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L'UNIVERS.
«
Pour les différentes affaires de
guerre, de gouvernement, de tributs,
de cérémonie, de terres,
il
y avait di–
vers quipos, et dans chaque paquet de
ceux-ci, beaucoup de noouds et de fils
attachés; les uns rouges, verts, bleus,
blancs, et autant de différences que
nous en
trouvons dans nos vingt–
quatre lettres, en les
pla~ant
de di ver–
ses manieres, pourtirer une aussi gran- .
de quantité de sons; de meme les In–
diens, de let•rs nreuds et couleurs,
tiraient un grand nombre de sign1fi–
cations de choses. " A notre avis, il
ne résulte pas de ce térnoignage que
les quipos pussent tenir compléte–
ment lieu de registres historiques ou
d'archives proprement dites. De l'ex–
rression d'un certain nombre d'idées,
a l'enregistrement de tous les faits im–
portants des fastes cl'une nation, il
y
a
loin assurément. La question serait
tranchée, s'il était vrai, comme l'af–
firme Acosta, que les Péruviens eus–
sent des peintures
hiérogl~·phiques
destinées a cohsacrer s mboliquement
la mémoire des événements les plus
marquants, ou la gloire des hommes
illustres. Mais, a moins de considérer
comme
des
hiéroglyphes queJques ca–
racteres bizarres représentés sur un
monument dessiné par
1\'l,
D'Orbigny,
et publié dans son atlas, nous ne sa–
chions pas que l'existence de ce mode
d'écriture chez les anciens Péruviens
a1t .été prouvée péremptoire1111mt. Si
ce peuple avait connu l'écriture sym–
bolique, il ne s'en serait pas servi
seulement sur ses édifices;
ir
aurait
écrit son histoire sur des tablettes,
sur des parchemins ou sur un tissu
végétal quelconque,comme ont fait les•
Mexicains. Et si cette coutume avait
existé au Pérou, les Espagnols en
auraient a coup sur retrouvé des tra–
ces nombreuses. Alors meme que les
.conquérants eussent anéanti tous ces
documents si précieux, ce qui n'est
pns présumable, le fait aur:ait été in–
failliblement constaté par les chroni–
queurs et surtout par Garcilasso de
la Véga.
fürns croyons done qu'il (aut s'en
tenir a l'explication de ce dernier au-
teur qui, ainsi qu'on l'a vu, borne les
archives péruvtennes a l'usage des
quipos, et l'utilité de cenx-ci a la
constatation des
fait~
les plus simples,
surtout en matiere de statistique.
Nous avons parlé tout a l'heure des
gardiens des quipos.
~o
coofiait,
en effet, la conservation de ces cor–
dons
a
des bommes choisis parmi les
plus prohes et les plus éclairés. Ces
fonctionnaires s'appelaieot
quipuca–
rnayus,
c'est-a-dire
1
préposés aux
comptes.
On en proportionnait le
nombre
a
la population des villes et
des proviqces. Pour si petite que füt
une ville, elle devait avoir quatre qui–
pucamayus. II parait, toutefois, qu'on
ne d6passait pas le nombre de trente.
La raison de la multiplicité de ces
gardiens était tout a fait plausible;
bien que tous les archivistes d'une
meme ville eussent les memes quipos,
et que, par conséquent, un seul aardicn
pt1t suftire a la rigueur, néanmoins,
pour préveair toute supercherie, !'lo–
ca voulait qu'il y en eut plusieurs
dans cbaque localité, disant que, s'ils
étaient en petit nombre,
ils pour-
11aient s'entend1
1
e pour
interprétei;
fausse1J1ent les qui pos, tao.dis que le
mensonge était beaucoup plus diflicile
avec un grand nombre de fonction–
naires; il fa ll ait qu 'i ls fussent tous
fideles ou qu'ils trempassent tous dans
le meme complot, ce qui n'était guere
a supposer. Ces considératio ns mon–
trent combien les Péruviens eux-me–
mes regardaient les quipos com111e
insuffisants et meme dangereux.
Parmi les usages des Péruviens,
nous ne devons pas oublier celui que
rappelle M. D'Orbigny dans la partie
de son voyage qui eoncerne la Bolivie.
1,
A l'entrée de la vallée et
a
la som–
mité de chaque cote, je remarquai sur
toute la route, dit le savant voyageur,
des monticules de pierres plus ou
moins vohrmineux, le plus souvent
surmontés d'une ci;oix de bois et cou–
verts de taches d'une matiere verdá–
t_re; je voul1..os s
avoirce que c'était.
J'appris, et j'eus
Ji.eude m'en .assurer
plus tard, en les retrouvant sur toute
la partie de la république de Bo)ivie,