88
L'UNIVERS.
monarq
ue, il comptait sur elle comme
sur une
puissan.tealliée; le succes de
son audacieuse entreprise tui parut as–
sul·é , nul ennemi ne se montrait.
l\Joctezuma, qui'
a
la nouvelle des évé–
nements de Cholula, s'était retiré dans
son palais de deuil pour obtenir Je se–
cours des dieux p;ir le jeGne et la prie–
re, flottait entre les résolutions les
plus opposées : un jour il adoptait les ·
conseils énergiques de son frere; un
autre jour il se rangeait
a
l'opinion du
roi de Texcuco, favorable a l'admis–
sion de ces
étran~ers;
enfin il char–
geait ce dernier ae se rendre aupres
de Cortes et de' re<loubler d'adresse
pour le déterminer a ne pas passer
outre. Cortes accueillit l'ambassadeur
avec tous les éga.rds dus a son rang,
et continua sa marche, faisant ohser–
ver, partout la plus sévere discipline,
et prenant, sáns avoir d'ennemis de–
vant lui, toutes les précautions de la
prudeace, Il
s'avan~a
par Texcuco,
a la priere de deux freres du roi de
ce petit Etat, privés de la couronne et
réduits
a
vivre' comme
de~
seigneurs,
de fiefs. L'un d'eux, se plmgnant de la
partialité de l\Ioctezuma, réclamªit' le
trél ne et toutes les terres de
es an–
cetres. Cette querelle de famille, que
nous avons déja signalée, était une
bonne fortune pour Cortes·
il
promit
sa protectíon· et compta un nouvel allié
de plus.
Texcuco , quoique alors inférieur
a
Tenochtitlan en richesses , en magni–
ficence, était apres cette capitale Ja
ville la plus étendue et la plus peuplée
de l'Anahuac. On y comptait quarante
mille maisons. Elle parut aux Espa–
gnols deux fois aussi grande que Sé–
ville : ils ne pouvaient se lasser d'ad–
mirer la beauté des temples, des palais
royaux, des rues, des fontaines et
des ja1:dins publics. Il en fut de mcme
a
Iztapalapa-n, autre grande et belle
ville de douze a quinze mille habi–
tants, apanage
du frere de Moctezu7
ma.
La
Cortes
f.utrecu avec tous les
honneurs possibles et' par le chef et
par tous les seigneurs du pnys. "Nous
fOmes logés , dit Bernal Diaz , dans
de magnifiques palais batís en pierre
et en bois de cedre' ;iyant de vastes
cours et des appartement garnis de
canapés recouverts d'une fine
toile
de coton ornée de broderies et de
peinture, et dont les murs étaient bien
blanchis. Il
y
avait des maisons neu–
ves qui n'éta1ent pas encore achevées,
et qui appartenaient au gouverneur
ou vice-roi; elles étaient aussi solide–
ment baties que les plus belles maisons
d'Espagne. Apres avoir contemplé ces
nobles édifices, nous nous promen5-
mes dans des jardins admirables
a
voir
par la variété des plantes aromatiques,
par de larges allées bordées d'arbres
fruitiers
~
de rosiers, et de bien d'au–
tres 11eurs dont je ne sais pas le nom,
et surtout par cette multituded'oiseaux
au plumage brillant qui s'y trouvaient
réunis. De vastes réservoirs étaient
remplis de pois.sons et couverts de ca–
nards sauvages, de sarcelles, et de plu–
sieurs especes aquatiqu_es qul semblent
particulieres
a
ces contrées. On était
ici sur les bords d'un lac dont l'eau
tres-limpide communique avec le grand
tac de l\lexico par un canal assez Jarge
pour permettre
a
de grandes barques
d'y navi cruer. Tout ce beau
~pectacle
qui m'entourait me lit croire que j'é–
tais dans le parndis terrestre, dans le
plus beau jardin de la terre. A cette
époque la ville était telle que je le dis:
une moiti é de ses maisons se trouvait
dans le tac, l'autre sur la terre fel'me;
_
mais tout est détruit; ce qui était tac
esLaujourd' hui des champs de ma'is,
et les Indiens eux-memes peuvent
a
grand'peine reconna1tre l'emplacement
des ancieanes demeures. "
" Le lendemai11 de man arrivée dans
cette vi lle, dit Cortes, je la quittai
pour suivre ma route par la grande
chaussée qui conduit
a
l\
Iexico, chaus–
sée bien faite, large d-e
dei.lx lances,
ou huit chevaux peuvent marcher de
front, et bordée de trois gros villages,
dont un surtout, tres-peuplé et bien
bati, se distingue par ses temples et
par son grand commercc de sel tiré
!fes eaux du marais par ébu llition et
faconné en forme de pains. Une demi–
lie'ue avant d'entrer
a
Tenochtitlan ou
l\Jexico, dans un li eu nommé Xolor,