![Show Menu](styles/mobile-menu.png)
![Page Background](./../common/page-substrates/page0938.jpg)
EXP
en ]o}gtlant les fenfa-tions agréables des accords
a
l'
e:x:prejfion
de la mélodie' par le meme principe dont
je viens de parler. Mais l'harmonie fait plus encare;
elle renforce
l'expreJ!ion
merne' en donnant
plus
de
jufieífe & -de préciíion aux intervalies mélodieux;
elle anime leur caraél:ere,
&
marquant exaél:ement
leur place dans l'ordre de la modulation, elle rap–
pelle ce qui précede, annonce ce qui doit fuivre,
&
líe ainfi les phrafes dans le chant, comrne les idées fe
lient dans le difcours.
L'harmonie, envifagée de cette maniere , fournit
au
compoíiteur de graf?ds moyens
d'expre.f!ion,
qui
lui échappent quand il ne cherche
l'e"!prejjion
que
eans la feule harrnonie; €ar alors' au lieu d'animer
l'accent, ill'étouffe par fes accords;
&
tous les in–
tervalles, confondus dans un continuel rempliífage,
n'offrent
a
l'oreille qu'une fuite de fons fondamen–
~aux
qui n'ont rien de touchant ni-d'agréable,
&
clont
l'effer s'arrete au oerveau.
Que fera done l'harmonifie pour concourir
a
I'ex–
prejjion
de la mélodie
&
lui donner plus d'effet?
Il
évitera foigneufemenr de couvrir le fon principal
dans la combinaifon des accords ; il fubordonnera
tous fes actompagnemens
a
la partie chantante; il en
aiguifera l'én.ergie par le concours des autres parties;
il
renforcera l'effet de certains paífages par des ac–
cords
fenfible~;
ii
en dérobera d'autres par fuppofi–
tion ou par fufpenfion, en les comptanr pour ríen
fur la baífe; il fera fortir les
expreifzons
fortes par des
diífonances majeures ; il
réfervera les mineures
p>our des fentimens plus doux; tantot il liera toutes
fes parti
es par de fons continus & cóuLés; tantot il
les
f~ra
conrra.fi:er fu·r le chant par des notes piquées,
tantot il frappera l'oreille par des accords pleins ;
tantot
il
tenforéera l'accef\'t par le choix d'un feul
intervalle. Par-tour il rendra préfent
&
feníible l'en–
charnement des modulations ,
&
fera fervir la batfe
&
fon harmonie
a
déterminer le lieu de duque paf–
fage dans le móde, afin qu'on n'entende jamais ún
intervalle
Olt
ttn traÍt de chant , fanS fentir en merne
tems fon rapport avec le tour.
A
l'égard du rhythme , jadis íi puiífant pour clon.
ner de la force ' de la vari
1
té ' de l'agrément
a
l'hat–
monie poétique; íi nos langues, moins accentuées
& moins profodiques, ont perdu le charme qui en
réfultoit, notre mufique
oo
fubíti tite un autr'e plus ·
indépendant du difcours, dans
1'
1
galiré de la mefure,
&
dans les diverfes comb1naifons de fes tems' foit
a
la fois dans le tout, foit féparément dans chaque
partie. Les quantités de la langue font prefque per–
dues fous celle des notes;
&
la mufique, au lieu de
parler
a~ec
la parole, emprunte, en quelque forre,
de la mefure un langage
a
part. La force de
l'expref-
jion
confifte
~
en cette partie'
a
réunir ces deux lan–
gages le plus qu'il efr P.offible ,
&
a
faíre que , fi la
mefure
&
le rhythme ne partent pas de
~3.
rheme
maniere' ils difent au moins
l~s
memes chofes.
La gaieté qui donne de la vivacité
a
tous nos mou–
vemens ' en doit donner de meme
a
la mefure: la
trifieífe reíferre le c:reur, ralentit les mouvemens;
&
la meme langueur fe fait fentir dans les chants
qu'elle infpire: mais _quand la do.uleur eft vive ou
qu'il fe paífe dans l'ame de grands combats, lapa–
role efr inégale; elle marche alternativement avec
la lenteur du
fpolnd~e,
&
avec la rapidité du pyrri–
que , & fouvent s'arrete tout court comme dans le
récitatif obligé
:
c'efi; pour cela que les muíiques les
plus expreffives
~ o~
du moins les plus paffionnées.
1
font communement celles o1t les tems, quoiqu'e–
gaux entr'eux, font les plus inégalement divifés;
au lieu que l'image du fommeil, dure pos, de la paix
de l'ame , fe peint volonti.ers avec des notes égales
qui ne marchent ni· vite ni lentement.
Une qbfervation
que
le compoíiteur
n_e
doit pas
.Teme
JI.
1'
1
EXP
nég.liger; c,eft que plus l'harmocie efl: re.: 1erchce
~
~OlOS
le rnouve?lent doit erre vif' afin que l'efprit
ait le tems de falÍir la marche des diifonances
&
le
rapide .enchaí'nernent des modula t!Ons : il n'y
a que
1~
d:rmer
en:p~>r~rement
des paffions qui permerte
d alher la rap1d1te de la mefure
&
la dureré des ac–
c?r~s. ~lor~
quand la
t~te
eít
pe~due
&
qu'a force
cl
aguatiOn
1
aél:eur femble ne (av01r plus ce qu'il dit
~
~e
défordre énergique
&
terrible peut
fe
porter ainíi
Jufqn'~
l'ame du fpettateur'
&
le
mettre
de
meme
hors de
lui.
Mais
{i
vous .n'étes bouillant
&
fublime
v~nts
ne ferez que barraque
&
froid: jettez vos
au:
(hteurs daos le délire, ou gardez·vous d'y tomber;
car celui qui perd la raifon n'eíl jamais qu'un ínfenfé
aux yeux de ceux qui la confervenc,
&
les fous
n'i ntéreífent plus.
Quoique. la plus grande force de
l'expreifion
fe tire
de la comb1na1fon des fons,"la qualité
d.e
leur timbre
n'e!l= pas indifférenre pour le
m~me
effet.
11
y
a des
vo1x fortes
&
fonores quien impofent par leur étof·
fe; d'autres légeres
&
flexibles, bonnes pour les
chofes d'exécution; d'autres feníibl es
&
délicates
1»
qui vonr au cretlr par des chants doHx
&
pathériques.
En général, les deifus
&
toutes les voix aigues font
plus propres pour exprimer latendreife
&
la douceur,
les baífes
&
les concordans pour l'emportemenr
&
la.
colere. Mais les ltaliens ont banni les bailes de leurs
tragédies, comme une partie dont les chanrs fonc
trop ntdes pour le genre héro!que,
&
leur ont
{ubf·
titué les tailles'
ou
tenors' dont le chant a le meme
caraél:ere avec un effet plus agréal:>le. Ils emploient
ces
m~mes baífe~s
plus convenablement dans le co–
mique pour les roles
a
manteanx' & généralement
pour tous les caraéteres de charge.
Les iníl:rumens ont auffi des
expre.ffions
tres-diffé·
rentes, felon que le fon en eíl aigre
ou
doux, que
le diapafon en efl: grave ou aigu ,
&
qu'on en peut
tirer des fons en plus grande ou moindre quantité.
La flt1te efr tendre ; le hautbois, gai; la trornpette,
guerriere; le cor, fonore, majeílueux, propre ame
grandes
expreffions.
M
a'
s
il
n'y
a point d'inílrumen"t
dont on tire une
t!xpre{jion
plus variée
&
plus univer–
felle que
du
violan. Cet inítrumenr admirable fait
le fonds de tous les orchefires,
&
fuffit
au grand c0m–
poíiteur pour en tirel' tous les, effets que les mauvais
muíiciens che.rchent inutilement dans l'alliage d'une
multitude d'iníhumens divers. Le compoíiteur doit
connoitre le manche du violon pour doigter fes airs;
po11r difpofer fes arpeges, pour favoir l'effet des
cordes
a
vuide '
&
pour employet
&
choifir fes tons
felon les divers caraéteres qu'ils ont fur cet
infrru~
ment.
Vainement le compoíiteur faura-t-il animer fon
ouvrage' fila chaleur
qui
doit y régner ne paífe
a
ceux qui l'exécutent: le chanteur qui ne voit que
des notes dans fa parrie, n'efl point en état de faiíir
fe::cpn.!fion
du éompoíiteur' ni d'en donner une
a
ce
qu'il chante 's'il n'en a bien faifi le fens.
n
faut en–
cendre ce qu'on lit, pour le faire entendre aux att·
tres :
&
il ne fuffit pas d'etre fenfible en général,
fi
on ne l'eft pasen partionlier
a
l'énergie de la langue
qu'on parle. Commencez done par bien cónno!tre
Ié
caraél:ere dn chant que vous avez
a
rendre ; fon rap·
porta u fens des paroles; ladjfiinétion de fes phrafes,
l'accent qu'il a par lui-meme, ce qu'il fuppofe dans
la voix de l'exécutant, l'énergie que le compoúteur
a donnée au poere,
&
eelle que vous pouvez donner
a
votre tour au compofiteur. Alors livrez vos orga•
nes
a
toute la chaleur que ces confidérarions vous
auront infpirée ; fait€s ce que
VOI:lS
feriez íi vous
etiez
a
la fois le poete; le compoíiteur' 1'aéteur
&
le
chanteur:
&
vous aurez route
l'expre.f!ion
qu'il vous
efi poffible de donner
a
l'ouvrage que vou
a
vez~
rendre.
De
(;ette maniere, il arnvera naturellement
A
.A
A
a a a
ij