RÉPONSE DE M. DE VOLTAIRE.
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Je ne vous le dissimulerai pas. Je trouve qne
M. Maffei a mis plus d'art que moi dans la ma–
niere dont il s'y prend pour .faire penser
a
Mérope
que son fils est l'assassin de son fils meme. Je n'ai
pu me servir comme lui d'un anneau, parce que,
.depuis
I'anneau royal
dont Boileau se moque
dans ses
Satires
,
cela semhlerait trop petit sur
notre théatl'e.
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faut se plier aúx usages de son
.siecle et de sa nation ; mais' par cette raison-la
meme,
il
ne faut pas condamner légeremen.t les
nations étrangeres.
Ni M.
Maffei ni moi n'exposons des motifs bien
nécessaires pour que le tyran Polyphonte veuille
absolument épouser Mé~ope. C'est peut-etre
la
un
défaut du sujet; mais je vous avoue que je crois
qu'un tel défaut est fort léger, quand l'intéret qu'il
produit est considéraMe. Le grand point est d'é–
mouvoir et de faire verser des larmes. On a pleuré
a
Vérone et~ Paris: voila une grande réponse aux.
critiques. On ne peut etre parfait.; mais qu'il est
beau de torn;her avec ses imperfections
!
Il -est vrai
qu'on pardonne beaucoup de ch.oses en ltaliequ'on
ne p~sserait pas en France : premierement, parce
que les goúts, les bienséances, les théa.tres n'y
sont pas les memes; secondement, parce que les
ltaliens, n'ayant point de ville oú l'on représente
tous les jours des pieces dramatiques, ne peuvent
etre aussi exercés que nous en ce genre. Le beau
monstre de l'opéra étouffe chez eux Melpomene;
et il
y
a tant de
castrati.,
qu'il n'y a plus de place
Théatre.
4.
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