LitTTRES
Pour ce qui est de l'ile Blanche, on n'y vit jamais
ni feu ni fmnée. Elle n_e laissoit pas pourtant de
~rohre
toujours;
m.~is
l'He Noire croissoit beaucoup
plus vite. On voyoit chaque jour sortir de gros ro–
chers qui la rendoient tantOt plus longue et tantót
plus large, et cela d'nne maniere si sensible, qu'on
s'en apercevoit d'un moment
a
l'autre. Quelquefois
ées rochers étoient joints
a
l'ile ' quelquefoís ils en
étoient· fort éloignés : de sorte qu'en moins d'nn
mois nous comptames jusqu'a quatre petites Hes
noires, qui, en quatre jours, se réunirent et n'en
firent plus qu'une. On remarqua encore que la fumée
s'étoit fort augmentée, et qu'aucun vent ne souillant
alors, elle montoit si haut, qu'on la voyoit de Can–
die, de Naxie et des autres Hes éloignées. Pendant la
nuít, cette fumée paroíssoit tqute de feu
a
la hauteur
de quinze ou vingt pieds , et la mer se couvrit d'une
matiere ou écume rougeatre en certains endroits , et
jaunatre en d'autres. 11 se répandit sur tout Santorin
une si grande infection,. qu'on fut ohligé de hnller
des parfums,
et
de faire des feux dans les rues. Cette
infection ne dura qu'un jour et demi. Un vent du Sud–
Ouest fort épais la dissipa; mais en chassant un
mal
il
en amena un autre. 11 porta cette fumée ardente sur
lme grande partie des meilleurs vignohles de Santoún,
dont les raisins étoient presque múrs, et qui, en
une nuit, en furent tout grillés. On remarqua en–
core que , partout ou cette fumée fut portée , elle
y
noircit l'argent et le cuivre, et causa aux hahitans de
violentes douleurs de tete , accompagnées de grands
vomissemens. Dans ce temps-la l'ile Blanche s'af–
faissa et haissa tout d'un coup de plus de dix pieds.
Le
31
juillet on s'aper9ut que la roer jetoit de la
fümée et bouillonnoit en deuX: endroits' l'un
a
trente'
et l'autre
a
soixante pas de l'ile Noire. Dans ces deux
espaces, dontchacun formoit un cercle parfait, l'eau
parut comme de l'huile sur le feu. Cela dura plus