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l\1 A N

~en,

elles le preforivcnt aux différens ordres, aut cito–

yens des différens états.

On voit que les manieres, ainfi que les mceurs, doi–

veut changer, feion les différentes formes de gouverne–

ment . D aos

les

pays de defpotifme; les marques de fou–

miffi on

Cont

extr<:mes de

1~

part des

inférieurs ; devant

leurs rois les fauapes de Perfe fe protlernoiem dans la

pouffiere,

&

le pcuple devam les

(atrapes re protlernoit

de me me; 1'

¿\

r.e n'etl poim changéc .

D ans les pays de defpotifme, ks

témoi~nages

d'hu–

manité

&

de condefcendance de la part des

fupérieurs,

fe réduifenr

a

fort peu de chofe. 11

y

a trop d'it)tervalle

entre ce qui ell homme

&

ce qui efl h01nme en place,

pour qll'ils puiilcnt jamais Ce rapprocher; 1:\ les fupérieurs

ne marquen! aux inférieurs que du dédain,

&

quclque–

fois une infultante pitié.

Les égaux efclaves d'un commun maitre, n'ayant ni

pour eux-mcmes, ni pour leurs [emb)ables, aucune e!li–

me, ne s'en témoignent point d31)S

leurs

maniera;

ils

ont foiblement l'un pour l'au¡re, les fentimens de bieo–

veillance; ils attendem peu l'un

d~

l'autre,

&

les e(cla–

ves élevés dans la feryitude ne favcnt point ain¡er; il s

fom plus volon[íers oecupés

a

rejet~r

l'un fur

l'autr~

le poids de leurs fers' qu'a s'aider

a

les fupporter; il s

ont plus l'air d'impJqrer

1~ pitj~,

que

d'~xprin¡er d~

bienféance .

Dans les démocraties, daos

le~

gouvernen)ens otl la

puitrance législatiye réficje daos

1~

corps de

la

n~tion,

les

maniera

marqu~nt

foiblement )es rapports de dé –

pendaoce,

&

en tOUt

genr~

meme; il y a L)lOÍOS

d~ r-;.1~

nieru

&

d'ufages épblis, que d'expreffions de la nat•J–

re;

1~

liberté fe

manif~Oe

dans les attitudes, le¡ tqits

/!¡:

les aélions de chaque ci¡uyel) .

Dans les 3rillocratjques ,

&

daos les pays oq la )iberté

publique n'efl plus, mais otl l'on jo¡Jit de la libenf ci–

vile ; daos les pays o

u

le pe¡lt nombre fait

l~s

lois ,

&

fur-tout daos ceux otl un feul regne , mais par les lois ,

il

y

a heaucoup de

manieres

&

d'ufage

de con vendo o .

Daos ces pays plaire etl un avamage, d.éplaire ef) un

malhenr. On pla

ir par

des agrémen.

&

meme par des

venus,

&

les

ma

,i.ra

y font

~'ordin~ire

nobles

&

agréa–

blcs . Les citqyen

s ont

befoin les uns des autres pour

íi:

con[crver, fe fecourir, s'élever au jouir. lis c raignent

d'éloi¡;ner <l'eux leijrs concitoyens en lailfant avoir leur s

défaurs . On voit par. tout l'hiérarchie

&

les égards, le

re[peél

&

la liberté, l'envie de piaire

&

la

franc~ife .

D'urdinairc daos ces pays on remarque au prernier

coup d'ceil une cena

in~

nniforrnité, les cara

él

eres par•>if–

fenr

[e

retrembler,

p~rce

que leur différence el! cachée

par les

ma11ieref ,

&

t)l~me

on

y

voit beal)coup plus rh

remcnt que dans !es républiques, de

ce

caraékres ori.

ginaux qui Cemblent ne rien devoir qu'a la 'nature,

&

cela non-[culement

p~rce

que les

ma1¡iaes

gcnent

1~

na·

ture, mais

qu'ell~s

la chªngent .

Daos les pays ou regne peu de luxe, ou le peuple efl

occupé du commerce

&

de la culture des

terres, oq

les hommes fe voyent par intéri:t de premiere néceffi·

té, plus que par des raif<H>S d'ambition ou par go(ll du

p!aifir, les del¡ors fom limpies

&

honnetes,

&

l~s

manie·

res

Cont plus íages qu'affeélueufes. 11

n'etl pa; la que–

ll ion de rrouver ejes

agr¡:m~ns

&

d'en montrer; on ne

promet

&

on ne demande que de la juil1ce. En général

dans tous les pays ou la narure n'el1 pas agitée par de$

mouvem~ns

imprimés par le ,¡ouvcrnement, oq le

n~turel

elt

rarement forcé de fe montrcr,

&

connoir pelj

le b=foin de fe c;on¡raindre, les

manieres

[on t

comptées

pour rico

1

il

y

en

~

pcq'

a

¡noins

qu~

les lois n'er¡ ayenr

mtlnué.

L e préfigent de Momcfquieu reproche aux legislateurs

de la Chir¡e d'a,•oir confondu la religion, les mce nrs,

les lois

&

les

manieres;

mais n'ef1-ce pas pour étcrni–

fer la

l~gislation

qu

1

il¡ vouloient donner, que ces génies

fublimes ont lié entre elles des chafes ; qui

d~ns

plufieurs

gouvernemens font indépendantes '

&

qr¡elqucfois meme

oppofées? C'c(l en

~ppuyant

le moral du phyijque , le

politique du religieux, qu'ils ont rendq la confl itutron

de l'étar éternelle,

~

les mreurs immuables, S'il y a des

circontlances,

Íl

les fiecles amenent des momens o

u

il

f~roir

bon qu'une

n~¡ion change~ t

fon caraélere, les

1~g,slateurs de la Cl¡1r¡e ont eu tort .

)e remarque que les nations qui on¡

con[crv~

le plus

long-tems leur efpri¡ natiopal, font celles o

u

le

légi~ la­

teur a établi le plus d> rapport entre la confl itutiorl de

l'état, la

reli~ion,

les mceurs,

&

les

maniu (s,

&

(ur–

tuut

cel)cs ou les

manitrcs

ont été intlituées par les lois .

Les Egypticns font le peuple de l'antiquiré ¡¡ui a chan·

g~

le plus lentemcnt,

&

ce peuple étoit conduit par

des

rttes, par des

manitrcs .

Sous l'empire des Perfes

&

des

Grec~

on reconnut les [ujets de Pfammétique

&

d' .'\–

pries, on les reconnoit fou

les Romains

&

[ous les 1\ila–

m~lucs:

on voit méme

~ncore

aujourd'hui parmi les

E~y­

ptlens modernes des veOrges de leurs anciens uCagcs, taut

ctl pui!rante la force de l'habirude .

Apr~s

les EgyptLens , les Spartiatcs fonn le peuple qui

confc rvé le plus long• tems

C.m

caraélere

lis avo1ent

un gouveruemem ou les mreurs, les

ma,.i tres

les lois

&

la religion s'unill<;>ient, fe fortifi oieot ; étoi;nt faites

l'une pour l'amre. Leurs

mani,res

étoicnt in(iitu.ées

les

f

ujets

&

la

forme de la coo vcrfation, le mainticn 'des

dtoyens, la maniere cjont ils s'abordoiem, leur conduite

daos leurs repas, les détails de bienféaoce, de

Mc~nce

de l'esrérieu¡ enfiu, avoiem occupé

1~

génie de

Lycur~

gue, comme les devoirs eiJcntiels

&

la vertu . Aulli fous

le regne de Nerva les Lacédé rrwnieos fubj ugués depuis

IQng-tem~,

les

f,ac~cjémoniens

qui n'étoient plus un

peuple libre, étoient encore un peuple verrueux . N érOI\

allª t¡t

a

ArhcQes pour fe puriti er aprcs le meurtre de fa

mere, n'ofoit pa(Jer a Lacédé mone; il craignoit les re·

gards de fes citoyens,

~

il

u'y

ayoit pas 1:1 des prétres

.qui !!Kpiatfent

d~s

parrkides ,

]e

crois qne

l~s

Frao.-:ois foru le

peupl~

de J'.Europe

moders¡e dont le

cara.:Cer~

ctl le plus marqué ,

&

qui a

dprouvé le moins <l'altération . lis fon.t, di¡ M . Duelos ,

ce

qu' ils étoicr¡t du tems des croifades, ul)e narjon .vive,

¡pie, généreu(e, brave,

finc~re,

préfompmeule, incoo·

liante, avantageufc, inconfidéréc. Elle change de roo–

des

&

non de tntet¡rs. [,es

manieres

ont fair autrefois,

pour ainfi dirl',

par¡i~

de (es lois. (,e

~od~

de

la che·

valerie, les uCages des .anciens preux, )es reg[J:s de l'an·

den oc cotnJoifie ont

~u

pour objet les

manieres .

Elles

fonr encere en France, plus que dans le retle de 1'En·

pe,

un des obj.ets de certe

f~:conde

éducation qu'on re·

~o

ir en cnrpot dans le 1)10nde,

qui par malheur s'ac–

cordc trop peu avec la premiere.

L es

m ar.irres

doivent done erre un des objets de l'é·

ciucatioo'

&

pcnvenr erre établies méme par des lois'

aulli fquvcnt ponr le moins que

p~r

des exemples. Les

mceurs fonr l'iutéri.eur de J'hqmme, les

manieres

en font

l'extérieur . Etablir les

mani¡:us

p~r

des )ois, ce n'etl

que donner un culte

a

la vcrtu.

Un des effers principanx des

manieres,

c'e!l de gener

en nous les premiers mouvemens : elles ótent l'elfor

&

l'.énergie

a

la nature; mais auffi en nous donnant le tems

de

1~ ré~exjon,

elles nous ernp€chent de facrifi er la ver

tu

a un plailir pré[ept'

c·~n-a-dire

le bonheur de la vie

a

l'ioté rét d'un moment ,

I l Ae faut poiut trop en tenir compre dat)S les arts d'i·

mitat.ion. I.e poete

&

le peintre doi ven! don.oer a la

nature toute

[~ Jib~r¡.é,

mais le citoyen qojt folJ vent la

conrraindre. 11 ef) biet' rare que celui qlJi pour des lé·

gers iméréts [e met au-delfus-des

manieres,

pour un grand

i¡¡térét ne Ce mene au·detrus des mq!urs .

Daos un pays ou les

manieres

Con! un objet impor·

taot, elles furvivem aux mceors,

&

il faut

tnCI)le que

l~s

mceurs foieot proc!igieufernent airérées po\tr qn'on

apper~oive

du cnangemer¡t dans les

manieres .

Les hom–

mes fe

tl)'Jntreot el)core ce qu'ils doiver¡t

~tre

quand

ils ne le fonr p1L1s . L'iQtérét des fe mmes a

~onlervé

long·rems en Europe les dehors

d~ 1~ gal~otcrie,

elles

<lonneut

m~me

encare

aujourd'~ui

un prix

extr~ rne

aux

manieres

polies , aq!Ij elles r¡'éprouvent jamais de tn1l1-

vais procédés ,

&

re~oi vent de~ homma~es

,

&

on leur

rend cncore avec en¡prel!el)'lent des

Cervice~

it¡utiles .

Les

manit res

fon¡ corporelles , parlent aux

fens,

il

l'imagination, en fin font fet¡liblcs,

&

voil:\ pourquoi

el–

les furv iven¡ aux mceurs, yoilil pourquoi elles

l~s

con–

fervent plus que les préceptes

&

les lois ; c'efl par la

meme

r~i(on

qr¡e che?. tnus les peuples il rolle d'anciens

u[ages, qqolql)e les 1)10tifs qni !es or¡t établis

¡¡~

Ce ¡:oa·

fervent plus .

Dar¡s la partie de la M orée, qui étc¡it autrefois la La–

conie, les peuples s'all'err¡blent encore e nains jours de

l'~nnée

&

font des repas publias , qt¡oique l'efprit 9ui

les fit inOituer par Lyqurgue [ol t t¡ien parfJitem>n; étem t

en Morée , L es chats on¡ eu des

temples er¡ Egyptc ;

on ignoreroit pourquoi lis

y

ont aujourd' hui ejes hó?i·

¡anx s'jls n'y

~voienr

pas eu des temples

.

s•;¡

y a eu des peuplos policés avaqt l'inv•ntlon de

l'écritUre, je li¡is

perfr,~dé

qu'ils ont coníervé

lon

~-.tc~

s

l~urs

mreurs

t~lles

que le gouvernemonr les avou

llln

t–

¡uécs, paree que n'ayant poirrt !e fccours des lerrres,

11~

étoient obligés de perp¿tuer les príncipes. des Qlteurs par

les

manieres,

p~r

la tradirion , par les

h1érogly~h~s,

par

des tabl.aux

enfjn par des lignes fenfibles , qur gravent

plus

forteme~r

daqs le cceur Q'le

l'~criture

,

l~s

livre> ,

&

les dé tinitions: les

pr~tres

Egyptrens prcchorent rare-

ment

&

peigaoient beaucoup ,

M

'