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L'UNIVERS.
en cleux fragments de roseau réunis
~t
li és
a
leur extrémité. I.'instrument mis
dans la bouche, ouveTt par le milieu
et fix é par
de~
li ens qui. s'at,tachai.ent
derri ere la tete, pressait necessa1re–
ment la langue et Jui interdisait tout
mouvement.
"
ous trouvames dans un tiroir
une grande quantité d'écrous
a
doigts;
c'étaient de petits anneaux en fer,
semi - ci rcul aires, ayant un écrou a
chaq ue extrémité, ele tell e sorte qu'ils
pouvaient etre fix és sur les doigts et
vis és
a tel degré qu'on voulai t ;
meme jusqu'a écraser les ongles et a
broyer les os. En contemplant ces ins–
truments de
torture, qui pourrait
troúver la moindre excuse en faveur
des monstres qui les faisaient servir
a
la propagation et a la glorification des
préceptes si doux et si charitables pre–
chés par le divin J ésus? Puisse celui
qni ne les accable pas de ses malédic–
tions, tomber entre leurs mains im–
pitoyables
! ,,
La gene. et le pi lori furent bientot
détruits ; telle été\it la í'ureur des cent
et quelques pe1·sonnes qui araient fait
irruption dans ces lieux maudits, que
ces instruments, eu sent- ils été de
fer, n'auraien pas résisté a l'assaut
énergiqu e que leur li vrerent les assis–
tants.
" 11 y avait ¡Jans un coin un cheval de
bois peint en blanc. Nous crumes d'a–
bord que c'était un instrument de sup–
plice, et, en une minute, il fut mis en
pi eces. l\lais j'ai su clepuis la destina–
tion de ce cheval: une victime de l'inqui–
s1tion, qui avait été brul ée, fut, qu elque
temps apres , reconnue innocente des
crimes qu'on lui avait imputés; en dé–
dommagement de sa mort, son inno–
cence fut publiquement proclamée , et
son effigie , vetue de blanc et placée
sur le cheval en questio n, fut promenée
en gra nde pompe dans les rues de
Lima. Quelc¡ues personnes m'.ont dit
qu e le cond amné fu t bn11é dans cette
capitale; d'autres affirment qu 'il fut
supplicié en Espagne, et que, en vertu
<l'un décret de l'inquisiteur général,
cette indigne comédie se joua clans
toutes les possessions espagnol es oü
existait un
tribunal d'inquisition.
" Nous courumes ensuite aux cel–
lul es, mais nous les trouvámes toutes
ouvertes et vides; elles étaient petites,
mais ne nous parurent pas trop in–
commodes comme prison. Quelqt1es–
unes attenaient
o
une petite cour;
d'autres, plus soiitaires, étaient pri–
vées de cet es pace ouvert. La derniere
personne que l'on savait avoir été em–
prisonnée dans ces 'cabanons , était
un officier de marine, Andalou de
nai ssance, et qui fut exilé en
1812
a
Boca-Chica .
" Apres avoir visité tous les coins
et recoins de cette mystérieuse prison,
nous nous retirames vers le soir, em–
portant livres, papiers, fouets, ins–
truments de torture, etc. Plusieurs
de ces objets furent distribués
a
la
porte, notamment les mouchoirs im–
pies. Le lendemai n, l'archeveque con–
voqua les fid e!es
a
la ca théd rale et dé–
clara excomrnuniés,
velut participan–
tes
,
tous ceax qui avaient pris et qui
garder:iient en leur possess ion quoi que
ce füt !qui etlt a¡>partenu
a
!'ex-tribu–
nal cl'inquisition. Effrayés par cet ana- .
theme , plusi eurs des pillards resti–
tuerent ce qu'ils avaient pris; qa ant
a
moi , je gardai ce qui m'était tombé
entre les mains en dépit des flammes
infernales dont le saint archeveque
avait menacé
renitentes
et
ref'inentes.
" Les étrangers qui visitent Lima se–
ront peut-etre bien aises d'::ipprendre
que l'end ro it ou l'on brUlaít les mal–
heureuses victimes de l'inquisition est
proche de la
plaza del Toro,
et que
c'était
a
la porte de l'église
de
los
De–
samparados
(des Abandonnés) qu'on
les
livrait
~ ux
bourreaux pour
les
conduirc au bucher
(*) . .,
A ces cl étai
ls , nous en ajouterons
d'autres assez
cu.rieux: depuis la créa–
tion de ce tribunal , en
1570 ,
qua–
rante individus furent brulés
a
Lima;
cent vingt condamnés échapperent au
supplice par une rétractation solen–
nelle. La derniere person nequi fut mise
a mort était une femme nomlnée
Cas–
tro,
née en
t
761,
a Tolede en Espagne.
(') Stevenson, mi.
J,
p.
26?·276.