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V
Ell S.
11 n'est pas sans importance de faire
l'emarquer qu'au milieu de ces croyan–
ces religieuses et de leurs. conséquen–
ces , on voit percer l'id ée d'un créateur
unique, autre que Je solei l. Les Péru–
viens révéraient une puissance supé–
ri eure dont ils ne parlaient qu'avec les
témoignages les plus significatifs de
respect et de craiote. Ce dieu inconnu
s'appelait
Pachacamac,
nom com–
posé de deux rnots ,
pacha
( monde ) ,
et
camar
(
animer ). " Ce nom , dit
Garcil1>sso de la Véga, Jeur était en si
grande vénération, qu'ils n'osaient le
prononcer; si la nécessité les y obli–
gea it, ils le faisaient avec de gran–
des marques de_ respect et de sou–
mi ssion; ils rapprochaient leurs épau–
les, baissaient la tete, p enchaicnt leur
<;:orps en avant et Jevaient les yeux aux
ciel' puis tout
a
coup ils abaissaient
leurs regards vers la terre, portaient
leurs mains ouvertes sur l'épaule
droite et . don naient des baisers
a
l'air
(~).
"
lis
réservaient tous ces si–
gnes de respect superstitieux
a
Pacha–
camac
¡
ca r ils prononi:aient
a
tout
instant le
110111
du soleil sans se livrer
aux memes démonstnations; ce qui
prouve qu'ils placaient plus haut, dans
leurscroyances, ledieu.Pachacamac que
son embleme.
" fü
qnelqu'un leur de–
mandait qui étair Pach:icamac, il S' ré–
pondaient qu e lui seu l donnait la vie
a
l'univers et le faisait
subsi ~ter;
qu'ils
ne l'avaient pourtant jamais v.u; qu'a
cause de cela ils ne lui batissaient point
ae temples et ne lui offraient aucuns
sacrifices; mais qu' ils l'adorai ent dans
le fond de leur creur, et qu'ils le regar–
daient comme le dieu inconnu. Augus–
tin de Zarate rapporte que Je R. P. F.
Vincent de Val verde cht au roi
A
ta–
hualpa, que Notre-Seigneur J és us–
Christ avait créé le monde, et que !'Inca
lu i répondit qu'il ne savait rien de cela,
qu'il ne croyait pas meme qu'aucun
etre, excepté le soleil , pút créerqu elque
chose; qu'il le tenait pour Dieu et Ja
(•) Histoire des Incas, rois du Pérou,
traduile de l'espagnol de l'Iuca Garcilasso
de la Véga,
t.
I, p.
61 ,
éJit.
d'Amsler–
dam, 1737, in-4º.
terre pour mere avec leurs Guaccos ;
qu'au reste
Pachacaniac avait tiré le
grand
monde
dunéant,etc.
(•).,,
On ne
peut done révoquer en doute la crovan–
ce des Péruviens
a
un pouvoir sÚpé–
rieur, auteur de toutes choses. Du
reste, c'est ce qu'on observe chez
presque tous les peuples' et meme
chez ceux qui vi vent dans le fétichisme
Je plus grossier et qui admettent la
pluralité des dieux.
On a cru, sur la foi des écrivains
espagnols, que Pachacamac était le
démon ou le mauvais principe; mais
Garcilasso rectifie cette erreur. Cet
historien qui , en sa quali té d'Indien,
parlait la langue péruvienne et en corn–
prenait toutes les nuances, affirme
que Pachacamac était le créateur de
l'univers, le Dieu Tout-Puissant mais
inconnu, et qu e les indigenes dési–
g nai en ~
le démon sous la dénomination
de
Cupay;
il ajoute que guand ils pro–
non~a ient
le nom du génie du mal, ils
orachaient a terre en signe de mépris
et de malédiction, tandis qu'ils ne dé–
signaient Pacbacamac qu'en donnant
les marqu es de la vénération la plus
profonde.
Il para!t certain qu'ils croyaient
a
l'immortalité éle !'ame et a une résur–
recti on. li s appelaient le corps
Alpaca–
masca,
c'est-a-dire
terre
animée,
et
pour distinguer l'homme de la bete ,
ils employaient les expressions de
Runa
et de
Llama,
dont la premiere
signifie un etre doué de raison, et la
seconde un animal. L'idée de la résur–
rection était,
a
ce qu'il semble, chez
eux, plus nette et plus précise. Sui–
vant Garcilasso de la Véga, ils ¡¡vaient
grand soin de mettre en lieu de slireté
les rognures de leurs ongles et les
che~
veux qu'ils se coupaient ou qu'ils
i.li–
saient tomber en se peignant, et cela
dans le but de se retrouver au complet
quand vienctrait Je jour de la résurrec–
tion. Francisco Lopez de Gomara <lit
qu e quand les Espagnols ouvraient les
tombeaux des princes péruviens et en
dispersaient-les ossements, les Indiens
les conjuraient de laisser·ces _débris réu-
(•) Garcilasso,
t.
1 ,
p.
61.