LIVllE QUARANTE-QUATRIEME.
il s'allacha surtouL
11
répondrc
a
ces dcux gricfs
Je maniere
it
mcttrc tous les torts du cóté de
son advcrsairc. 11 fil done appclcr M. de Bala–
choff, ministre de Ja policc, venu avcc lui
a
Wilna, hommcd'csprit et de tact, cL lechargca
d'aller dirc
it
Napoléon combicn il s'étonnaiL
d'unc rupturcsi brusquc, qu'aucunc déclaration
de guerrc n'avait précédéc; combicn il trouvait
Jégcr Jemotif tiré d'uncdemande de passc-ports
faite par le princc de Kourakin , lorsqu'on savait
que ce princc n'était pas autorisé
a
la fairc
j
combicn enfin Ja prétencluc condition d'évacucr
la Prussc était cllc-mcmc un gricf pcu sérieux,
. puisqu'ellc avait été proposéc, non comme une
satisfaction préalablc dcvant précéder toutc né–
gociation, mais sculement commc eonséquencc
promise et certainc de tout arrangcment paci–
fique. Alexandre autorisa rnéme M. de Balachoff
a
déclarcr que ectte évacuaLion était si peu une
condition absolue, que si les
Fran~ais
voulaient
s'arrCtcr au Niémcn, il conscntait
a
négocicr
tout de suite sur les bases incliquées dans les di–
vcrscs communications précédcntcs. Ces orclrcs
clonnés, l'empercur Alexandre partil le 26 juin,
en adrcssant
a
son pcuple une proclamation eha–
leureusc, dans laquelle il prcnait l'cngagement
solenncl de ne jamais lraiter lant que l'ennemi
scrait sur Je sol de Ja Russie.
Tanclis qu'Alexondrc s'éloignait,
M.
de Bala–
ehoff eourut
a
la rcnconlre de l'arméc
fran~aisc,
et la trouva en roulc sur Wilna. 11 cut d'abord
quelquc peine
a
se fairc reconnaitrc commcaidc
de ·camp de l'cmpercur Alcxandrc, puis ful ad–
mis
a
ce litre, et conduiL auprcs de Mural, qui,
chamurré cl'or, Ja tétccouverlc deplumcts, galo–
pait au milicu deses nombrcux cscaclrons.
Mural, suivant sa coutumc, facilc, aimablc,
mais indisc1·et, fit Je plus gracicux accucil
a
M. de Balachoff, alfccla de déplorcr cclle nou–
vellc guel'l'e, de regretter vivemcnt son bcau
royaumc de Naples, de ne clésircr aucuncmcnt
cclui de Polognc, de se montrcr cnfin l'inslru–
mcnl raisonnablc d'un maitrc trcs-pcu raison–
nable, el accompagna ces sagcs propos d'unc
infinité de démonslrations gracicuses, dont
il
avait le lalcnt nalurcl, malgré une éducation
pcu soignéc. 11 renvoya ensuitc M. de Balachoff
aux avant-postcs de l'infanteric, qui venaient
aprcs ceux deJacavalcrie. M. deBat1choff y ren–
contra un tout aulre accucil. Présenté au maré–
chal Davoust, il ful
rc~u
avcc froidcur, réscrve
et silcncc. Ayant cxprimé Je désir de pénétrer
immédiatcment jusqu'a l'cmpcrcur Napoléon, il
ne pul en obtenir l'autorisation. Le maréchal lui
allégua ses ordrcs, et Je rctiut pour ainsi dire
prisonnicr jusqu'a une réponsc du quartier gé–
néral. Sur la fin du jour, il l'cngagca
a
partager
son repas, el le
fit
asseoir dcvant une table qui
consistait en une porte de maison qu'on avait
arrachéc de ses gonds et étendue sur des ton–
neaux, qui n'était chargéc que de mclsd'une ex–
treme frugalité, s'excusadccctle hospitalité toutc
militairc, et ne lui adressa pas une parolequi cút
lrait aux aífaircs de la guerrc ou de Ja _politique.
LeJendcmain matin, l'ordrcétant vcnu de garder
M. de Balachoff jusqu'a Wilna, ou
i1
dcvait ctre '
rc~u
par l'Empereur, le maréchal Davoust Jui
Jaissa sa maison qui ne faisait qued'arriver, l'cn–
gagca
a
s'en servir libremcnt, Jui donna pour le
gardcr un officicr aussi taciturnc que lui-merne,
et monta a cbcval afin d'allcr se mcttrc
a
la tele
deses t1·oupes. M. de Balachoff dut 'doneattendrc
J'cntréc des
Fran~ais
a
Wilna
JlOUI'
enlrelcnir
Napoléon.
Ce mcmcmatin du 28, la cavaleric du général
llruycrc arril•a aux portes de Wilna, en dcsccn–
dant les cotcaux qui bordcut la Wilia. Elley rcu–
contra un gros délachcmcnt de cavalcrie russc,
appuyé par de l'infantcric et par quclques picccs
d'artillcric altclécs. Le choc ful asscz vif, mais
l'avant-gardc cnnemic, apres avoir résisté qucl–
qucs instanls, se rcplia dans Wilna, en brúlant
les ponts de Ja Wilia, et en mellan! le fcu aux
magasinsdevivres et de fourrages que contcnait
Ja ville. Le maréchal Davousl, qui suivait
a
une
licue de distancc Ja cavalcric de Mural, entra
elans Wilna avec clic. Les Lithuanicns, quoiquc
asscrvis aux llusscs dcpuis plus dequarante ans,
et déja un pcu
fa~onnés
au joug, accucilli1·cnt
les
Fran~ais
avccjoic, et se haterent ele les aielcr
n,¡éparcr le pont de Ja Wilia. Au moycn dequel–
qucs batcaux du pays, on rétablit
le
passagc de
Jarivicrc, peu largc en cct cnclroit, et on courut
ensuile
a
la poursuitc eles Russcs, qui se rctirc–
rcnt rapidcment, mais sans désordrc.
Ainsi la capitalc de Ja Lithuanie vcnait d'étre
conquisc prcsquc saus coup férir, et aprcs quatre
jours seulemcnt d'hostilités. Napoléon, parli Ja
vcillc de Kowno, et arri1•é vcrs midi, f¡t son
cntrée dans Wilna au milieu du concours cm–
pressé des habitants, qui pcu
1
pcu s'échauf–
faicnt, s'animaicnl au contact ele nos soldats,
sul'lout des soldats polonais, et au souvenir de
Jcur antiquc liberté, que les plus 'igés d'cntrc
cux arnicnt sculs connuc, el donl ilsavaicnt sou–
vcnt raconLé les sccncs
a
Jeurs cnfants. Les sci-