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LIVRE QUARANTE-QUATRIEME.
progres de ccttc humcur dcspotiquc, fantasquc
et inlcmpéranle, qui ne ticnt pas plus comptc
des caracteres que des éléments; qui traite les
hommcs, la naturc, la fortunc, commc des su–
jcls lrop hcurcux de lui obéir , bien imperti–
ncnls de ne pas le fairc toujours, humeur fatale
et puérilc !out
it
la fois, prenant mémc chez les
hommcs du plus grand génic quelque chosc de
l'cnfant qui désirc tout ce qu'il voit, vcut toul ce
qu'il désirc, le vcul sur-le-champ, sansadmcttrc
un délai ni un obstaclc, et cric, commandc,
s'emportc, ou plcure, quand il ne l'obticnt pas.
C'esl 13 bien plus que la déchéancc de !'esprit,
c'csl ccllc <lu caracterc, gaté par le dcspotismc,
et c'cst lavraic cause
1¡u'on
vcrradomincr d'unc
maniere désastrcusc dans les événemcnls qui
vont suivrc!
Quoiqu'il n'espéd t plus le succcs de sa ma–
nccuvre contre l'arméc du Dniépcr,
il
y avail
une chosc qu'il cspérait encore, el qu'il alten–
dait avcc.unc plcine confi•ncc du maréchal Da–
voust, c'csí que le princc Bagralion scrait rcjcté
bien bas sur le Dniéper, au-dessous de Mohilew
au 111oins, ce qui
condamncrait
Ja
sccondc
arméc
russc
it
faire un longdétour, et l'crnpccberait de
venir au secours de Barclay de Tolly en tcmps
utilc. Napoléon ordonna done au maréchal Da–
voust de lcnir forme
i1
Mohilcw; il prcscrivit au
prince <le Schwarzcnbcrg de s'approcher de la
grande nrméc avec le corps autrichicn, en rc–
montont la Lithuanic du sud au nord par Prou–
jany, Slonim et Minsk (voir la cartc n°
5'•),
el
aux Saxons de rétrogradcr ponr allcr prendre la
place des Autrichicnssur le haut Bug, aux fron.
tiercs de la Volhynic et du grand-duché de Var–
suvic.
JI
avait, en effct, promis 1 son beau-pcrc
de fairc servir les Aulrichicns sous ses ordres
directs, et pour ce molif
i1
trnvaillail
it
les rap–
procher du quartier général; de plus. il ne
complait pas asscz sur eux pour lcur conficr
i1
la
fois la mission de gnrdcr le grand-duché, et Ja
mission d'insurgcr la Voll1ynic, et il aimait bien
micux, avcc raison, conficr
l
1
unc el l'autrc aux
Saxons, possesscurs de la Polognc actucllc, el
probablemcnl de laPolognc f'uture.
Ces disposilions ordonnées,
il
revint toul cn–
tier
a
son aulrc manccuvre, qui étail bien plus
importantecneorcque ecllc donl nous venons <le
racontcr l'avortcmcnl, car s'il réussissait, en mar–
chant par sa droite,
it
glisscr al'ec la plus grande
parlic de ses forces devanl le camp de Drissn,
¡,
débordcr Barclay de Tolly,
a
le tourner en pns–
sanl
b
Dwinn
ú
l'improvistc,
t1
le coupcr
a
la fois
de Moscou et deSaint-Pétcrsbourg, il rcndait im–
possible le projct de rctraitc indéfinic eongu par
les Husscs, ou les réduisait
a
ne l'cxécutcrqu'a–
vcc Jcs débris désorganisés, el pouvail cspérer
de voir bicntót un nou\'cau Darius cnvoycr des
suppliants au camp d'un nouvcl Alcxnndre!
Pour le succcs de ce grand mouvcmcnt, le
séjour l'ait
a
Wilna était rcgrcttablc. Entré le
28 juin dans celtc ville, Napoléon y était cncorc
le 'i6 juillct nu malin : mais ce tcmps avail été
rigoureusemcnt néccssaire pour arrCtcr la dé–
scrtion dans les corps, pout• lcur cxpédicr l'ar–
tillcl'ic rcstée en al'l'icre et alleléc avcc une par–
tic des chcvaux des équipagcs de vi.vrcs; pour
réorganiscr ces équipagcs en les réduisant aux
voilurcs les plus légcres; pour cuirc du pain;
pour assurer huit ou dix jours de subsislancc
a
la gardc, condition de discipline, indispensable
mcmc dans ce corps d'élilc; pour procure!' au
gros de l'arméc une réscrve de vivres destiuée
aux corps qui n'auraicnt absolumcnl ricn lrouvé
sur les routes; pour altelcr enfin les équipagcs de
pout. Bien que dix·huil jours se fusscnl écoulés,
pas une lJCurc n:avait été pcrduc pour assurcr
autant que possible ces résullals de prcmicrc né–
ccssité. lis étaicnl cnfin
a
pcu pres ccrtains, et
des ce momcnt, Napoléon, plein de eonfiancc,
allcndail toul ele son génic et de la bravourc tic
ses troupes. 11 lui était arrivé
11
Wilna des nou–
vclles du monde entier. On ne pouvait plus dou–
ter, malgré la dissimulation des Turcs, de lcur
paix nvcc les Russcs, car, aprCs en avoir
rc~u
la
confidcncc orgucillcuse de
M.
de Balachoff, Na–
poléon venait d'cn acquérir la prcsque ccrlitudc
de ses agcnts
¡,
Constantinople. En memc tcmps
l'adhésion de Bcrnadotte
b
la cause de la Russic
n'était plus
b
mctLrc en qucstion. Napoléonpou–
vaiLdone, d:rns un avenir prochaín, prévoir Par–
rivée sur sa di·oilc<les armécs russcs de Torma–
so!Tel deTchitchakoff, et pcut-clrc une deseente
des Suédois sur ses dcrricrcs. Ces nouvellcs, il
est vrai, étaienl eontr·e-balancécs par des nou–
vclles favorables d'Angleterrc el d'Amériquc, car
on annongail la morl de
~J.
Pcrccval, assassiné
a
l'cnlrée du Pal'iemcnl, un rcviremcnl prochain
dans
la
politiquc brilannique, cnfin la cerl.it.udc
d'unc déclaration de gucrrc de l'Arnériquc
a
la
Grandc -llrctagnc. Inquiétanles ou favorables,
Napoléon ne tcnail comptc de ces rumcurs loin–
tnincs, et, avcc raison, faisait touL consistcr dans
le succcs des grandes opérations qu'il allait en–
treprcndrc. 11 avait achcminé déja la eavaleric
légcrc de la gardc sous le général Lefcbvrc-Dcs-