ÉDIFIAN'I'ES El;' CURIEUSES.
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premieres pointes de 1'1le naissante, sans pouvoir
bien encore distinguer ce que c'étoit, s'imaginerent
que ce pouvoit etre les restes de quelque naufrage
:>
que la mer avoit amenés la pendant la nuit. Dans
cette pensée , et dans
l'
espérance d'
~tre
des premiers
a
en profiter ' ils
y
allerent en diligence; mais des
qu'ils eurent reconnu qu'au lieu de débris flottans,
c'étoient des rochers et une terre solide, ils revinrent
sur leurs pas tout effrayés, pi1blia11t partout ce qu'ils
venoient de voir.
La frayeur fut d'ahord générale dans tout San–
torin' ou l'on savoit que ces sortes de nouvelles
terres n'avoient presque jamais paru dans le voisi–
nage, sans causer a l'1le de grands désastres. Néan.–
moins deux ou trois jours s'étant
pas~és
sans qu'il
arrivat rien de funeste , quelques Santorinois, plus
l1ardis que les autres , prirent la résolution d'aller
obsen-er de pres ce que c'étoit. Ils furent long-temps
a
tourner de coté et d'autre' et
a
considérer attenti–
vement toutes choses; puis, ne voyant pas qu'il
y
eut de danger' ils approcherent et mirent pied
~
terre. La curiosité les
fit
aller de rocher en rocher,
ou ils trouverent partout une espece de pierre blanche
qui se coupoit comme du pain, et qui en imitoit si
bien la figure , la coukmr et la consistance , qu'au
goút pres, on l'auroit pris pour du véritable pain
d~
froment. Ce qui leur plut davantage, furent quautité
d'hu1tres fraiches attachées aux. rochers, chose Jqrt
rare a Santorin; ils se mirent
a
en ramasser le plus
qu'ils puren Lorsqu'ils s'y attendoient le rnoins, ils
sentirent tout-a-coup les rochers se mouvoir, et tout
trembler sous leurs pieds. La frayeur leur
fit
bientót
abandonner leur
p~che
pour sauter dans leur batean.
Cet ébranlement étoit .un mouve:rnent de file qui
croissoit, et qui, dans le moment, s'éleva
a
vue
d'reil, ayant gagné en tres-peu de jours pres de vi.ngt
pieds de hauteur, et en largeur environ le douhle.
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