PÉROU ET BOLIVIE.
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meur
mena~ante.
Chacun , estimant ses
services au dela de leur valeur, cría
a
l'injustice et fi t entendre d'amere ré–
criminations. Ceux qui avaient
re~u
peu, parce qu'i ls ne méritaient pas
davantage, s'i ndignerent en voyant
qu elques-uns de leurs compagnons
plus t•ichement récompensés. On mur–
mura surtout de voir Hinojosa grati –
fié de tous les Jnd iens que possédait
Gonzale Pizarre clans la province des
Charcas, et, en outre, d' une mine
d'argent dont il pouvait tirer des sorn–
mes inca lcu lables. D'autres capitaines
égalcment bien pnrtagés furent eu
bulle aux observations malveillantes
et uux ressentirnents ele leurs cama–
rades. Tontes les mau vaises passions
qui éLaient res lées un moment assou–
pi es, se rl:veill erent furi euses; on
chargea le président de mal édictions;
on l'accusa d'ingratitude, d'injusti ce ,
decriminell cpartialité. Une nouvelle in–
surrection aurait infailliblement éclaté
si les mécontcnts avaient trouv é un
drapea u quelconque auquel ils pussent
se rallier; mais
il
leur manq uait un
chef, et ne s¡¡chant
i.t
qui obéir, décon–
certés d'a ill eu rs par la fermeté du pré–
sident, ils finirent par renoncera lenrs
pi·ojets de révoltc.
~I s
continucren t
cependant
ii
réclamer ; mai Gasea ,
<1ue ses habitudes d'inqui iteur avnient
fac;;onné a la dissimulation, les berca
des plus séduisantes promesses, et pa'r–
vint, par d'lwbil es cajoleries, a leur
faire prendre patience; en meme temps
iI
travaillait
a·
raffermir
l'autorité
ébranlée dans tout l'empire du Férou.
JI
régularisa et simplifia la perception
des revenus publics:
il
décréta des re–
glements sur le traitement des
lo–
diens, afin de les soustraire a la tyran–
nie de leu rs maítres et de les instrui re
dans la religion chrétienne. En un
mot' il rétablit l'ordre, apprit a faire
respectr r le pouvoir et fac ilita ainsi
les voies du gouvernement
iJ
ses suc-
ce seurs.
.
Cependant on apprit qu e le nouveau
parl age des terres et des Ind iens don–
nai
t
li eu
a
des conflil déplorables en–
tr
le chef jaloux les uns de autres.
Le présiclen t avait réservé toutes- ses
fa~e~rs,
ou du moins
se~ don~
les plus
prec1eux, pour ceux qui avaient con–
tribué
a
lui li vrer la flotte ele Pizarre ·
c'est ainsi que Hinojosa, chef de
cett~
escadre, avait été si magniíiquement
réc?mpensé, tandis
qu~
d'autres, qui
ava1ent rendu des serv1ces non moíns
réels a la cause impéri ale, a1•a ient été
oubliés ou dédaignés. Diégo Centeno,
par exemple, malgré l'empressement
avec lequel il avait mis son infl uence
· et sa petite armée
iJ
la disposiLion de
Gasea, s'étai,t vu complétement éli–
miné de la li ste des copar tagea nts , et se
retroul'ait apres la guerre dans le
meme état de fortune qu'auparavant.
II résolut de se rendre en Espagne,
pour porter ses plaintes au pi ed du
trone et demand er rép¡¡tation de cette
criante injustice. L a ·nouvelle de ce
projet s'étant répandue dans le pays ,
quelqucs oflfoiers , qui avai ent cu une
grosse part du butin, craignant que
Centeno ne cherchftt
a
leur nuire dans
)'esprit de l'empereur ou des minis–
tres , ourd·rent un complot .infllme
contre leur ancien camar<!de : ils l'a t–
tirerent
iJ
un banquet solennel, et
l'empoisonnerent. Ce fait seul peut
donner une idée de l'exaspération ct·es
esprits et du déchainemeot de passions
qu'a1•aient provoqué les irrégularités
du partage des l:ii ens.
.
JI
y avait dix-sept mois que le pré–
sident était il Lima, et il songeait a
retourner en Espagne pour se reposer
de ses
fati~ues.
J\Jais la mort de Cen–
teno, de Gabriel de Royas, du licen–
ci é Carvajal, et de quelques autres
personnages aussi ricbes qu ' influents,
aynnt rendu vaca nts des bi ens consi–
d.érabl es , force.ful
a
Gasea de procé–
der
a
une nouvelle répar tition. J\Ja l–
heureu ement
il
avai t promis bea ucoup
plus qu'il ne pouvait donner; il prévit
done un nou vel orage se111blable
iJ
ce–
lui qn'il avnit déjil c;.onjuré; rhais il
résolut de s'y soustraire par la fuite .
Tout étant pret pour son départ, il
s'embarqua, apres avoir enjoint.aux
membres de l'audience de Lima de
n'ouvrir le décret que huit jours apres
que le vaisseau aurait levé l'ancrc. 11
avait tellement peur de la colere des