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476

L'UNIVERS.

veau monde a gémi pendant trois

siecles; tout ce que l'on sait sur le des–

potisme des vainqueurs

il

l'égard des_

nations indigenes, sur leur barbarier¡

·leur cupidité et Jeur politique inepte

autant que coupable, peut s'appliquer

a l'empire péruvien. Ce serait done

fa1re un inutile double emploi que de

retracer en détail les miseres des peu–

ples du Pérou sous la domination espa-.

gnole. Toutefois, la tyrannie des mai–

tres de cette contrée s'étant particulie–

rement distinguée par quelques moyens

extraordinaires et mémorables, nous ne

pouvons passer sous silence ce trait

caractéristique. Ces deux moyens de.

despotisme étaient le

mita

et le

repar–

timiento.

Le

mita

était une conscrip·

tion civile , c'est. il -dire l'obliaation

imposée a Ja population de c11aque

district de fournir tous les ans un

certaio nombre d'hommes pour le ser–

vice des propriétaires de terres ou de

mines. A la vérité, sous le gouverne–

ment des Incas, un certain nombre

d'indigcnes étaient réduits

a

l'état de

servitude le plus pénible ; l'hi toire

nou

apprend meme que, comme les

tamemes

du Mexique, les

11.anaconas

du Pérou étaient-employés a porter de

pesa nls fardeaux et a remplir toute

sorte de fooctions repoussantes. La

loi

esp~gnole

ne sortait done pas de la

tradition, et elle n'avait en elle-meme

rien qui pt1t etre considéré.par les .Tia·

turels comme un redoublement de

cruauté. ll'lais les reglements qui ser–

virent de commentaires a cette loi,

constituaient une véritable aggrava–

t.ion, et les effets du rrgime auquel on

soumit les

mitayos

dans les exploita–

tions de mines' furent rminemment

désastreux. Tout Indien,

a

partir

ele

18

ans jusqu'a

50

ans, était forcé

de travniller aux mines. A cet effet,

on formait des listes sous sept rubri–

ques différentes; les individus dont le

nom

y

figurait, devaient servir pendant

six mois ' , et

a

tour de role' de sorte

que chaque

indi~é_ne

voyait on tour

arriver npres tro1s ans et demi. L'In–

dien appelé aux mines, quittait sa

ta–

mille, abanelonnait ses intérets de toate

nature, et devait se rendre au lieu

d'exil qui luí était assigné; il follait

quelquefois parcourir, pour atteindre

l'endroit des tr<waux, un espace de plu–

sieurs centaines de milles. Quelques–

uns obtenaient la permission d'emme–

ner leurs familles aveceux, etrecevaient

meme une légere somme pour frais de

voyage. Le prix du travail était fixé

a

un demÍ-doll ar par jour

(*).

Dans les

conditions de régime les plus favora–

bles'

il

survivait

a

peine un homme

sur cinq durant la premiere année de

ces travimx reeloutab!es; et ceux qui

résistaient étaient ordinairement rete·

nus sous le prétexte de quelques elettcs,

le plus souvent im·aginaires, contrac–

tées cnvers leurs patrons. Plus ele

12,000

Indiens étaient annuellement

soumis

a

ceite horrible conscription

clans le sen! district de Potosi; et l'on

a calculé que plus de

'8

milliqns d'hom–

mes avaient péri dans les mines de

tout le royaume

(*').

Il y a sans doute

quelque exauération dans ce chiffre.

Quoi qu'il en soit, il est positif que

les nations indigenrs présentent, de–

puis· la conquéte, une dirninution de

nombre vraiment effrayante. Le pre–

mier recensement, fait en

1551 ,

fixa

a

8,255,000

le nombre des Indi ens du

Pérou et de

la Nouvelle-Grenade;

(*)

Mercurio p eruria110.

(') Mémoires de Mi ller, I, p.

5.

Dans

un mémoire présenlé

a

Philippe III, en

1609, le capitaine Juan Gonzales de Aze–

' 'edo affirme que, dans chaque district pé–

ruvien, ou les naturels étaient conlraints

de travailler aux mines, la population a été

diminuée de moitié, el dans qnelques en–

droits des deux tiers. Roberlson cite une

autre autorité espagnole ponr prouver que

dans toutes les localit és dont les richesses

minérales étaienl exploitées, le nombre des

Indiens décroissait rapidement; tandis que,

dans la provincc de Campeche,

oi1

il n'existe .

pas de mines , la population indigene a

augmenté de plus d'nn tiers depuis la con–

c¡uete, bien que le sol ni le climat de celle

province ne soienl aussi favorables que le

dimat et le sol du-Pérou. Nous pourrions

aussi renvoyer le lecleur

il

d'autres écrivains

qui confirment, de la maniere la plus po–

sitive et la plus autheotique, l'asserlion

que nous avons émise.