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LIVRE QUARANTE-QUATl\IEME.
M. de Balacho!T n'était pas nssez instruit des
faits pour répondrc
a
ces nsscrlions pa1· la simple
vérité. 11 se contcnla de répétcr que son maitrc
souhaiLail la paix, et que, libre de toul cngagc–
mcnt, il pouvait cncorc la conclurc aux condi–
lions
~ui
avaicnt, dcpuis 180i, mainlcnu la
plus parfailc inlclligcncc entre les dcux cmpi–
rcs. - Vous ctcs libre, dit Napoléon,
a
l'égnrd
<les Anglais,jc le crois; mais le rapproehcmcnt
sera bienlóL fniL. Un scul courricr suflira pour
se mctlrc <l'accord et pour scrrcr les nc.cuds de
In nouvcllc alliancc. Votrc empcreur a depuis
longtemps commcncé
á
se rapprochcr ele l'An–
glctcrrc; clcpuis longtcmpsj'ai vu ce mouvcmcnt
se produirc dnns sn politiquc. Que! bcau rcgnc
il aurnit pu a1·oi1· s'il l'avait voulu ! 11 n'avniL
pour cela qu'll s
1
cnlcndrc avcc rnoi.... Je lui ai
clonné In Finlandc (grande fnutc dont Napoléon
n'aurait pas
dú
se vanter!), je lui avais promis
InMoldavieet la Valnchic, el il allniLles obtenir ;
mais loul
i1
coup il s'cst laissé
circo1wcnir
par
mes cnncmis,
il
s'cn cst mCmc cntouré cxclusi–
vcmcnt ;
il
a tourné contrc moi <les armes qu'il
dcvaiL réscrvc1· pour les Turcs, et ce qu'il aura
gagné, ce sera de n'avoir ni la Moldavic ni la
. Valachic... - On <lit mcmc, njouln Napoléon
d'un ton intcrrognlcur , que vous avcz signé la
paix avcc les Turcs sans avoir obtcnu ces pro–
vinccs.
-
M. de llalncho!T ayanL répondu nflirnrnlivc–
mcnL, Napoléon, vivcmcnt affcclé, snns le témoi–
gncr, continua l'cntrcticn. - Votrc
mailre,
rcpril-il, n'aurn clone pns ces hclles 1wovinccs :
il numil pu cepcnclanl les njoulcr 1 son empirc,
et
en
un scul rCgnc
il
aurait ainsi élcndu la
llus–
sie du golfc de llothnic aux bouchcs du Danube!
Calhcri11c In Grande n'cn avait pns fnil aulanL.
Tout cela il l'aurail clti
!i
mon amiLié , el nous
nurions cu, lui
et
moi,
la
gloire
de vninerc
les
Anglais, qui
cléjü
étaicnl réduits aux clcrniCres
cxlrémilés. Ah! qucl bcau rcgnc, répéla plu–
sicurs fuis Napoléon ' aurait pu cLrc cclui
d'Alcxandre
!...
Mnis il a
micux aimé
s'cntourer
1lc mes cnncmis. 11 a appclé nuprcs de lui un
Stcin, un Armfeld, un Winlzingcroclc,
1111
Jlcn·
ningsen
!
Slcin, chassé de son pnys ; Armfcld,
un inlrignnt,
un délrnuclié¡ Wintzingcrode, su–
jct révollé de In FPnnce; Bcnning5cn, un pcu
plus mililai1·c que les aut1·es, mnis incapahlc,
r1ui 11'a ricn su fairc en ·1807, el qui ne 1·nppcllc
11 votrc nrnilrc que cl'horriblcs souvcnirs 1 Jlc–
courir
~1
ele
triles gens, les mctl1·e si prC:; de sn
pc·1·.-onnr! ...
A lahonnc licurc,
s
1
ils
1~1nirnl.
rn-
pal,lcs; mais lcls qucls, on ne pcnl s'cn servir
ni pour gouvcrner, ni
pOUI'
coml>attre. Barclay
ele Tolly en saiL, clit-on, un pcu plus que les au·
tres; on ne le croirait pas
h
en juger d'aprCs
vos prcmiers mouvemenls. EL
!i
cux lous, que
fonl·ils? Tandis que Pfuhl proposc, Armfcld
contredit, Dcnningscn examine, Barclay,
clrnrgé
cl'cxéculcr, ne sniL que conclurc, el le temps se
passe ainsi
h
ne rien foire. IlagraLion scul est un
vrai mililairc; il npcu d'espril, mais il a ele l'cx–
péricnec, du coup d'roil , ele la décision.... EL
que! rólc fait-on joucr
a
volrc jcunc mailrc au
milicu de ccllc cohue? On le compromeL, on
foil pcscr sur lui la rcsponsabililé de loules les
faulcs. Un souvcrain ne doiL clrc
a
l'arméc que
lorsqu'il cstgénéral. Qunnd il ne l'csl pas, il doit
s'éloigncr, el laisscr agir en liberté un général
responsable, nu licu de se mcllrc
a
cólé ele lui
pour le conlraricr , el assumer toulc la rcspon–
sabililé sur sa tete. Voycz vos prcmieres opéra–
lions: il y a huit jours que la campagnc est
commcncéc, et vous n'avcz pas su défcndrc
Wilna; vous eles coupés en elcux et chassés de
vos provinccs polonaiscs. Vot1·c arméc se plaint,
murmure, el ellea raison. D'aillcurs je sais volrc
force; j'ai complé vos balaillons aussi cxaclc–
mcntque les miens. Ici,en ligne, vous n'avez pas
200 mi llehommcsu m'opposc1', cLj'cn ai trois fois
aulnnt. Je vousdonnc mn parolc d'honncur que
j'ai
~50
millchommcs clecc cótédc laVislulc. Les
Tures
ne
vous scront
d'aucune
utililé; ils ne
sonl bons
h
rien , et vicnncnL ele le prouvcr en
signant la pnix avcc vous. Les Suédois sont elcs–
linés :\ clrc menés par des cxtravagants. lis
avaicnt
un roi fou;
ils
le ehangent, et ils en
prcnncnl un qui dcvicnl fou aussilóL, car il faut
l'cLrc pour s'unir
il
vous qunnd on csL Suédois.
~lnis
que sont au surplus lous ces alliés ensem–
ble? que pcuvcnt-ils? J'ni ele bien aul1·cs alliés
dans les Polonais! ils so11l 80 mille, ils se bnt–
lenL nvcc rngc, et seronl bienlót 200 millc. Je
vais vous cnle\
1
C'r les provinccs polonaises; j'óte–
rai
a
lOllS les pare11ls de \'O[l'Cfnrnille régnanlc
ce qui lct11· rcslc en Allcmagnc. Je vous les rcn–
vcnni
tous snns couronne
el
sans palrimoine.
Ln Prusscelle-mcmc, si vousparvcncz
a
l'ébran–
lcr, je l'c!Taccrai de la carie el'Allcmngnc, el je
vous donncrni un cnnemi.juré pour \
1
oisin. Je
vais vous 1·cjclc1· nu dela ele la Dwinn et du
Dniépcr, el rélablir conlrc vous une barriere
que l'Europc n
été
liicn coupablc el bien avcuglc
de laissc1· abt1t.l1'c. Voilñ ce que vous nvcz gagné
;'1 l'Ompre :w{'e
moi rt ll qniltrr mon nlli:rncf'.