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L'UNIVERS.
caractet·e pr.andiose des édifices ae la
royale cite.
.
Tous les temples se ressemblaient
a
l'extérieur. Mais le grand téocalli se
distinguait de tous les autres par son
immense étendue, ses hautes propor–
tions et sa destination. 11 ne datait que
de
1486,
six ans avant la décou.verte
de l'Amérique par Christophe Colomb.
Son enceinte, dessinée par d'épaisses
murailles de huit pieds de baut, sur–
montées de créneaux en forme de ni–
ches, et couvertes de i'eliefs en pierre,
représentant des serpents entrelacés,
lui donnait l'aspect d'une ville de
guerre soigneusement fortifiée; ses
quatre portes correspondaient aux qua–
tre points cardinaux. La grande pyra–
mide qui s'élevait au centre avait cette
• méme orientation, commune aux é<li–
fices de ce genre, asiatiques ou égyp–
tiens. Le monument mexicain avait
quatre-vingt-dix-sept metres
il
sa base,
et trente-sept autres de hauteur; il
avait l'aspect d'un cube énorme. On y
distioguait cinq étacres ou assises. Un
grand escalier condui ait a la cime de
cette pyramide tronquee; ici, sur la
]llate - forme, s'é.levaient deux petits
·autels dans deux chapelles en forme
.de tours ; ici se montraient deux hi–
deuses idoles, !'une de
Tezc~tlipoca,
la pre1uiere des divinités azteques apres
Teotl ou l'étre supréme invisible; l'au–
tre de Huitzilopochtli , le dieu de la
guerre, le dieu protecteur des Azte–
ques, auc¡uel le temple était particu–
lierement <lé<lié. La aussi , non moins
hi<leuse que les idoles , se trouvait la
pierre des sacrifices, la pierre verte
sm
laquelle les prétres étendaient les
victimes-humaines.Trente-neuf petites
chapelles, consacrées a:a utant de di–
vinités , entouraient la grande pyra–
mi<le, dont l'intérieur servait, comme
nous J'a;vons déja remarqué , a la sé–
pulture des rois et des principaux per–
sonnages mexicains. Rois et nobles
aussi avaient des oratoires dans l'en–
ceinte du temple, qui renfermait encore
des jardins, des fo'ntaines, les habi–
tations des prét.res, et plusieurs cou–
vents d'hommes et de femmes. Cortes
affirme que, dans cet enclos, une ville
de cinq cents feux aurait pu étre éle–
' 'ée. C'est
Ja
que, suivi de ses princi–
paux officiers et accompagné de Moc–
tezuma, il obtint dans les premiers
jours de son arrivée la perrnission de
pét1étrer;
Ja
qu'il fut saisi d'horreur a
l'aspect d'une muraille de
t~tes
et
d'ossements d'hommes, symétrique–
ment arrangés, a la vue des pavés
rougis par le sang des victimes,
a
l'o–
deur qui s'exhala1t de oet ossuaire hi–
deux; la que, ne pouvant retenir son
indignation , il se répandit en impré–
cations contre les idoles et leur culte
infernal
(*).
Si , des temples des dieux , nous pas–
sons avec les Espagnols dans les palais
royaux, nous les voyons sous la forme
d'une réunion de rnaisons spacieuses ,
mais basses. La résidence habituelle de
l\íoctezuma était un vaste édifice biiti
en pierre et en mortier de chaux. 11
avait vingt portes donnant sur des pla-
(*)
Voici le récit de Clavigero. Les Espa–
gnols, quelques jours apres leur arrivée, mon–
terent sur la plate-forme du grand temple.
Moctezuma, qui leur permeltail cetle visite,
les avail précédés afin que sa présence les
empechat de se 1ivrer
a
quelque voie de fait
répréheusible. Corles, de ce poinfélevé, put
observer
it
son al e !'ensemble de. la ville et
tout le pays qui l'cnvironne. Lorsqu'il eut
bien examiné ce vaste panorama , il lui
vi11~
en pensée de pénétrer dans le sanctuaire, -
ce qui lui fut accordé du consentement dés
pretres. Les Espagnols , admis dans le lieu
saint, ne ''irent pas sans horreur les traces
des sacrifices humains , et sans compassiou
l'aveuglement des Mexicains pour un te!
culte. Cortes, le plus irrité de tous, se tour–
nant ' 'et-s Moctezuma, lui dit brusquement:
" Je m'étonne qu'un prince aussi sage que
vous puisse adorer comme l'image des dieux
ces abominables figures d!! démous.,, A ces
outrageantes paroles, Moctezuma se con–
tenta de répondre-: " Si j'avais pu souVion–
ner que vous parleriez de nos dienx avec
une telle inévérence, jamais je n'aurais con–
sentí
a
vous ititroduire darrs leur temple. "
Co11es, voyaut l'irritalion du mona ,ne,
chercha quelque excuse banale, et prenant
soudainement congé pour se retirer dans sou
quartier: " Allez en paix, lui dit Moctezuma,
moi je reste pour apaiser par mes prieres
les dieux que vous avéz outragés.u