PEROU ET BOLIVIE.
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tance; par exemple , s'il s'agissait
de blé ou de légumes , on plaQait
d'abord le froment, pu is
le seigle,
le_s pois , les
fe
ves, etc... De meme,
quand ils voulaient compter des armes,
ilsm ttaienten premierlieucellesqu'ils
juge.airnt les"'):>lus nobles , c'est-a-dire
les lances, puis les fl eches, les aros,
les javrlots, les massues, les haches,
les fro11des, etc... Pour faire le cl é–
nombrement de
la population,
ils
commenQaient par le
habitants de
chaque ville, Pnsaite ils rnarquaient
la population de chaque province. lis
désignaieot par le prernier
fil
les vieil–
lards de soixante ans et au-dessus,
par le second, les hommes de cin–
quante ans, par le troisieme, ceux de
quarante, et ain i des autres, en des–
cendant toujours de dix en dix ans,
ju. cju'aux enfants a la mamelle. lis
cumptaient les femmes de la meme
maniere, et en suivant un ordre sem–
blable.
Certains petits tils tres-lins et de
meme couleur, mlllés aux cordons,
désignaient des exception au fait gé–
néral; par exemple, les fils de Gette
natu re insérés dans le corClon consa–
cré aux homrnes ou femmes mariés
de tel ou tel fige, indiquaient ce qu'il
y avait eu de veufs 06 de
uve dans
le · courant de l'année; nous disons
dans le courant de l'année, car les
quipo ne servaient qu'a une statisti-
que annuelle.
.
On ob ervait toujours dans les qui–
pos l'ordre de dizaine, c'est-a-dire
qu'on procédait ainsi : dizaioe, cen–
taine, mille, dizaine de mille. On dé–
passait rarement la centaine de mille,
parce que chaque ville ayant son re–
gistre parti cu lier, on atteignait difil–
cilement le chiffre de cent mille. Il
paraiL, du reste, que ce n'était pas
faute ele pou\'oir exprimer
le
nombre
cent mille daos la tangue péruvienne,
ca·r cette langue se prete
á
toutes les
combinaisons d'arithmétique. On pla–
cait en haut Je nombre le plus fort,
é'est-a-dire
la
diznine de mille, et l'on
descendait en suivant la progression.
Tout ce qui élait du domaine du
chiffre pouvait s'exprimer au moyen
des quipos. Les tributs
per~us
pour
l'Inca, le nombre des gens de guerre,
des naissances, des déces, des batail–
les, des ambassades, des ordonnaoces
royales, formaient le contenu de ces
siugulieres archives. l\lais on com-
. prend qu'il était impossible d'exprimer
par des nreuds et par des cordons. les
événements liistoriques, la substance
des édits impériaux et le but des am–
bassades. En un mot
1
tout ce qui est
du ressort exclusif de la parole ou de
l'écriture variée ne pouvait trouver
place dans les quipos. Toutefois,
les
Péruviens avaient
ce~taines
marques
particulieres destinées a conserver
jusqu'a un certain point le souvenir des
actions mémorables et des décisions
les · plus importantes. du souveraio.
Les gnrdieos des quipos étaient d'ail–
leurs chargés d'en a¡Jprendre les dé–
tails par creur, et d'en transmettre la
tradition a leurs successeurs, de, pere
en
lils.
En outre, les
amautas,
ou
pbilosophes, rés11maient sous forme
d'apologue les choses les plus dignes
de mémoire, alin que les peres les
racontas ent
a
leurs enfants, et les
hauts fonctionnaires
a
Jeurs
subor–
donné . Enlií1, les
arovicus,
ou poe–
tes, pretaienli a l'bistoire le secours
de la ve;·sifioatioo, poor mieux incul–
quer dans l'esprit des contemporai ns
et des races futures le sou1•enir des
faits natiooaux les plus éclatants. On
cornprend,
toutefois,
comhien
ce
moyen de propagande historique étai t
défectueux. C'est
a
ce manque de
traditions certaines qu'on doit attri–
buer l'impossibilité d'écrire compléte–
ment, ou du moins avec quelque degré
de certitude, l'bistoire de l'ancien em–
pire du Pérou.
Néanmoins,
1\1.
D'Orbigny c1·oit
trouver dans un passage d'Acosta
(*)
la preuve que les quiµos
(**)
ser\'aient
positivement d'annales historiques.
Voicí ce passage tel que l'a traduit
notre savant compatriote:
(')
Historia nat. de 'las Indias
(1591),
lib.
VI'
cap.
VIII'
p. 266.
e••)
Les di ctionnaires étriveot
9quipus
1
le premier
q
étant tres-¡;uttural.