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liUNIVERS.
saos honte et saos remords. A peine
y eut-il, pendant ces discussions, un
seul Espagnol, au Pérou, qui n'aban–
!lonnat le paréi' gu'il avait embrassé
d'abord, et les associés avec lesquels
iJ
avait été uni; et qui ne violilt tous
ses engagements. Le vice-roi Nugnez
Véla fut perdu par la trahison de
Cépéda et des autres juges de l'au–
dience royale, bien qu'ils fussent obli–
gés, par le devoir de leur place, de
soutenir son autorité. Les instigateurs
et les complices de la révolte de Gon–
zale Pizarre furent les premiers
a
l'a–
bandonner et
a
se soumettre
a
ses en–
nemis. Sa flotte fut livrée
a
Gasea ·par
l'homme qu'il avait choisi entre tous
ses officiers pour ·Jui confier cet im–
portant commandement. Dans la jour–
née qui décida de son sort, des vété–
rans,
a
la vue de l'ennemi' jeterent
Jeurs armes saos combattre, et aban–
doirnerent un chef qui les avait si sou–
vent conduits
a
la victoire. L'histoire
présente rarement des exemples d'un
mépris si général et si peu dissimulé
des príncipe de la monde et des obli–
gations qui lient l'homme
a
l'ho1llme,
et qui constituent l'union socia le. On
ne trouve ces mreurs que dans des
hommes qui habi tent des pays tres–
éloignés du centre de l'autorité, ou
l'espoir du gain n'a point de bornes,
ou des richesses immenses peuvent
faire ol!,IWier les crimes par lesguels on
les a aoguises; ce n'est que dans des
circonstances semblables qu'il est pos–
sible de trouver autant d'a1•idité, de
perfidie et de conuption qu'on en re–
marque_dans les conquérants du Pé–
rou."
Pi zarre n'existant plus , les partís,
privés de leur chef le plus puissant,
désarmerent pour un moment; ils at–
tendaient le président aux premiers
actes de son pouvoir", désormais sans
controle comme sans obstacle. Gasea
comprit la nécessité de donner un ali–
rnent
iJ
l'effervescence des esprits, tout
en la détournant des intérets politi–
gues du moment. 11 y parvint en ra–
nimant le gotlt des découvertes loin–
taiues parmi les aventuriers les plus
entreprenants.
JI
envoya Valdivia au
Chili pour continuer la conquete de
cette vaste contrée;
il
chargea Diégo
Centeno d'aller reconnaltr.e les régions
qu'arrosent la riviere de la Plata et ses
affluents. En choisissant pour ces ex–
péditions des chefs renommés et con–
nus pour leur courage
a
toute épreuve,
il était bien certnin d'entrainer sous
leurs drapeaux la foule des soldats que
séduisaient la perspective d'une for–
Íune rapidement acquise et les inci–
dents d'un voyage dans des pays in–
connus. En cffet, tous ceux qui avaient
encore quel fMUe chose
a
désirer et que
tourmentait la passion des aven-tures,
s'empresserent de s'enroler daos les
troupes expéditionnaires. Le Pérou se
trouva ainsi momentanément débar–
rassé de la soldatesque la plus fou–
gueuse et
1(1
plus diflicile
a
contenir.
D'autres soins, encore plus impor–
tants , préoccupaient Gasea. II fa llait
récornpenser, suivant l'usage et les
précédents étabJis , cette multitude
d'officiers et de fonctionnaires qui
avaient servi la cause royale et favo–
risé, soit en payant de leur personne,
soit en trahissant Pizarre, le succes
des entreprises du président.
JI
fallait
partager les terres des vaincus entre
tous ces hom1'nes avicies, contenter
toutes les exigences qui se pressaient.
autour du butin; et ce n'était pas chose
facile. Les demandes et les sollicita–
tions furent innombrables. Gasea fei–
gnit, par politique, d'écouter les ré–
clamations de chacun' bien décidé
a
ne faire que ce qui lui paraitrait juste
et convena ble. Il se retira, avec l'ar–
cheveque de Lima et un secrétaire,
dans un villagea douze lieues de Cuzco;
la il s'occupa sans reli\che de la répar–
tition des biens, et quand le travail fut
terminé, il partit pour Lima, en or–
donnnnt aux autorités de Cuzco de
n'ouvrir et de ne publier le décret de
partage que plusieurs jours apres son
df\part. 11 avait prévu les coleres et les
réclamations qu'allait exciter ce déc1·et;
et il aimait mieux ne pas etre présent
a
l'explosion de cet orag1t multiple et
formidable.
La lecture de l'ordonnance de ré–
partition produisit en effet une ru-