'
bien les Cavans, Piccart fUr fi pau–
vre; car il luta toute Ca vie contre la pauvreté ;
&
il
tit bien connoltre par fa conduite que la philofophie de
Con
ctEur
&
de fon eCprit val oit m ieux que celle qu'il
diél:oi! dans les écoles.
11
ti! un grand nombre d'ou–
vrages,
&
tous fort e{limes de fon vivant. N ous aVon5
de lui cinquantc
&
une dilfertatioDS , olí
iI
fait connoi–
ere qu'il poffédoit Arillote Cupéricurement. l1 tit auffi
le manuel de la philofophie d'Ariaote, qui eut beau–
coup de eours: la réputation de Piccart fubfille enco–
re;
&,
ce qui ne peut guere fe dire des ouvrages de ce
tems-U, on erouve a protiter dans les fiens .
Corneille Manini naqui! a Anvers;
iI
Y fit Ces étu–
des,
&
avec tant de diltioélion, qu'on I'attira immé–
diatemem apres 3 Amllerdam, pour
y
profelfer la Phi–
lofophie.
11
étoit Cubtil, capable d'embarralfer un hom–
me d'efprit,
&
Ce (iroir aifément de tout en bon Pé–
ripatéticien. Le duc de Brunfwic jetta les yeux Cur lui.
pour I'envoyer au colloque de Ratisbonne .
Gret.erqui
¿toit auffi député a ce coHoque pour le parti des Pro–
teflans , trouva mauvais qu'on lui aOociit un profelfeur
de PhiloCophie, dans une diCpute olí on ne devoit agi–
ter que des quellions de Théologie; c'elt ce qui lui tit
dire 10rCqu'i1 vit Martini dans
!'alfem.b~ée
,
'l1ti~
SaU/ in–
t <r proek<taJ 'l1l4rit?
!'
quOl
~artltl1
.répondlt ' .
afina".
¡atriJ
fío.
D ans la fUlte MarllDl tir blen connoare que
Gret.eravoit en tort de fe plaindre d'un tel fecond_
11
fut tres-.élé pour la philofophie d'Arillote; iI tra–
vailla toute Ca vie a la défendre comre les alfauts qu'oD
commen~oit
déja a lui livrer . C 'e{l ce qui lui lit pren–
dre les armes contre les paniCans de R amus;
&
on peur
dire que ce n'ell que par des efforts redoublés que le
PéripatétiCme fe Coiltint. 11 étoit prc! a diCpurer coo–
tre tout le monde : jamais de Ca vie
iI
n'a refufé UD
cartel philoCophique . l1 mourut agé de cinquame-qua–
tre ans, un peu martyr de Péripatétifme: car il avoir
altéré Ca Canté, foit par le travail opiniatre pour défen–
dre
Con
cher maltre, Coit par fes difputes de vive voir.
qui infaiHiblement ufercnt Ca poilrine . N ous avons de
lui l'analyCe logique,
&
le commentaire logique con–
tre les R amines , un Cyllcme de PhiloCophie morale
&
de M étaphylique . Je ne fais point ici mention de Ces
difierens écrits Cur la Théologie, parce que jc ne pár–
le que de ce qui regarde la PhiloCophie.
Hermannus C orringius ell un des plus Canos hom–
m es que l'Allema&ne ait produits. On pourroit le loüer
par plulieurs eodrOlts : mais je m'en
tietld~ai
a
ce qui
regarde la PhiloCophie;
iI
s'y difiingua fi fort, qU'Otl
ne peut fe difpenfer d'en faire memiotl avee éloge dans
cette hilloire. Le duc
U
lríe de Brunfwie le tit pro–
fclfeur dans Con univerli té; il vint dans un mauvais
tems, les guerres déColoiem toute I'Europe I ce tléau
atlligeoit toutes les ditférentes nations;
il
e{l diflicile
avee de tels troubles de donner
a
l'étude le tems qui
el!
nécelfaire pour devenir Cavant .
l\
trouva pourtanr
le moyen de devenir un des plus favans hommes qui
ayem jamais paru. Le plus grand éloge que j'en puilfc
I
faire, c'ell de dire
I~'il
fut écrit par M . Colbert fur
le catalogue des Cava s que L ouis-le-Grand récompen–
fa. Ce gtand roi lui émoigna par fes largelfes au (ond
de l'Allemagne le cas
qu
'il
faifoit de fon
rn~rite.
II fue
Pé-