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LIVRE QUARANTE-QUA'fRIEME.
objels, Napoléon donna tous ses soins
1
une
alfnirc devcnue Ja plus urgente de loulcs ccllcs
qui pouvaicnt atlircr son attention, J1alfoirc des
virres et des conrois. D
1
abord, avec les m;:u;ons
de Ja gardc el eeux du maréchal Davoust, il
ordonna Ja conslruelion
a
Wilna de fours capa–
blcs de cuirc cent mille rations par jour. Les
charpenlicrs manquant po111· fo<;onncr eles ein–
lrcs, on les prit dans les corps.Les briques, scul
gcnre de matériaux qu'onpút cmploycr dans ce
¡rnyso
U
lapicrrcétait mrc, ne se trouvaicnt mal–
l1eurcuscmenl qu',\ quclque distanee de Wilna.
Adéfautdcs chevaux deJ'arlilleric, prcsque tous
épuisés, Nnpoléon n
1
hésita point U
rc1¡uérir
les
chcvaux ele voiture des états-majors, afin de
transporter les briques
11
picd d'reuvrc. Chaque
jour il allait Jui-méme examiner Je dcgréd'avan–
cerncnt de ces
lravaux.
La conslruclion des fours n'était pas Ja seule
des diffieultés
11
vainere pom· assurer
o
Wilna Ja
suhsistancc <le l'arméc. Les grains
1
malg1·é les
rnvagcs de l'cnncmi, étaicnt nsscz abondnnts.
Mais les Russcs, n'ayant pas toujours
le
temps
de les délruire, s'attaquaicnt parlieulicrement
aux moulins.
11
fallait done les réparer, ou
rcquérirccux qui étaient intncts, pour convertir
Je grain en farine. Pro1•isoirement, on prit les
forines du ·I" corps, toujours Je mieux appro–
visionné, snuf
a
Jui en tcnir comptc plus lard.
Quant aux boulangcrs pour pétrir et cuirc le
pain,
OH
en a\'Uit suffisammcnt, g
1•d.cch
CCUX
elont Ja gardc el le
1"
corps s'étaicnt pourvus.
Napoléon songca cnsuitc
a
créer de grands
nrngasins, tant
u
Kowno et
i1
Wilna que dans les
villes elonl on allaitsuccessivement s'ernparcr.
JI
résolut de fnirc en Lithuanie une réquisition
de 80 millc quintaux de grains, d'unc <JUantité
proporliun11éc d'avoinc, de paillc, de foin, de
foul'l'agc, etc. Quant
i1
la viandc, clic abondait,
gdcc au bétail qui avait étéamcné surpicd
n
Ja
suite des
lroupcs.
La dysscntcric mCmc, qui
commcn~niL
ú
se répandrc, tcnaiL en partic U la
grande quantiléde viandc mangéc saos sel, sans
pain
1
sans \'in. Napoléon ordonna qu'aprCs ces
prcrniCrcs
ré11uisitions
on se procurcrait, soit 3
cornptc des contributions ducs par Je pays, soit
1t
prix cfnrgent, un million de quintaux de grains.
Si Ja récoltc élait bonne, et que Ja moisson ne
ftl t point lroubléc par la gucrrc, il n'étail pas
impossiblc de rénliscr cct immcnsc approvision·
ncmcnt.
Les moyens de transport, i1¡dispensablcs
a
njoulcr aux :ipprovisionnements, réclamaient
une nouvclle intervention deJa puissantc volonté
de Napoléon. Les premiers convois, dirigés par
le colonel B.astc, qui en plus d'un endroit avait
été obligé ele fairc curcr les canaux, et auquel
il
en avait coúté des peines infinies pour appro–
prier les batirnenls
a
la nalurc des cours d'eau,
venaient de franchir Ja distance de Dantzig
a
Kowno. Napoléon en ressentit une vraie joic.
Mais
il
restait a faire remontcr ces convois ele
Kowno
a
Wilna par la rivicre sinueusc de la
Wilia. C'était un trajct de vingt jours, prcsque
aussi long que cclui de Dantzig
a
Kowno, bien
que la distancc ne fUL que d'un cinquierne ou
d'un sixieme. Napoléon fit reunir des bateaux
pour cssayer, avcc le sccours des marins de la
gardc, d'abrégcr cctte navigation. Son projet, si
cetessai ne réussissait pas, était d'y rcnonccr, et
de Ja rcmplacer par une grande cntrcprisc de
transports par terre, qu'il se
propos~it
de con–
ficr
n
une compagnic de juifs polonais. Les
grains n'élr1nt pus difficiles
1
trouver dans les
licux ou l'onétaiL, il limita les objets
o
transpor–
tcr nux farincs, et apres les farincs aux spiri–
tueux, au riz, aux cffcts d'habillcmcnt, aux
munitions d'artillerie.
L'organisation qu'on avait donnéc
aux
équi–
pagcs militaircs n'avait pas cu lesrésultatsqu'on
en atlcndait. On avait pcrdu, de l'Elbe au Nié–
mcn, une moitié des "oiturcs, un ticrs des chc–
vaux,
un quart des hommcs. Ainsi
que aous
J"avons <lit, les ehars légers
o
Ja comtoisc étaicnt
seuls arrivés.
JI
en restait toulcfois un certain
nombre en 31•rii:rc. Napoléon décida qu'on lais–
serait
a
Wilna les chars du nouveau modele
comrnc trop lourds;qu'on n'amCncrait
en
Russie
que les caissons d'ancien modele et les chars
o
la
comtoisc, muis que Je train d'artilleric ayant
pcrdu bcaucoup de cbcvaux, et les munitions de
gucrrc Jui scmblanl plus néccssairesque Jepain,
car si dans les champs on trouvait <;n et Jaquel–
qucs vivrcs, on ne trouvail nullc part des gar–
gousscs et des cartoucbcs, on oppliquerail
a
rartillcric unepartic des chcvauxdes équipagcs.
Quant
nux ''oiturcs
qui
rcstcrnicnl ainsi saos
attelagcs, il ordonna d'y attclcr des booufs, et,
lorsqu'on n'aurait pas de breufs, des chcvaux
du pays, cspcce pelitc, muis forle, et dure
i1
la
fatigue, quoiquc infcetéc eomrnc les hommcs de
l'horriblc maladiede la plique. Molhcurcusemcnl
ces ordres étaient plus fuciles
a
donncr qu'a exé–
cutcr,
car
il n'était pos aisé
de
se procurcr des
jougs pourattelcr les breufs, des fcrspour garan–
tir lcurs pieds, des boll\'icrs pour les conduire.