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qui les violaient étaient regardés coinme coupables de sacrilége et irré–
missiblement condamnés au dernier supplice ('). Cette soumission, qui
s'étendaitauxenfants al'égard de leur pereetde leur mere, au.x inférieurs
a
l'égard de leurs supérieurs et aux' sujets a l'égard des autorités, bien
qu'impliquant tous les défauts inhérents a un systei:ne d'absolutisme
excessif, réussit
a
produire sous le gouvernement patriarcal de monar–
ques prudents et ayant a creur le bonheur de leurs sujets, des résultats
admirables. Dans les moindres détails, dans le simple salut que se font
les indigenes, on peut constat er cet esprit de haute rrioralité. Ama-suwa,
ama-llulla, ama-Iulla :
Ne vale pas, ne mens pas, ne sois pas oisif,
dit
la personne qui salue, et l'autre lui répond : Hinallataj h.anpas :
Qu'il
en soit ainsi de toi.
Voila comment l'un des actes les plus simples et les
plus fréquents de la vie renfermait t0ut un code de
morale.Onvoit encore
par
la
que si l'oisiveté est considérée par les moralistes comme la
mere de tous les vices, les Incas ne l'envisageaient pas moins sévere–
ment, pu:Ísqu'ils la regardaient comme un crime au,ssl abominable que
le vol et le mensonge. Les femmes publiques, dont le genre de vie dans
leur opinion n'avait pas d'autre cause que cette oisiveté, étaient l'objet
d'un tel mépris et d'une telle répulsion qu'ils leur interdisaient le séjour
des" villes et desvillages, et les reléguaient dans les campagnes, d'ou leur
est venu lenom de: Pam:(lay-rnna, qui équivaut
a
Fernmes des liettco inha–
bités
(2).
Nous avons déja vu le respect qu'ils professaient pour la vir-
(1) Marmontel' dit en parlant des Incas :
«
Ce fut partout le caractere de la théocratie
d'exagérer la rigueur des peines; mais chez un peuple laborieux, occupé, satisfait de
son égalité,sur d'un bien-etre simple et doux, sans ambition, sans envie, exempt de nos
besoins fantasques et de nos vices raffinés, ami de l'ordre, qui n'était que le bonheur
public distribué sur tous, attaché par reconnaissance au gouvernement juste et sage
qui faisait sa félicité, l'habitude des bonnes mceurs rendait les lois comme inutiles :
elles étaient préservatives et presque jámais vengeresses.
»
(Les Incas,
chap. 2.)
- Cantu, en parlant de la morale des anciens Péruviens, s'exprime ainsi :
(<
Leur
morale se réduisait
a
trois défenses:
n'étre ni voleurs, ni oisi{s, ni menteurs.
Commc
ils étaient persuadés que les désastres publics et privés provenaient des crimes com–
mis,-!ls allaient dénoncer aux juges ceux meme que couvrait le secret; s'il fant en
croire'Vega,c'est tout au plus si, sur un territoire aussi étendu, il se trouvait dans une
année un -délit punissable. Il n'est done pas surp1•enant que d'Acosta regarde les Péru–
viens comme supérieurs aux Grecs et aux Romains en fait d'institutions politiques. "
(Histoíre Umverselle,
livre XIV, chap. 8.) -Garcilaso de la Vega,
Comentarios
Reales,
1•
Part., Lib.
II¡
Cap.
13.
( 3 )
Garcilaso de la Vega,
Comentarios Reales,
1•
Part., Lib. IV, Cap.
16.