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LA MORT DE CÉSAR.
J'ai vu des citoyens s'enfuir avec horreur,
D'autres rougir de hoote et pleurer de douleur.
César., qui cependant lisait sur leur visage
De l ' indigoation l'éclatant témoignage,
Feignant des sentimer:ts long-temps étudiés,
Jette et sceptre et couronne, et les foule
a
ses pieds.
Alors tout se croit libre, alors tout est en proie
Au fol enivrement d'unc indiscrete joie.
Antaine est alarmé; César feint et rougit:
Plus il cele son trouble, et plus on l'applaudit:
La modération sert de voile
a
son crimé:
11 affecte
a
regret un refus magnanime.
Mais, ma]gré ses efforts,
il
frémissait tout has
Qu'on applaudit en
luí
les vertus qu'il n'a pas. (6)
Enfin, ne pouv:ant .plus retenir sa colere ,'
Il sort du Capitole avec un front sévere;
' Il veut que dans une he·ure on s'assemble au sénat,
Dans une heure, Brutus, César cha'nge l'Etat.
De ce sénat sacré la moitié corrompue,
Ayant acheté Rome,
a
César l'a vendue:
Plus la che. que ce pe uple
a
qui, dans sor~ malheur,
Le nom de roi du moins fait toujours quelque horreur,
César, déja trop_roi, v~ut en cor la cournnne:
Le peuple la r efuse, et le sénat la donne.
Que faut-il faire ep.fü1, héros qui m'écoutez?
C ASS I U S.
Mourir, finir des
j
ours dans l'opprobre comptés.
J 'ai trainé les liens de mon indigne vie,
Tant qu'un peu d'espérance a flatté ma patrie;
Voici son dernier jour; et du moins Ca:S~ius
Ne doit plus respirer lorsque l'Etat n'est plus.