AME
en rien, & ne les atrujettit point
a
nos befoins &
ii
nes
caprices, vous n'y remarquet d'autre vile que leur pro–
pre conlervation, M-ais qu'entende'/.-vous par leur con–
fervation? elt-ce eelle de la machine? Votre réponfe ne
fatisfait point; la pure matiere n'ell: point fa tin
a
elle–
meme; encore moins le peut-on dire d'une portion de
maricre organifée ; I'arrangement d'un tout matériel
a
pour bur autre chofe que ce tout; la confervation de la
machine de la bete, qu:md fon príncipe fe tronveroit dans
la machine meme, feroit moyell
&
non fin: plus
il
y
auroit de tine méchanique dans tont cela, plus j'y dé–
couvrirois d'3rt ,
&
plus je ferois obligé de recoutir
a
quclque chofe hors de la machine, c'eIT-a-dire
a
un étre
limpIe, pour qui cet arrangement fUt fait,
&
auquel la
machine entierc cut un rapport d'utilité, C'ell: ainli que
les idées de la fagelTe
&
de la véracité de Dieu, nous
menent de conene
a
cette conclulion générale que nous
pouvons deformais regarder comme certaine,
II Y
a une
ame dans les betcs, c'ell:-a-dire un principe immatériel
uni • leur machine, fait pour elle, comme elle ell fai–
te pour lui, qui
re~oit
¡¡
fon occalion difFérentes fenfa–
tions,
&
qui leur fait faire ces aétions qui nous furpren–
nent, par les diverfes direétions qu'elle imprime
a
la
force mouvante daos la maehine ,
, Nous avons conduit neme recherche jufqu'a I' cxi!l:en–
ce avérée de
I'ame deJ
bites,
c'ctl-ii-dire, d'un príncipe
immatériel joinr
3
leur machioe, Si cette
ame
n'étoit
p~s
fpirituelle, nous ne pourrions nous alHlrer
fi
la. n6tre I'ell;
puifqu~
le privilége de la raiCon
&
tontes les autres fa–
cultés de l'ame humaine, ne fom pas plus incompatibles
avec I'idée de la pure matiere, que l'ellla limpie fenCa–
tion,
&
qu'il y
a
plus loin de la matiere ratinée, fubtí–
lifée, mife dans quelque arran¡¡-ement que ce puiae etre
a
la limpie pcrceprioll d'un obJet, qu'il n'y a de cene
perceptiou limpie
&
direéte aux aél:es réftéchis
&
au rai–
fonnemenr ,
D'abord il y a une dilHnétion eITentielle entre la rai–
fon humaine
&
ceUe des brlltes, Quoique le préjugé
oommu!\ aille
;¡
leur donner quelque degré de raiCon, il
l1'a peim été juCqu'a les égaler aux hommes ,
La
raifon
des brutes n'agit que fur de petits objets,
&
agit tres-foi–
blement, cette raifeo ne S'arplique point
a
toutes fOrtes
d'objets comme la n6tre,
L'
ame del br1ttel
fera done
une
fubll:ance qui penfe, mais le fonds de fa penfée fe–
ra' beaucoup plus éttoit que celui de l'
ame hrmtaine,
Elle aura I'idée des objets corporels qui out quelque re–
lation d'utilité avec foh eerps : mais elle n'aura point
d'idées Cpirítuclles
&
abllraites; elle ne fera point fuice–
ptible de I'idée d'un Dieu , d'une religion , du bien
&
du mal moral, ni de tontes celles qui [ont
ti
bien liées
avec celles-la , qu'une imelligence capable de recevoir
l'es unes ell llécelTairemem fufceptible des autres,
L'
ame
de la béte
ne renCermera point non plus ces notions
&
ces principes fur leCquels on batit les [ciences
&
les
am,
Voil' beaucoup de propriétés de l'ame hum.ine qui
m.anquent
a
c~lIe
de la bete: mais q,uí nous ¡¡arantit ce
defaut? I'expértence: avec quelque fOIn que
1
on obCer–
ve les betes de quelque c6té qu'on les toume, aucune
de leurs aétions ne nous découvre la moindre trace de
ces iMes dont je viens de parler; je dis meme celles de
leurs aétions qui marqueut le plus de fubtilité
&
de fi–
neITe,
&
qui paroilTent plus raiConoées,
A
s'en teoir
a
l'expérience, on ell: donc en droit de leur
r~fufer
toutes
ces pr(i)prlétés de l'ame humaine , Dire'/.-vous a\'ec Bay–
le,
que de ce que
I'ame del bruteJ
emprifonnée qn'elte
ell: dans certains organes, ne manifelle pas teltes
&
tel–
les facultés, telles
&
telles idées ,
i1
ne s'enfuit point
du tout qu'elte ne foit fu[ceptible de ces iMes,
&
qU'el–
le n'ait
p~
ces faculrés; paree que c'ell: peut-Etre l'or–
ganiration de la machíne qui les voile
&
les enveloppc?
A
ce ridicule
p eut-étre,
dom le bon fens s'irrite, voici
une réponfe décifive, C'ell: une chofe
dir~étement
op–
{'ofée • la nature d'un Dieu bon
&
fage,
&
contrqire
:\ l'ordrc qu'il Cuit invariablemem, de donner' la crc:'a–
ture certaines faculrés,
&
de De lui en permettrc pas
I'exerciee, fur-tout
Ii
ces facultés,
en
fe déployant, peu–
"ent contribuer
l
la gloire du Créateur
&
an bonhenr
de
la
créature, Voici un principe évidemment contenu
dans I'idée d'UD Dieu fonverainement bon
&
fouverai–
ncment fage, c'ell: que les intelligences qu'il a créées ,
dans 'luel'lue ordre qu'il les place,
a
quelque écono–
mie qu'il lui plaife de les foumettre (je parle <I'une éco–
nomie durable
&
r~glée
CeJon les lois générales de la
nature), foient en état de le gloritier autaor que
leu~
Dature les en rcnd
c~pables
&
foienr en meme tems
mifes
a
portée d'acquérir le
'bonheur
dom
cette Imure
AME
293
eH
fufc~ptibIe,
De-la
il
fuit qb'il répugne
a
la fageITe
&
a la bonté de Dieu, de foumettre des créature,
a
auoune économie qui De leur permette de déployer que
les moins nobles de leurs facultés , qui Ieur rende iou–
tiles celles qui fotlt les plus nobles ,
&
par conféquent
lcs empeche de tendre au plus líauc poi
n!
de félicité ou
elles puiITent atteindre, Telle f"foit uoe économie qui
borneroit
a
de limpies fenCations des créatures fufccpti–
bies de raironncmeut
&
d'idécs claires,
&
qui les prí–
veroit de cene efpece de bonheur qne procurenr les
connoilTances évideutes
&
les opératíons libres
&
rai–
fonnablcs, pour les réduire aux [euls plailirs des fens,
Or
l'ame del brlltcl,
fuppoCé qu/elte ne difFérat point
eITentiellement de l'ame humaine, [eroit dans le cas de
Gct aCrujettiiTement forcé qui répugne
¡¡
la bomé
&
a
la
faftcfle du C réateur,
&
qui ell: dire8.:emem contraire aux
10ls de I'ordre , C'en ell: aITe'/. pour nous convaincre que
I'ame del brllta
n'ayant, comme l'expéríence le mon–
tre, aucune connoiiTance de la divinité, aucun príncipe
de religion, aucunes notions do bien
&
du mal moral,
n'ell poinr fufceptiblc de ces notions. Sous cene excln–
lion ell:, comprife ceIle d'nn nombre infini d'idées
&
dé
propriétés fpil'ituelles, Mais fi elle n'ell: pas la meme
que celle des hommes , quelle ell: done fa nature? Voici
ce qu'on peut conjeéturer de plus ra'lfonnable fur ce fujet,
&
qui Coit moins expofé aux
emb~rras
'lui peuvenr nat–
tre d'ailleurs,
Je me repréfente
l'lIme
de¡ bétel
comme une fub-.
flance immatérielle
&
inrelligente: mais de quelle efpe–
ce? Ce doit
~tre,
ce fem ble un
p~incipe
aétif qui a de¡
fen(ations,
&
qui n'a que cela, Notre ame
a
dans elle–
meme , outre ron
aél:ivit~
eITentielle, deux facultés qui
foumilTen t • cette aétivité la matierc fur laquelle elle
s'exeree . Vune, c'ell: la taculté de former des idées
claires
&
dill:inétes [ur leCquelles le principe aétif ou la
volollté agit d'une manicre quí s'appelle
r¿jlexion, juge–
ment, raiJom"ment, choix libre:
l'autre, c'ert la facul–
té de Cemir, qui confirte dans la perception d'une infi.
nité de petites idées involomaires, qui fe fuccedent ra–
pidemem I'une
¡¡
I'autre, quc I'ame ne difceme point,
mais dont les dífféremes [ucceffions lui plaifent ou lui
déplai[ent,
&
a
I'occafion deCquelles le principe aétir
ne [e
dé~loye
que par delirs confus , Ces deux facultés
paroiITent indépendames I'une de I'autre: qui nous
cm–
pecheroit de fuppofer dans I'échelle des intelligences.
au-deiTous· de I'ame humaine, une efpece d'efprit ·plus
borné qu'cllc,
&
qui ne lui relTembleroit pourtant que par
la faculté de [enrir; un efprit qui n'auwit que cette facul–
té fans avoir l'autre, qui ne feroit capable que d'idée¡
indill:inétes, ou de perceptions confuCes? Cet e(prit ayant
des bornes beaucoup plus étroites que I'ame humaine, en
fera eiTentiellement ou rpécitiquement dillinét, Son aéti–
vité (era reflerrée
a
proportion . de
Con
intelligence;
comme celle-ci fe bornera aux perfeél:ions confufes,
celle-I' nc conlillera que dans des delirs confus qui fe–
ront
relatifs
ii
ces perceptions ,
lL
n'aura qne que1que.
Hait. de I'ame humaine; il Cera Con portrait en raccour–
ci,
~'ame
deJ
brutel,
felo~
'lue j e me la figure , ap–
per~ol~
les,
obJ';~s
'par
,Ce,nr.~tlon;
·elle ne réfléchit point;
clle na pOll1t d Idee dlflméte; elle n'a 'ju'une idée con–
fuCe du corps , Mais qu'il y a de diftérence entre les
idées corporelles que la [enCation n"Gus fait na¡tre
&
celles que la bete rec;:oit par la mEme voie! Les rens
fotlt bien paITer dans notre ame I'idée des corps : mais
notre ame ayaot outre cela une faculté rupérieurc
a
cel–
le des fens , rend ceue idée toute amre que les Cens ne
In
lui donncnt. Par exemple, je vois u.n arbre, une
b~te le voit auffi: mais ma perception ell: toute difFéren–
te de la ficnne, Dans ce qui dépend uniquement des (ens,
pem-erre que tOut ell: égal entre elle
&
moi; j'ai ce–
pcndant une perception qu'elle n'a pas; pourquoi? par–
ce que j'ai le pouvoir de réfléchir (ur I'ob¡et que
me
pri'Cente ma renfation, Des que j'ai
vü
un ¡eul nrbre,
fai l'idée abllraite d'arbre en général , qui ell (épnrée
dans mon cCprit de celle d'une plante, de celle d'un
cheval
&
d'une maifon, Cettc vt'l.e que I'enrendement
fe forme d'un objet auquel la fenfation I'applique, ell:
le principe de
tour
raifonnemellt, qui fu ppo(e réflexion,
vue dillinéte , idées abQraites des ob jers, par
"U
I'on
voit les rapports
&
les ditfércnces,
&
qu; metrent dans
chaque objet une cCpece d'nnité , N ous croyons devoir
aux [ens des connoilTances qui d¿pendent d'un principe
bien plus noble, je veux dire de
I'!ntellig~nce
qui di!tin–
g?e, qui réunit, qui compare ,
qUI
four!1tt cene vue de
dlfcrétion ou de difcernemcnt, D époUlllons done har–
dirnent la bete des priviléges qu'elle avoit uCurpés dans
notre imagination,
lJ
ne ame purement [enfitive efl bor·
Dé'e