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1

..

CAN

par l'Océan

&

le fleuve Miffiffipi, n'a point de hor..:

nes connues vers le nord, oi1 elle fe confond ave e ces

pays froids,

ou

l'avarice

&

la curiofité Européennes

n'ont encore pénétré; Québec ea efi la capitale.

Quoique le

Canadafoit

auffi voifin de l'équateur que

le pays que nous habitons, l'hiver y efi plus piEJuant

&

l'hiver plus long que dans les régions tempérées

de l'Europe; les vafies forets dont cette terre nou–

v<!lle eft couverte, les lacs & les tleuves dont elle

eft coupée,

&

peut-etre l'élévation du terrein, font

les caufes de cette différence de climat

~

fous les

me~

mes parallele; au reíl:e le fol efi fertile,

&

on

y

a

tranfporté avec fucd:s pluíieurs de nos végétaux,

tels que Ie_fromeiit,

&

quelques légumes: le cedre,

l'aca_cia, maintenant l'ornement de nos jardins, le

pelu dont découle une réfine qui fournit le godron.

La tige de ces arbres s'éleve

a

une hauteur beaucoup

plus coníidérable qu'en Europe. Le commerce des,

pelleteries éroit l'objet principal de l'établiífement

des Frans:ois daos ce pays; les forets

y

font peuplées

d'élans, d'ours, de lievres, de cafiors

&

de tigres.

Ces derniers o'ont rien de la férocité des mooftres

<l'

Afrique;

&

c'efr par leurs inclinations douces

&

pacifiq~1es

qu'on les nomme

tigres poltrons.

On a

obfervé que les quadrupedes de cette région étoient

moins grands que ceux des memes efpeces en Europe:

peu économes dans"la jouiífance efe ces biens ufnrpés,

nous en avons détruit pluíieurs efpeces. Les fan va–

ges, plus í'ages que nous, ont fu du moins conferver

celle du caftor; <:;'étoir une 1oi établie parmi eux de

ne jamais anéantir une cabane entiere : la police .

prefcrivoit d'y lai.l{er au moins quelques individus

des deux fexes' deftinés

a

créer une nouvelle répu–

blique. Ces nations féparées par des lacs, des fleu–

ves

&

des montagnes, habitent dans des bourgades

éloignées les . unes des autres. Leurs mreurs, ·Ieurs

ufages, leur caraétere, tout eft intéreífant, jufqu'a

leurs vices &

a

leurs erreurs populaires.

Je parJerai d'abord des Hurons, paree que ce peu–

pie voifin

d~

nos colonies, a eu des relatidns plus

intimes avec elles. Je le peindrai tel qu'il étoit lors

de la découverte du nouvea\d monde,

&

non tel

qu'il eft aujourd'hui; arnolli par notre luxe, adouci

par nos maxirnes, abruti par nq

1'

queurs fortes. La

fcience de la politique fembloit avoir été révélée

a

ce peuple qui, quoique fans étude

&

féparé du refte

des nations , connoiífoit leur forces

&

leur foibfef–

{e, ce qu'il pouvoit en efpérer

~

&

ce qu'il en avoit

a

craindre. Supérieur par fes lumieres

a

tous les ha–

bitans du feptentrion, il l'étoit encore plus par la

vigueur du corps : un Huron n'avoit d'autre intéret

a

défendre que fon indépend?nCe,

&

il facrifioit

tout

a

cette idole chérie. lnquict

&

foups:onneux il

croyoit fa liberté menacée par tour ce qui l'appro–

choit ; il ne connoiífoit point l'épanchement du

creur, paree qu'il craignoit d'etre trompé par des

dehors affeétueux; s'il faifoit des préfens, il n'étoit

libéral que par des vues cachées ; il en recevoit fans

reconnoiffance, perfuadé qu'on les lui offroit fans

amitié. Toujours occupé

a

tendre des pieges ou

a

les

éviter, fon unique étude étoit d'obferver

&

de dé–

coYvrir le foible de fon ennemi. Ses quefiions étoient

iníidieufes, fes réponfes vives, laconiques, toujours

fauífes

&

toujours vá:tifemblables: éloquent,mais fans

fafte

&

fans prétention, il avoit l'art de cacher celui

qu'il mettoit dans fes difcours. Fertile en prétextes,

il déguifoit toujours le véritable rnotif qui le faifoit

agir. Ces talens naturels étoient répandus avec tant

d'égalité parmi ces fauvages , que le dernier d'en–

tr'eux étoit capable de la négociation la plus épineu–

{e, & pouvoit repréfenter fa nation.

L'Iroquois a la meme dofe de génie , mais il en

abufe pour fe livrer

a

des atrocités. Le premier eft

tin, le fecond efi perfide. Le Hur<;>n

em~a1né

¡>ar le

C A .N

circoníla.nc~

s,

viole fans fcrupule le

tra~té

le plus

folemnellem

ent juré,

&

l'Iroquois le conclut dans le

deífein de le violer, lorfque les circonfrances l'aífu–

reront de l'impunité. Celui-ci careífe l'étranger pour

fe défendre de fes embt1ches, celui-la l'embraífe

pour l'étouffer. On a vu leurs députés maífacrer les

Europée,ns

au_fo~tir

meme de.s, aífemblées ou la paix:

venolt .d etre ¡uree : leurs alhes font leurs premiers

ennemts. En

1706,

apres le célebre traité de Mont–

réal, ils trahirent la France,

&

s'unirent aux Anglois;

cenx- ci les aiderent

a

vaincre '

&

pour prix de

leurs fervices,

ces

barbares firent périr toute leur

armée, en corrompant les eaux. Tant que nous avons

été poífeífeurs du

Canada,

ils ont fuivi un plan de

politique confiant

&

invariable; c'étoit d'allumer la

difcorde entre les Frans:ois

&

les Anglois, pa:ífer al–

ternativement d'un partí

a

l'autre , de rétablir l'équi–

libre par une diveríioq , lorfque la nation qu'ils

avoient choifi pour alliée, devenoit alrez puiífante

pour les affervir. Leur politique artificieufe étoir de

détruire les Européens les uns apres les autres.

En

général la paffion dominante

d~

tous ces peuples,

eft l'amour de la liberté. En peignant

l~s

Iroquois &

les Hurons, j'ai peint toutes les nations voifmes;

meme caraétere' memes vices' memes talens: on

diftingue

a

peine entr'elles quelques nuances; leurs

mreurs ont la meme analogie. On voit régner les

memes ufages chez toutes les nations'

depui~

la baie

d'Hl'tdfon, Jttfqu'au fleuve Miffiffipi,

&

aux bords de

l'océan. Vers le lac Huron ,.on rencontre les Mipiffi–

riens, la nation de la Loutre, les Outaouaicks, les

Hurons, les Cynagos

~les

iskakous, les Manfova,

les Kaetous, les Sauteurs, les Miffiífakes. Le nord

efi couvert de nations moins nombreufes

&

plus

éparfes, ce fó'nt les Chriftinanx, les Monforis, leg

Chichi-Goueks, les Otaulubis, les OnaQvientagos,

les Micacondi.bes , les Aíliribouets.

Pd~s

dulae Ou–

tariou , font les Iroquois , di vifés en plufieurs can"""

tons. Le fnd efr habité par les Ponteanotemis ,

le~

Sakis, les Malhominis, les Onenebegous ou Puans

~

les Outagamis ou Renards, les Maskouteks, les Mía–

mis, les Kikabous, les Illinois, les Ayoes, divifés

en différentes tribus, qui font répandues vers

l'<¡~.1efr.

Tons ces fauvages font légers

a

Ia coúrfe, adroits

a

la chaífe , braves dans les combats' patiens dans les

travaux

&

meme dans les{upplices. Ceux qui n'ont

point embraífé le Cbrifiianifme ont moins de confian•

ce en Dieu que daos le diable ; on voit chez eux peu–

de culte

'a

moins qu'6>n ne veuille décorer leurs jon–

gleurs du

titr~

de pretres,

&

appeller religion le ref–

peé.t ftupide qa'ils ont pour ces charlatcms, qui pré–

tendent Jire 4ans l'avenir

&

meme aans les creurs

i

ils

~xercent

la médecine : toute leur fcience fe borne

a

6!1fermer le malade dans une étuve'

&

a

lui procu–

rer la tranfpiration la plus abondante; ils accompa–

gnent cette opération d'un vacarme affreux

~

de pa–

roles myfiérieufes, de contorfions

&

de garnbades.

Nous avons perdu le droit de rire de ces extrava–

gances' p lifque les mernes fcandales fe font renou–

vellées en France, dans un fiecle éclairé par la phi–

lofophie. Si le malade échappe

a

la mort, c'eft au

faltymbanque qu'il fe croit rédevable de la vie;

s'il

rneurt, l'excufe du médecin eí1: toujours prete; il eft

bien payé danS }'un

&

J'autre CaS,

&

[OUt fe pafl'e

a

cet égard comme chez les peuples civiiifés. Ces

jongleurs font auffi les dépofitaires des fecrets de la

religion'

&

c'eft

a

eux qu'efi confié le foin d'inflruire

la jeuneífe. L'eau, difent-ils, eft le premier des élé–

mens

~

Mechapoux s'y promenoit fur une efpece d'lle

flotante, formée de morceaux de bois, groffiérement

aífemblés. Ce dieu créa les animanx pour lui tenir

compagnie, tout ét_oit bien aíforti, car lui-meme

n'étoit qu'un grand lievre : il alloit mourir de faim

a~ec

fes 'onfreres

i

on tint 'onfeil ,

&

1'on promit