ÉDIFIANTES ET CURIEUSES.
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la
fausseté de t.:es suppositions, ou l'injustice de ces
reproches; Tout seroit iuutile , me
dit~il;
en vain
combattriez-vous Ieurs pratiques par les rais011s les
plus claires et les plus conv· ·ncantes; en vain. les
presseriez-vous d'y répondrc. Ils vous diront
ce
grand
apophtegmepour toute réponse; c'est ainsi qne notre
loile commande. Ils s'en tiennentla, etilss'y tienuent
opiniátrément.
J'ai
su de vieux caloyers, qu'un de
vos confreres, et apres lni le docteur Rhodino, natif
de l"ile de Chypre , ont fait autrefois la tentative
dont vous me parlez. On répondit
a
leur proposi–
tion, qu'on ne pouvoit leur accorder ce qu'ils de–
mat1doieut ; que si les jeunes caloyers devenoient
une fois savans, ils mépriseroient. les ancieus qui sont
ignorans; que quand ils auroient pris du goüt pour
l'étude, ils 'ne voudroieut plus bécher la terre, ni
s'appliquer aux ceuvres serviles; que l'anil)ition s'em–
parant de ces jeunes tetes, les porteroit peut-etre
a
quitter les monasteres pour etre éveques; que la
jalousie se glisseroit insensiblemeut parmi les jeunes
religieux; que la distinction qu'on mettroit entr'eux
seroit odieuse, et que ceux qui ne seroient destinés
qu'
a
chanter au chceur' ou
a
travailler
a
la campagne'
ne verroient pas de bon ceil leurs freres occupés
anx hautes sciences. Ce récit <le mon caloyer ne me
surprit point; je trouvai ses réponses tres-vraisem–
hlables, et je crus y reconnoitre le génie et Je style
de certaines communautés peu régulieres : l'igno–
rance en place étouffe autant qu'elle peut le méát.e
naissant, et elle craint que le mépris que l'on feioit
d'elle ne soit suivi de la perte de l'autorité. Ils ajon–
terent, continua-t-il, que s'ils recevoient dans l'cn–
ceinte de leurs monasteres des religieux francs, ils
seroient suspects aux Turcs , et se feroient des af–
faires avec les czars de Moscovie, dont il est de leur
intéret de se ménager la protection et les bonnes
graces. Ces réponses fermerent la bouche aux sup–
_plians,
el
firent échouer le projct.