EDIFIANTES ET CURIEUSES.
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se soutenir dans leur foiblesse, en rompant le jet"me,
jamais ils ne rompent l'abstinence. Si par hasard ils
ont mangé un ceufpendant leur maladie , c'est, selon
eux , un péché presque impardonnable , dont ils
n'osent se confesser, et dont on a bien de la peine
a
lenr donner l'absolution. Un médecin qui, au com–
mencement du careme, viendroit leur défendre de
jeuner , ou lem· ordonner de faire gras pour con–
server leur préeieuse santé , ne feroit pas fortune ;
on le regarderoit , je ne dis pas seulement comme
un prévaricateur , mais comme un rnonstre , et
comme un ministre du démon : on en auroit hor–
reur, et on le fuiroit. Voila jusqu'oú les Orientaux:
portent la sévérité dans les sentimens et dans la
pratique.
Vous me demanderez maintena11t comment font
)es Anglais et les Hollandais. Ici , comme ·en Hol–
lande et en Angleterre , ils n'observent ni jeúne, ni
abstinence , mais on en est scandalisé : les gens du
pays disent qu'ils ne sont pas chrétiens, et les Turcs
eux-memes les regardent comme des gens sans reli–
gion. Ils sont quelquefois sensibles
a
ces reproches,
et ne pouvant les soutenir , plusieurs d'entre eux ,
pendant le careme, ne mangent de la viande qu'en
secret. Ceux qui sont de bonne foi , avouent qu'ils
sont fort étonnés de voi.r que la religion de tous les
Chrétiens d'Orient ne ressemble presque en rien
a
celle dont ils font profession. Cette différence mar–
quée nous donne un grand avantage sur eux. C'est,
leur disons-nous , e' est aux temps heureux du chris–
tianisme naissant que vous voulez qu'on remonte .
pour justifier les traditions ; c'est aux quatre pre–
miers siecles de l'Eglise que vous en appelez : de–
mandez
a
tous ces p euples qui vous environnent '
ils vous répondront que dans toutes leurs pratiques ,
qui
~ont
les nótres , ils ne suivent que les traaitions
apostoliques ; traditions
qu'ilj
ont re9ues de la
fa-
T. l.
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